Contrefaçon médicamenteuse : l’épidémie silencieuse

30 mai 2013

Les médicaments contrefaits ont engendré 75 milliards de dollars de profits en 2010. ©Phovoir

Un médicament sur dix vendus dans le monde est un faux. Une proportion qui peut atteindre sept sur dix dans certains pays. Ces chiffres émanant des Entreprises du Médicament (LEEM) mettent en lumière une situation inquiétante et pourtant en plein essor dans le monde. En 2011, sur la liste des produits contrefaits, les médicaments tiennent le haut du pavé avec 24% des saisies douanières européennes. Un résultat qui les place devant les cigarettes.

Pour l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les contrefaçons concernent « des médicaments délibérément et frauduleusement étiquetés pour tromper sur leur identité et/ou sur leur origine. On trouve des faux avec les principes actifs corrects, erronés, sans principes actifs, à des doses trop faibles ou trop fortes, ou sous des conditionnements falsifiés.»

Dans tous les cas « ces médicaments constituent un véritable danger » insiste le Dr Caroline Atlani, directrice de la coordination anti-contrefaçon de Sanofi-Aventis. « Toutes les classes thérapeutiques sont concernées. En 2008, les formes sèches étaient largement contrefaites. Aujourd’hui on trouve aussi des produits injectables, dont certains sont destinés à traiter des pathologies lourdes. Ils peuvent donc entraîner des effets indésirables majeurs, voire la mort. »

 Des produits qui rapportent…

Selon l’OMS, « dans la plupart des pays industrialisés dotés de systèmes réglementaires et de contrôle du marché efficaces, l’incidence de la contrefaçon est très faible. C’est le cas de l’Australie, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, des Etats-Unis et de la plus grande partie de l’Union européenne. » Malheureusement, « il n’en est pas de même dans de nombreux pays africains, dans certaines régions d’Asie et d’Amérique latine. Et les circuits ne connaissent pas de frontières. Un produit falsifié peut être fabriqué en Chine, exporté vers la Grande-Bretagne et s’infiltrer via un grossiste dans la chaîne de distribution légale… »

Pour Caroline Atlani, « du fait d’Internet, nous assistons à une amplification géographique du phénomène. Le consommateur peut être n’importe qui ! Il s’agit en fait d’une personne de bonne foi mais ignorante. Parfois elle compare les prix… et se tourne vers des sites où elle croit voir les mêmes produits, mais moins chers. » Une explosion du phénomène qui trouve aussi une explication dans les profits qu’elle génère.

L’Institut de Recherche Anti Contrefaçon de Médicaments (IRACM) estime à « 75 milliards de dollars les profits engendrés par la contrefaçon de médicaments en 2010. Pour 1 000 dollars investis, un criminel peut engranger 20 000 dollars de profit avec le trafic d’héroïne. Ce chiffre monte à 400 000 dollars avec les faux médicaments ! » De quoi attirer les faussaires.

Et en France ?

Rappelons que fin 2012, les services de police et des douanes de 100 pays avaient saisi 3,7 millions de doses de médicaments contrefaits vendus sur Internet ! Plus récemment – mi mai 2013- quelque 1,2 million de sachets d’aspirine de contrefaçon en provenance de Chine ont été saisis par les douanes du Havre. Soit « la plus importante saisie de contrefaçon de médicaments jamais réalisée par les services douaniers en France et dans l’Union Européenne », a annoncé le ministère de l’Economie. Les produits étaient dissimulés dans un chargement de thé.

En France, depuis le 2 janvier 2013, la vente en ligne de médicaments sur Internet par des pharmaciens d’officines est autorisée… sous certaines conditions. Dans quelles « pharmacies » ? Comment s’y retrouver ? Dès demain retrouvez nos conseils pour acheter en toute sécurité le Net ou à l’étranger.

Ecrit par : Vincent Roche – Edité par : David Picot

  • Source : De notre envoyé spécial au Laboratoire central d’Analyse des Contrefaçons, Sanofi, Tours, 14 mai 2013

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