5 millions d’euros pour lutter contre la précarité menstruelle

16 décembre 2020

C'est un sujet longtemps tabou qui gagne en visibilité : la précarité menstruelle, ou la difficulté d'accès aux protections hygiéniques pour des raisons financières. En France, 2 millions de femmes seraient concernées. Le gouvernement annonce qu'en 2021, 5 millions d'euros seront consacrés à la lutte contre cette précarité.

« 3 800 euros pour une vie ». C’est l’estimation par le journal Le Monde du coût généré par l’achat de protections périodiques – serviettes et/ou tampons – entre le moment où une femme a ses premières règles (13 ans en moyenne) et la ménopause, pendant la cinquantaine. 3 800 euros, c’est beaucoup. C’est même beaucoup trop pour 1,5 à 2 millions de femmes françaises, selon une évaluation du gouvernement.

Début décembre, lors de sa dernière interview télévisée, le président de la République s’en était ému. Hier soir, le ministre de la Santé Olivier Véran et la ministre déléguée à l’Egalité entre les femmes et les hommes, Elisabeth Moreno se sont fendus d’un communiqué commun dans lequel ils annoncent que 4 millions d’euros viendront s’ajouter, à partir de 2021, au million d’euros déjà alloué en 2020 à la lutte contre la précarité menstruelle.

Etablissements scolaires, pénitentiaires…

La première enveloppe a servi à expérimenter plusieurs dispositifs, ciblant prioritairement les collèges et lycées en éducation prioritaire, les établissements pénitentiaires et les associations d’aide aux sans-abris. Pour l’essentiel, il s’agit de mettre à disposition gratuitement des protections périodiques, comme dans une quarantaine d’établissements de l’Académie de Lille.

Il s’agit aussi de soutenir des actions de sensibilisation à l’hygiène intime pour les femmes hébergées ou suivies par l’Armée du Salut et la Croix-Rouge Française. Car la précarité menstruelle expose également à des risques pour la santé. Lorsque les protections ne sont pas renouvelées assez fréquemment, par exemple.

Problème de santé publique

Que pensent les associations de terrain de cette rallonge annoncée ? Tara Heuzé-Sarmini salue « la décision d’augmenter ce budget, qui n’est sans doute pas suffisant mais qui acte le fait qu’il s’agit d’un problème de santé publique ». Mais pour la fondatrice et directrice générale de Règles Élémentaires, première association à avoir fait émerger le sujet en France, il est trop tôt pour dire si le compte y est.

« Nous serons vigilants sur l’utilisation de ces fonds », prévient Tara Heuzé-Sarmini, qui, outre la mise à disposition gratuite de produits d’hygiène intime pour les personnes en situation de précarité (dans les foyers d’hébergements, les hôpitaux…), milite aussi pour le soutien au déploiement de distributeurs de ces produits – non gratuits – dans un maximum de lieux privés et publics.

Non gratuits ? « On ne défend pas la gratuité inconditionnelle pour toutes, explique la fondatrice de Règles Élémentaires, car la gratuité a un coût. Cela voudrait dire qu’on limite le choix des personnes à quelques références, surtout jetables. Nous estimons que les protections d’hygiène intime relèvent d’un choix individuel ».

A noter : En Ecosse, les parlementaires ont voté fin novembre, à l’unanimité, l’accès gratuit aux protections périodiques à « toute personne » en ayant besoin. Les écoles, collèges et universités devront mettre gratuitement à disposition dans leurs toilettes une gamme de produits périodiques. De plus, le gouvernement écossais aura le pouvoir d’obliger d’autres organismes publics à fournir gratuitement ces produits. Budget annuel : l’équivalent de 11 millions d’euros. C’est une première mondiale.

  • Source : Le Monde - Ministère de la Santé - Scottish Parliament - Interview de Tara Heuzé-Sarmini (fondatrice et directrice générale de Règles élémentaires), le 16 décembre 2020

  • Ecrit par : Charlotte David - Edité par : Emmanuel Ducreuzet

Aller à la barre d’outils