Le désir sexuel à l’épreuve du (dé)confinement

10 juin 2021

Le confinement a permis à certains amoureux de se retrouver sous la couette. D’autres, en revanche, se sont aperçus d’un manque de désir voire de dysfonction dans le couple. Le regard de Thérèse Gallard, sexothérapeute à Angers.

Pour les couples très actifs sur le plan social, le confinement a été une occasion de se poser, de se retrouver. De recréer un cocon d’échange et d’intimité qui parfois n’existait plus ou pas suffisamment. Pour d’autres couples, ces moments de vies intérieures « ont été vécus comme trop de promiscuité, avec un manque de mètres carrés et d’espace vital disponible », décrit Thérèse Gallard, sexothérapeute à Angers. Comme une sensation d’étouffement qui retentit sur la sexualité. Pas évident en effet de désirer ce qui ne vient jamais à nous manquer.

Privés de défoulement en salles de sport

Dans tous les cas, « le confinement n’a rien créé, il a simplement mis en exergue des dysfonctionnements qui existaient déjà ». Mais quels ont été les éléments déclencheurs précisément ? « La fermeture des lieux de convivialité » a nettement impacté les comportements. « En consultation, beaucoup de personnes décrivaient un manque de liberté et une augmentation de la frustration. »

A ce sujet, la privation du sport en salles ou en club a particulièrement déteint sur l’alchimie des couples. Que devenons-nous sans avoir la possibilité de nous défouler en fin de journée ? « Pour certains patients, surtout des hommes, il était naturel de convertir cette charge énergétique en activité sexuelle. » Pour d’autres patients, ce repos forcé les a mis devant une réalité : « l’absence du désir. »

Un quota de désir épuisé ?

Au-delà de la privation de sport, « du jour au lendemain, les prétextes du stress au travail ou de la fatigue liée au transport pour éviter des rapports sexuels ne tenaient plus. » Beaucoup de couples se sont ainsi demandé « où ils en étaient dans leur désir ».

Sans compter la tendance à s’habiller de façon moins coquette et d’espacer un peu les douches pendant le confinement. « Un frein au désir sans aucun doute », relève Thérèse Gallard. Or le désir s’entretient ! Souvent, des patients en panne de libido « me disent qu’ils sont nés avec un quota de désir et que ce quota est épuisé. Or le désir fluctue toute la vie, il est chahuté, il faut le faire évoluer, en prendre soin. A mon sens, le désir relève même de l’art de vivre ensemble. »

Ils sont minoritaires, mais des hommes et femmes – pour qui les ébats étaient plus fréquents et/ou plus intenses pendant le confinement – souffrent eux du retour à la vie normale. « Un effet rebond » qui nécessite aussi de démêler le nœud du problème. « L’objectif est de voir ce qui a été réparateur pendant le confinement et d’essayer de le réintégrer dans le quotidien. »

Des conseils pour trouver l’équilibre

  • Scinder autant que possible les espaces de travail et de vie privée : le télétravail à 100% n’est plus à l’ordre du jour, « mais pour préserver l’intimité, il est important de bien séparer les affaires du bureau et le cocon du couple» ;
  • Créer des occasions de séparations et de retrouvailles, pour booster « le manque et le désir aussi fort qu’entre deux amants. Quand on n’est pas à deux, on est dans le désir de l’autre ». Sans oublier les rendez-vous et les surprises comme un dîner ou une nuit ailleurs, attendre « l’être aimé sur le quai de la gare», des classiques qui font toujours leur petit effet ;
  • Prendre le temps de moments privilégiés pour le couple, en dehors de la routine quotidienne, autour d’intérêts ou de passions en commun par exemple ;
  • Prendre soin de soi pour prendre soin du couple: « se sentir bien dans son corps dans sa tête contribue au bien-être. L’idée est de garder un équilibre personnel pour pouvoir nourrir l’harmonie du couple », décrit Thérèse Gallard ;
  • Communiquer sur la sexualité « en renégociant régulièrement le contrat de vie ensemble, autour d’un verre. Il s’agit de prendre le temps de parler de ce que le couple peut améliorer, mais aussi de souligner tous les points positifs » ;
  • Ne pas hésiter à consulter un thérapeute. « En moyenne, un couple confronté à des problèmes dans sa sexualité met 3 ans à aller parler à un spécialiste», décrit Thérèse Gallard. Or « plus le suivi est précoce, moins les mauvaises habitudes (réflexes d’évitement, jugement…) s’ancrent et moins les thérapies sont longues. L’idée est de ne jamais laisser traîner un dysfonctionnement. »
  • Source : Interview de Thérèse Gallard, sexothérapeute à Angers

  • Ecrit par : Laura Bourgault – Édité par : Emmanuel Ducreuzet

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