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« L’amylose cardiaque est une maladie rare qui affecte généralement des personnes âgées de 65 ans et plus et qui est due à l’accumulation de protéines anormales qui vont former des fibrilles amyloïdes », explique le Pr Thibaud Damy, cardiologue, responsable du centre de référence des amyloses cardiaques à l’hôpital Henri-Mondor (Créteil). « Ces fibrilles vont peu à peu s’infiltrer dans les tissus, notamment dans le cœur. Résultat : le cœur perd sa souplesse et devient de plus en plus dur — presque comme de la pierre —, ce qui finit par empêcher son bon fonctionnement. » Il existe deux formes d’amylose cardiaque : l’amylose à chaînes légères (ou amylose AL) et l’amylose à transthyrétine (ATTR) dont il faut distinguer la forme héréditaire, liée à une mutation génétique, et une forme dite “sauvage”, qui survient le plus souvent après 70 ans. À elles deux, l’amylose AL et l’amylose ATTR représentent la grande majorité des cas.
L’amylose cardiaque est une maladie dite multisystémique, c’est-à-dire qu’elle touche plusieurs organes. Le cœur bien sûr, mais aussi les nerfs, les articulations, les tendons…provoquant des symptômes tels que, par exemple, des douleurs, de l’essoufflement, de la fatigue, des troubles de la marche, une perte d’autonomie. « Tout cela peut s’installer progressivement, mais la maladie peut aussi évoluer rapidement et altérer profondément la qualité de vie », rappelle le Pr Damy.
Le problème, c’est que les premiers symptômes ne concernent pas toujours le cœur. « Dans la forme sauvage de l’amylose ATTR, les fibrilles se déposent d’abord dans les articulations et les tendons, avec à la clef des douleurs, de l’arthrose, un syndrome du canal carpien ou encore une surdité. Ces atteintes peuvent précéder de 5 à 10 ans les signes cardiaques. Dans la forme héréditaire, c’est souvent une atteinte des nerfs qui précède les troubles cardiaques », précise le Pr Damy.
Lorsque l’amylose atteint le cœur, elle entraîne une insuffisance cardiaque et se traduit notamment par un essoufflement, de la fatigue, des palpitations, une prise de poids et des œdèmes. Problème, ces manifestations ne sont pas spécifiques, ce qui peut aboutir à une errance diagnostique. « Malheureusement, le diagnostic est souvent posé lorsque le cœur est déjà très atteint », déplore le Pr Damy. « Si un patient présente ces signes, il doit consulter un professionnel de santé sans tarder. Plus le diagnostic est posé tôt, mieux c’est. Au sein du Réseau Amylose, nous travaillons beaucoup pour sensibiliser tous les soignants concernés à identifier les signaux d’alerte qui sont symptomatiques de l’amylose cardiaque : les cardiologues bien sûr, mais aussi les médecins généralistes, les rhumatologues, orthopédistes, ORL, neurologues, sans oublier les infirmiers et les autres paramédicaux. Cette sensibilisation des professionnels de santé concernés mais aussi la création de centres experts dédiés ont permis de faire de grands pas en matière de diagnostic : aujourd’hui il s’effectue plus tôt, et généralement à des stades moins avancés de la maladie, un facteur déterminant pour optimiser la prise en charge du patient. Mais il reste encore du chemin à parcourir. »
En cas de symptômes ou de suspicion, il est important de prendre contact dès les premiers signes avec un professionnel de santé pour une prise en charge adaptée qui pourra notamment s’appuyer sur une équipe multidisciplinaire, notamment au sein des centres experts du Réseau Amylose et de la filière CARDIOGEN.

Source : Interview du Pr Thibaud Damy, octobre 2025

Ecrit par : Emmanuel Ducreuzet – Edité par : Vincent Roche