Les hémorroïdes ? Banales peut-être… mais elles doivent vous conduire chez le médecin !

01 juin 2002
En elles-mêmes, ces dilatations veineuses sont physiologiques. Leur présence est normale, les hémorroïdes formant des sortes de coussinets qui tapissent la paroi interne du canal anal avec une fonction précise : assurer la régularisation fine du sphincter et sa bonne fermeture. Normalement donc, les hémorroïdes contrôlent en particulier l’élimination des gaz digestifs. Et cette « usine à gaz » est partagée en deux réseaux hémorroïdaires : externe au niveau de la marge de l’anus, et interne dans le canal anal, situé plus haut. Une simple pesanteur… ou une vive douleur Par suite d’une détérioration anatomique ou de troubles circulatoires, des phénomènes similaires à des varices peuvent se développer au niveau des hémorroïdes. C’est à ce moment qu’apparaissent les signes de ce que l’on appelle la maladie hémorroïdaire. Et c’est aussi à ce moment que le malade « découvre » qu’il – ou elle – « a des hémorroïdes ». C’est très courant, puisqu’un Français sur deux a eu ou aura des hémorroïdes au moins une fois dans sa vie ! Courant, le phénomène est multiforme. Il se traduit par une gène, une pesanteur, des démangeaisons ou une sensation de brûlure, voire une vive douleur au niveau de la région anale. Les selles peuvent contenir du sang – rouge vif – qui va tacher le papier toilette ou éclabousser largement la cuvette… Parfois aussi en s’essuyant, le malade découvre une petite boule dure et douloureuse près de l’anus. Autre point très important : la douleur n’est pas du tout corrélée au volume de la dilatation. Des hémorroïdes volumineuses peuvent rester indolores indéfiniment, alors que de toutes petites dilatations pourront entraîner des douleurs très pénibles. La consultation chez le médecin s’impose La crise hémorroïdaire a beau être fréquente, on en parle peu. Par pudeur, comme s’il s’agissait d’une maladie honteuse. Trop souvent et toujours pour cette raison, le malade s’abrite derrière un prétexte – « les hémorroïdes, ce n’est pas grave ! » - pour ne pas consulter le médecin. Or il est impératif de consulter. Car les symptômes, s’ils traduisent le plus souvent une crise hémorroïdaire, cachent parfois une autre maladie comme une fissure anale, dont le traitement est différent, voire une pathologie autrement grave comme un cancer du colon… Seul le médecin –généraliste, gastro-entérologue ou proctologue - pourra écarter ces possibilités par l’interrogatoire et un examen soigneux, puis vous prescrire un traitement adapté… et remboursé par la sécurité sociale. Des « ronds de cuir » à l’hérédité… Les causes de la maladie hémorroïdaire sont mal connues, mais il y a quelques certitudes bien établies. D’une part, il existe bel et bien des familles prédisposées. Et d’autre part, plusieurs facteurs favorisants sont connus : · Une constipation ou une diarrhée, l’une comme l’autre intense ou prolongée. Il en est de même de certains épisodes pourtant naturels de la vie génitale, tels que la grossesse et l’accouchement, voire les règles ; · L’alimentation exerce aussi une influence : bon nombre de crises hémorroïdaires surviennent chez des amateurs de bonne chère, au lendemain d’un grand repas qui comportait du gibier ou des viandes faisandées, ou bien des mets épicés, le tout arrosé d’un bon vin capiteux éventuellement suivi de thé ou de café et d’alcools forts en « pousse-café ». Rien d’étonnant à cela : tous les facteurs alimentaires favorisant la survenue d’hémorroïdes sont réunis dans ce menu ! · Sans compter les longues heures passées à table, car la position assise prolongée contribue à la survenue d’une crise. C’est en effet justement pour éviter les crises hémorroïdaires que les employés de bureau – assis pendant de longues heures - mettaient sur leur siège des « ronds de cuir » rendus célèbres par Courteline. · Sans être sédentaires, dans le cadre de leur métier certains d’entre nous passent de longues heures en position assise et se trouvent exposés. Les chauffeurs routiers, conducteurs de taxi, coureurs cyclistes, motards et cavaliers sont particulièrement menacés. · Enfin l’abus des laxatifs, des suppositoires ou des lavements peut être en cause. Internes ou externes ? L’hémorroïde externe, qui se présente comme une protubérance près de l’anus, entraîne des démangeaisons et l’émission de sang rouge vif à l’occasion des selles. Il arrive aussi qu’elle soit le siège d’une inflammation. Et si un caillot s’y forme, elle devient dure et très douloureuse. La bonne nouvelle, c’est que l’évolution de ces hémorroïdes externes est bénigne. Les symptômes régressent en quelques jours avec un traitement médical et un bon contrôle de l’hygiène de vie. Les hémorroïdes internes pour leur part, se compliquent plus volontiers que les hémorroïdes externes. Elles aussi peuvent ne se traduire que par des démangeaisons ou des saignements. Mais il arrive qu’elles descendent le long du canal anal et s’extériorisent, formant un « paquet » hémorroïdaire très douloureux au niveau de l’anus. Le phénomène peut être intermittent – par exemple au moment d’aller à la selle - ou permanent. Enfin ces hémorroïdes internes peuvent se trouver emprisonnées par le sphincter. Elles constituent alors un étranglement hémorroïdaire : une urgence chirurgicale à part entière. Un traitement prescrit par le médecin En fonction de la gravité, le traitement sera médical ou chirurgical. Lorsque la crise se résume à une gène, une pesanteur, une tension douloureuse, de petits saignements - ce qui est le plus souvent le cas lors d’une première crise d’hémorroïdes externes - le médecin prescrira des veinoprotecteurs et/ou des antispasmodiques. Par voie orale, sous forme de suppositoires ou de crèmes en applications locales. Ils ont pour but de rétablir la structure des vaisseaux. Contre la douleur une approche antalgique, antispasmodique et anti-inflammatoire est également recommandée, par voie générale ou en applications locales. Les anesthésiques locaux enfin, peuvent s’avérer très efficaces contre la douleur. Tous ces médicaments peuvent être réunis dans une seule et même préparation. Ce qui facilite la prise. Il peut enfin être utile de prescrire des laxatifs doux – c’est-à-dire non irritants pour la muqueuse rectale - ou de l’huile de paraffine pour amollir les selles. Après traitement des hémorroïdes externes par thrombose, il est possible de hâter la guérison par une incision. Elle provoque un soulagement immédiat mais ne met pas à l’abri des récidives. L’excision, qui enlève toute la lésion et ne laisse aucune cicatrice, lui est supérieure. Dans l’un comme l’autre cas, le proctologue ou le gastro-entérologue pratique évidemment sous anesthésie locale… Des règles simples Quel qu’il soit, le traitement doit absolument être complété d’une approche hygiéno-diététique. Le généraliste ne manquera pas de vous les dispenser, naturellement. Contre une éventuelle constipation, il vous recommandera de boire en quantité – au moins 1,5 litres par jour, 2 litres si vous le pouvez… - et d’adopter un régime riche en fibres. Vous pourrez aussi prendre un mucilage, de l’huile de paraffine ou recourir aux vertus lubrifiantes des suppositoires de glycérine. A l’inverse, il pourra aussi traiter une diarrhée. Il vous recommandera d’éviter la sédentarité et les stations assises prolongées, de bouger – vive l’exercice physique et la marche -, d’éviter le vélo, les longs voyages en voiture ou à moto, l’équitation… Et puis… adieu les épices et l’alcool, les viandes faisandées comme le gibier, le café et le thé… Localement, vous veillerez à une stricte hygiène de la région : lavage doux avec des savons neutres ou surgras après chaque selle, suivi d’un séchage soigneux. En cas de démangeaisons, de l’huile d’amande douce sur un coton. Enfin, le médecin vous recommandera peut-être des bains de siège à l’eau froide, deux fois par jour. La maladie hémorroïdaire est donc très fréquente, la plupart du temps sans gravité, très accessible au traitement comme à l’amélioration de l’hygiène de vie. Malgré cela, ne la prenez pas à la légère et ne vous laissez pas aller à l’automédication. Sa prise en charge doit absolument passer par une visite chez le médecin. Spécialiste ou généraliste, à vous de choisir en fonction de votre ressenti. Mais lui seul est capable de déterminer si les symptômes ne sont pas liés en fait à une cause plus grave, et de vous prescrire des médicaments efficaces et qui vous soulageront vraiment. Tout accès de pudeur qui vous retiendrait de consulter le médecin serait…sans fondement !
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