Suspension de Diane®35 : comment combattre l’acné hormonale ?

01 février 2013

Le traitement d’une acné d’origine hormonale nécessite l’avis d’un gynécologue ou d’un endocrinologue. ©Phovoir

La décision de l’Agence française du médicament (ANSM) de suspendre l’autorisation de mise sur le marché (AMM) de Diane®35 et de ses génériques n’est pas sans conséquences. En effet, ces médicaments étaient indiqués contre l’acné d’origine hormonale. Dermatologues et gynécologues émettent des réserves concernant la suspension de ces traitements. Et s’interrogent sur les solutions alternatives…

« Chez certaines femmes, l’acné est due à un dysfonctionnement hormonal », explique le Dr Corinne Jouanique, dermatologue au Centre Sabouraud de l’hôpital Saint-Louis à Paris. Parfois, elles présentent un taux de testostérone trop élevé. Dans d’autres cas, elles sont particulièrement sensibles – même à un taux normal –  à cette hormone masculine. « Quoi qu’il en soit, il n’est pas possible de les traiter convenablement sans hormonothérapie ». Les autres traitements de l’acné, comme l’antibiothérapie ou l’isotrétinoïne, n’exercent pas d’action hormonale.

« Diane®35 et ses génériques sont les médicaments les plus efficaces ayant une AMM dans l’indication d’acné hormonale », insiste Corinne Jouanique. L’acétate de cyprotérone, la molécule active de Diane®35, bloque les effets des hormones masculines sur la peau. « Elle est aussi présente dans un autre médicament appelé Androcur®. Mais les doses y sont bien plus importantes. En outre, l’AMM de ce dernier concerne uniquement l’hirsutisme. Pas l’acné », ajoute-t-elle. Par conséquent, dans trois mois, à ses yeux, la pharmacopée française ne proposera plus de solution efficace et autorisée aux femmes souffrant d’acné d’origine hormonale.

Prescrire hors-AMM ?

L’annonce de la suspension, dans 3 mois de Diane®35 place donc les médecins dans une situation complexe. Prendront-ils le risque de prescrire un traitement hors-AMM contre l’acné ? D’autant qu’« Androcur® aussi induit des risques augmentés de thrombose veineuse », rappelle le Dr Jouanique. « Les gens ont l’air de découvrir que la pilule » (Diane®35 est largement prescrite comme contraceptif oral n.d.l.r.) « induit un risque de thrombose », estime-t-elle. « Mais ce risque est encore plus important pendant la grossesse. Alors, que fait-on ? Va-t-on interdire aux femmes de faire des bébés ? », s’emporte-t-elle.

De son côté, Le Syndicat national des Gynécologues Obstétriciens de France (SYNGOF) en remet une couche : « la disparition de Diane®35 aura pour conséquence d’accroître l’usage des autres traitements contre l’acné ». Or, « il ne s’agit pas d’une substitution facile par des produits inoffensifs. » L’isotrétinoïne, par exemple, est tératogène. Ce qui signifie qu’il peut « entraîner des malformations fœtales. » Le SYNGOF s’interroge sur « les lacunes en matière de solutions thérapeutiques alternatives ».

Le médicament, jamais sans risque

Les médecins rappellent que tout médicament présente des effets indésirables et des risques associés. Et la prescription doit se faire en mesurant les bénéfices et les risques pour la patiente, de façon individuelle. Celle-ci doit, en outre, être parfaitement informée. « Bien sûr, le traitement de l’acné a pour but de régler un problème esthétique », reprend Corinne Jouanique. « Toutefois, les femmes souffrant d’acné hormonale, souvent sévère, peuvent en être lourdement handicapées psychologiquement et socialement ».

Elle souligne enfin qu’« en tant que dermatologue, [elle]  ne prescrit pas ce médicament sans l’avis d’un gynécologue ou d’un endocrinologue si le bilan hormonal est anormal ». Rappelons enfin qu’en France, environ 315 000 femmes prennent Diane®35 ou un de ses génériques. Quelle proportion y recourt dans le cadre d’une prise en charge de l’acné hormonale ? Impossible à dire…

Aller plus loin :

–    Consultez les recommandations de bonne pratique – traitement de l’acné par voie locale et générale de l’ANSM.

Ecrit par : Dominique Salomon – Edité par :David Picot

  • Source : interview du Dr Corinne Jouanique, dermatologue au Centre Sabouraud de l’hôpital Saint-Louis - Paris, 30 janvier 2013– SYNGOF, 31 janvier 2013

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