Ecole à 2 ans: bobo aux mots?

25 mars 2004

L’école à deux ans soulève enthousiasme et… controverses. Assurément, elle devra tenir compte des besoins spécifiques du tout-petit, notamment sur le plan de l’apprentissage du langage. Car c’est dès le plus jeune âge qu’il doit acquérir des mots précis!

Pour le linguiste Alain Bentolila, professeur à la Sorbonne, un langage bien structuré donne le pouvoir de contredire le monde par des mots, plutôt que par des coups. Convenez que c’est un moindre mal ! Ainsi la communication se gagne-t-elle ” à la sueur de ses mots “, et non par la violence.

Un Français sur dix ne sait ni lire, ni écrire correctement. Les retards scolaires commencent avant même l’entrée au cours préparatoire. Pire encore, presque tous les élèves qui se trouvent en difficulté scolaire en 6ème le sont encore en 3ème. Pourquoi ce véritable couloir de l’échec scolaire?

Dix pour cent des enfants qui entrent au CP – à 6 ans – connaissent moins de 500 mots. Les autres normalement, en manient environ 1 200. A l’âge de 7 ans, en cours élémentaire, leur lecture tient plus du déchiffrage. Et ils la vivent comme une corvée, tandis que leurs petits camarades lisent avec plaisir des textes simples. Arrivés au collège, ils se découragent. Histoire, géographie, énoncés de problèmes, sciences… toutes les matières butent sur la lecture.

Vers l’âge de deux ans, l’enfant passe de 50 à 300 mots. Il commence à structurer ses premières phrases. Alors l’école à deux ans c’est non, si c’est avec une institutrice qui n’a pas été formée pour les enfants de cet âge! Et encore non, si c’est dans une classe de trente petits! En revanche, oui pour des classes à petits effectifs (10 enfants au plus), avec un apprentissage encadré par des instituteurs bien formés, dans des espaces spécialement conçus pour des enfants de 2 ans et non pas de 4-5 ans.

Donner à l’école les moyens de réduire la fracture culturelle ? Pour Alain Bentolila, ” rien n’est trop cher pour que nos enfants soient capables de construire un monde meilleur que celui qu’on leur laisse “. Ce qui ne doit pas empêcher de hiérarchiser quelque peu les priorités.

  • Source : de nos envoyés spéciaux au Medec, Paris 16-19 mars 2004

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