IVG : « J’étais très en colère contre moi-même »
02 juin 2012
C’est à l’âge de 17 ans que Sophie G. a connu son premier rapport sexuel. Epanouie, toujours rigoureuse pour se protéger, elle décide six mois plus tard, de prendre la pilule contraceptive. Il aura suffi qu’elle l’oublie une fois, une seule, pour tomber enceinte. S’en sont suivies des périodes de doute, de réflexion, de honte pour parvenir à la décision de recourir à une interruption volontaire de grossesse (IVG). Témoignage.
Chaque année en France, plus de 200 000 IVG sont pratiquées. Et plus de 15 000 mineures y ont recours. C’est dire si le cas de Sophie n’est pas isolé. Les raisons qui expliquent ce chiffre si élevé sont multiples. Selon le Dr Françoise Aspeele, responsable du centre d’IVG du CHU d’Angers «
les femmes qui subissent une IVG ne sont pas forcément sans contraception. Certaines peuvent oublier de prendre leur pilule. Dans certains cas, la grossesse est désirée, mais un des deux géniteurs la refuse. Cela peut également être dû au manque d’information. Certains jeunes pensent que le premier rapport n’est jamais fécondant. C’est encore une idée malheureusement, qui circule ».
Pour Sophie, il était impensable de poursuivre sa grossesse. Elle a dû d’abord, en parler avec son ami de l’époque. «
Ce n’était pas simple. Il était bien plus âgé que moi (26 ans) et souhaitait, lui garder cet enfant. Heureusement, il a su m’écouter ». Prise à deux, la décision s’en trouve en effet plus aisée. «
Mon copain a été génial et il a toujours été là, et m’a accompagné partout ».
Il n’empêche que Sophie se sentait très mal. «
J’étais très en colère contre moi-même. Je culpabilisais, j’avais honte et n’osais pas en parler à mes proches. Mais franchement je ne pensais pas que le simple fait d’oublier de prendre ma pilule une seule fois me mettrait en danger. » Ce témoignage illustre bien le manque d’information en matière de contraception comme d’éducation sexuelle. Dans son rapport remis le 16 février dernier à Jeannette Bougrab, alors secrétaire d’Etat à la Jeunesse et à la Vie associative, le Pr Israël Nisand appelait à la mise en œuvre d’une véritable éducation sexuelle à l’école, délivrée par des professionnels de santé.
Agée de 19 ans, Sophie n’a pas oublié cette étape de sa vie. Elle se souvient également du travail remarquable et de l’écoute des médecins du Centre d’Interruption volontaire de grossesse de Nantes. «
La consultation avec la psychologue m’a permis de déculpabiliser, de reprendre confiance en moi. » Aujourd’hui, elle ne perd pas une occasion de raconter son expérience à ses amies. Les informer tout simplement, pour qu’elles ne refassent pas la même erreur qu’elle...
Quel parcours de soins?
Responsable du Centre d’IVG du CHU d’Angers, le Dr Françoise Aspeele, nous explique quelles sont les
différentes étapes de la prise en charge.
«
Notre mission consiste en premier lieu, à réaliser des IVG », explique-t-elle. «
Mais pas seulement. Nous avons en parallèle, une activité de consultation, axée sur la contraception dans le cadre du centre de planification et d’éducation familiale (du CHU). » Ces structures ont été créées en 1975 pour permettre en particulier, l’accès à la contraception des mineures sans autorisation parentale. Et cela, gratuitement. «
Le volet prévention de notre activité est également très important. Ainsi avons-nous des collaborateurs qui se déplacent sur le terrain, en milieu scolaire. »
Concrètement, une femme qui a décidé de recourir à une IVG prend contact avec le centre. «
Dans un premier temps, elle sera reçue pour une consultation pré-IVG. Celle-ci sera assurée par un médecin généraliste. Il lui expliquera les différentes techniques d’IVG, l’interrogera sur ses antécédents médicaux et fixera la date de l’intervention ». Par ailleurs, le centre dispose de conseillères conjugales et de psychologues, disponibles pour écouter et échanger. Une fois l’IVG réalisée, il est nécessaire d’attendre deux semaines pour une visite de contrôle.
Enfin rappelons qu’il existe deux techniques différentes. La première repose sur l’administration d’un médicament. «
Elle ne peut être pratiquée que durant les six premières semaines de gestation. Au-delà, nous sommes obligés de recourir à la méthode dite d’aspiration », précise le Dr Aspeele. «
Elle peut se réaliser sous anesthésie locale ou générale. C’est à la femme de choisir le type d’anesthésie qu’elle désire ».