Génériques : « aussi efficaces et sûrs » que les princeps

12 mars 2012

Le récent rapport de l’Académie nationale de Médecine sur les produits génériques, a provoqué une polémique qui ne paraît pas épuisée. Elle a pris de l’ampleur et d’autres prises de position émanant notamment de sociétés savantes, sont attendues. Spécialiste de la pharmacologie clinique et académicien, le Pr Jean-Paul Giroud n’a pas souhaité que son nom figure sur la liste des signataires de ce rapport. Il nous en explique les raisons.

« L’écho du rapport de l’Académie nationale de Médecine a été très important dans les médias. Ces derniers fort logiquement, n’en ont retenu que les aspects négatifs », s’inquiète le Pr Giroud, par ailleurs représentant de l’Académie auprès de l’Agence française de Sécurité sanitaire des Produits de Santé (AFSSaPS). « Malheureusement, cela ne peut qu’accentuer la méfiance du public. C’est d’autant plus regrettable que la part des génériques en France est l’une des plus faibles d’Europe, voire du monde ». Elle est en effet aujourd’hui de 23%, contre 70% aux Etats-Unis, 63% en Allemagne et 60% en Grande-Bretagne.

« De plus dans le rapport, il a été mis l’accent sur le problème de la provenance des génériques. Dire qu’ils sont synthétisés dans des pays comme l’Inde ou la Chine, c’est casser l’image de l’ensemble des médicaments, puisque la majorité des principes actifs (80% d’entre eux en fait) viennent de ces pays ». Autrement dit le problème de la mondialisation des principes actifs concerne l’ensemble des médicaments, et pas seulement les génériques. Faut-il s’en émouvoir ? Et en tout état de cause, « pourquoi s’en prendre exclusivement aux génériques ? »

Le même effet thérapeutique

Pour l’académicien, « la sélection des articles scientifiques du rapport est mal documentée. En outre elle est orientée pour justement démontrer qu’il existerait des risques avec les génériques. Il y a un certain nombre de points sur lesquels je ne suis pas d’accord. Je crois qu’il est important de faire comprendre au public que les génériques ne présentent pas seulement un intérêt sur le plan des économies qu’ils permettent de réaliser. Nous devons expliquer qu’ils ont la même valeur que les médicaments princeps en termes d’efficacité et de tolérance. Et qu’ils subissent les mêmes types de contrôles ».

Le point le plus important pour le Pr Jean-Paul Giroud, concerne la bioéquivalence, et l’équivalence thérapeutique. Dans son rapport, l’Académie explique que « la bioéquivalence entre produit référent et générique ne signifie pas qu’il y a automatiquement une équivalence thérapeutique ». Là encore, notre académicien s’oppose en bloc. « Une méta-analyse de 47 études publiée dans le JAMA prouve exactement le contraire. Or elle n’a pas été retenue dans les références du rapport. Pourtant ce travail fait autorité dans le milieu des scientifiques ». Il s’estime enfin en accord avec la recommandation formulée par l’Académie, de rapprocher le plus possible la présentation du générique de celle du princeps.

En guise de conclusion, Jean-Paul Giroud explique que les auteurs du rapport « auraient également dû s’interroger sur la place des génériques qui ont un service médical rendu insuffisant. C’est-à-dire qui n’ont pas démontré leur efficacité dans des essais cliniques contrôlés. C’est le cas de plus de 2 000 médicaments vendus sans ordonnance ».

Aller plus loin :

– Lire l’intégralité du Rapport de l’Académie nationale de Médecine;
– Prendre connaissance de l’étude du JAMA ;
– Le Pr Jean-Paul Giroud déclare n’avoir aucun conflit d’intérêt avec l’industrie pharmaceutique.

  • Source : JAMA, vol.300 PP. 2515-2526, 3 décembre 2008 ; Rapport de l’Académie nationale de Médecine, Rapport sur la Place des génériques dans la prescription, 14 février 2012 Charles Menkès au nom de la Commission II ; Interview du Pr Jean-Paul Giroud, 2 mars 2012.

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