La greffe fécale, un traitement d’avenir

16 décembre 2013

©Phovoir

Actuellement en France, la prise en charge des infections intestinales liées à Clostridium difficile, repose sur une antibiothérapie. En règle générale, ce traitement permet bien d’éliminer la bactérie mais il laisse la flore intestinale dans un état de délabrement total. Pour diminuer le risque de récidive, une nouvelle approche semble gagner du terrain : la bactériothérapie fécale, autrement appelée la transplantation fécale.

Responsable de diarrhées sévères, l’infection à Clostridium difficile est le plus souvent liée à une antibiothérapie. Celle-ci « va déséquilibrer la flore intestinale et permettre l’émergence de la bactérie qui va entraîner une inflammation au niveau du colon », nous explique le Dr Harry Sokol du Service de Gastroentérologie et Nutrition à l’Hôpital Saint-Antoine.

La prise en charge de ces infections repose sur l’administration… d’antibiotiques ! « Les molécules visent à détruire la bactérie », poursuit le médecin. « Mais elles ne restaurent pas la flore. Si bien qu’à l’arrêt du traitement, nous sommes face à un fort taux de récidives ». Un véritable cercle vicieux.

Tellement efficace que l’étude est interrompue…

L’idée de booster la flore intestinale avec des microbes digestifs n’est pas nouvelle. Les premières expérimentations datent de 1958.  « Depuis, cette technique a été utilisée de façon confidentielle, sur la base d’études certes probantes au niveau de l’efficacité du traitement, mais qui n’avaient pas de véritable force statistique », poursuit le médecin.

Un travail publié en janvier 2013 dans le New England Journal of Medicine a toutefois changé la donne. Les auteurs ont comparé l’efficacité du traitement conventionnel par antibiothérapie (vancomycine) à celle de la transplantation fécale. « Les résultats ont montré une efficacité tellement spectaculaire de la greffe fécale que l’essai a dû être interrompu avant son terme pour des raisons éthiques », explique le Dr Sokol.  « Depuis, l’approche figure dans les recommandations de bonnes pratiques des gastro-entérologues américains et des infectiologues européens ».

Et bientôt la maladie de Crohn ?

La transplantation fécale pour venir à bout des infections à C. difficile récidivantes est donc amenée à se développer. Et cela, d’autant plus lorsqu’elle sera mieux encadrée. Actuellement, trois techniques peuvent être employées  pour amener ces micro-organismes dans le colon : par lavement, par coloscopie ou par sonde naso-duodénale », conclut le Dr Sokol. « Concernant  le donneur, il n’y a pas de restrictions. Cela peut être le conjoint, un membre de la famille ou non. Le tout est qu’il soit sain ». Pour limiter les risques de transmission d’agents infectieux. En revanche, les tests de dépistage à réaliser chez les donneurs ne sont pas encore parfaitement définis.

A l’avenir, la greffe fécale pourrait aussi être utilisée dans la prise en charge d’autres affections, comme la maladie de Crohn. A l’hôpital Saint-Antoine, une étude sur 20 patients est d’ailleurs sur le point de démarrer.

Ecrit par : David Picot – Edité par : Emmanuel Ducreuzet

  • Source : Interview du Dr Harry Sokol, 12 décembre 2013 - N Engl J Med 2013; 368:407-415January 31, 2013DOI: 10.1056/NEJMoa1205037 – Assistance publique Hôpitaux de Marseille, 6 décembre 2013

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