Bronzage artificiel : près de 80 morts par an, en France
23 mai 2012
« Une séance dans une cabine de bronzage en France, c’est l’équivalent d’une exposition de même durée au soleil de midi, sur une plage des Caraïbes et sans protection solaire » ! Dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) publié ce mercredi, des médecins nous alertent une fois encore sur les dangers du bronzage artificiel et les effets cancérogènes des ultraviolets (UVA et UVB). Ils partent en guerre aussi, contre les « marchands de soleil ». Avec les mêmes armes qu’eux.
L’échec des campagnes de prévention. Cancérologues, dermatologues, épidémiologistes, spécialistes de la prévention… Ce numéro thématique du BEH est un énième appel à la vigilance. Un cri d’alarme lancé par des médecins et des chercheurs, qui sont loin de rendre les armes face aux professionnels du bronzage en cabine.
« Toutes les campagnes d’information et de prévention semblent vouées à l’échec », déplorent les Prs Jean Civatte et Jacques Bazex, dermatologues et membres de l’Académie nationale de médecine. Dans leur éditorial, ils déplorent « l’insouciance du vacancier qui oublie le port de vêtements protecteurs ou les applications de crème solaire ». Et ils insistent surtout, sur « l’inconscience de la personne qui s’expose aux UV artificiels ».
Marchand de soleil : 3 jours de formation… Les deux médecins soulignent que « l’information sur les dangers réels (des UV artificiels) n’atteint pas son but. A cela, deux explications principales :
– « la promotion commerciale agressive des professionnels du bronzage. Ces derniers n’hésitent pas à contredire les données scientifiques les plus solides sur le danger des UV artificiels » ;
– Une « réglementation peu contraignante qui délègue une part importante du contrôle des risques sanitaires aux personnes qui tirent profit » de ce commerce. Un exemple : « elle autorise la délivrance d’UV par des professionnels du bronzage, à la condition qu’ils aient acquis en trois jours suffisamment de notions médicales, qu’ils sachent reconnaître les peaux à risques et repérer les usagers de moins de 18 ans (carte d’identité non obligatoire)! »
En finir avec les idées reçues. Dans la même livraison du BEH, des cancérologues reviennent également sur les idées reçues qui motivent le recours au bronzage en cabine UV. Leur objectif, c’est de les démonter une à une :
– Non, les séances d’UV artificiels ne préparent pas la peau au soleil. « C’est une idée fausse », explique Julie Gaillot de Saintignon (Institut national du Cancer) ;
– Non, le bronzage n’est pas forcément synonyme de bonne santé et de réussite sociale. Bien au contraire à long terme, il « accélère l’apparition de signes de vieillissement cutané », poursuit-elle.
– Non, cette pratique « ne peut pas être utilisée comme source de vitamine D » ;
– Non, « les UV n’exercent pas d’effet protecteur sur l’incidence de certains cancers non cutanés (sein ou côlon) ».
Vers une interdiction des cabines de bronzage? « Le corps médical ne peut que tirer la sonnette d’alarme en rappelant qu’il n’y a aucun bénéfice pour la santé à s’exposer aux UV artificiels. En revanche, les dangers sont bien réels », résument les Prs Jean Civatte et Jacques Bazex. Ces derniers même, plaident en faveur d’une « politique d’interdiction progressive telle que l’ont décidé le Brésil et l’Etat de Nouvelle Galles du Sud en Australie ».
Rappelons que chaque année en France, 10 000 nouveaux cas de mélanome sont déclarés. Et environ 1 600 décès surviennent. L’impact sanitaire de l’exposition aux UV artificiels commence à être estimé avec quelque précision. Au cours des 30 prochaines années, « entre 566 et 2 288 décès sont attendus si les expositions des Français aux cabines UV ne changent pas ». Soit entre 18 et 77 morts par an !
Pour aller plus loin, télécharger ce numéro thématique du BEH intitulé : Le bronzage artificiel : une menace bien réelle mais évitable.