Le SIDA continue d’avancer à grands pas !

01 décembre 2000
Depuis le début de la pandémie en effet, le VIH a tué 19 millions de personnes dans le monde et en a infecté plus de 50 millions. Selon les estimations du programme commun des Nations unies sur le VIH/SIDA, (ONUSIDA), 33 millions d'adultes et 1 million trois cents mille enfants vivent avec le VIH en l’an 2000. Les progrès dans la lutte contre la maladie sont réels. Les nouveaux traitements ont vraiment bouleversé le pronostic vital. Ils deviennent aussi plus accessibles, y compris dans les pays les moins favorisés. Mais il reste encore beaucoup à faire et nous ne devons absolument pas baisser notre garde. Dans aucun domaine. En 1999, cinq millions quatre cents mille personnes ont été infectées par le virus. Avec un total de deux millions huit cent mille décès cette année-là, la mortalité a été la plus forte jamais enregistrée depuis le début de la pandémie. Le SIDA tue plus de 7 500 personnes par jour ! Dans certains pays africains, 30 % de la population adulte est infectée. Plus de 24 millions d’africains - sur une population de 600 millions - vivent avec le VIH. C’est clair, ce continent paie le plus lourd tribut à la pandémie ! L'ONUSIDA estime le nombre de personnes contaminées à 1,3 millions en Amérique latine et 6,7 millions en Asie du Sud et du Sud-Est. Les experts sont inquiets. La propagation de l'épidémie en Chine et en Inde, où plus de 4 millions de personnes ont déjà été infectées, s'accélère. En Europe centrale et dans l'ancienne Union soviétique où le nombre de malades est estimé à 420 000, la transmission du virus est également rapide. Du fait, notamment, de la consommation accrue de drogues injectables et de la prostitution. Plus de 70% des infections à VIH dans le monde se produisent à l’occasion de rapports hétérosexuels ; 10% seulement sont encore attribués à une transmission homosexuelle masculine. En outre, plus de 5 % des infections résultent du partage d’aiguilles et de seringues, notamment lors de l’injection de drogues intraveineuses. En 1988, les statistiques faisaient état d’une infection féminine pour sept chez des hommes. Le rapport s’est désormais considérablement rapproché de l’équilibre : aujourd’hui, le VIH atteint 1 femme pour 3 hommes ! Voilà pourquoi le SIDA représente une menace toujours aussi pressante. Et pas seulement dans les pays les plus déshérités. En Europe occidentale, 520 000 personnes vivent avec le VIH. Et 6 800 sont mortes du SIDA l’an dernier, dont 2 000 en France. Le SIDA, on en meurt encore. Derrière ce slogan presque « évident », la France a mené cet été une campagne d’affichage et dans les médias télévisés. Car le problème est loin d’être réglé. Le nombre de personnes vivant avec le VIH est estimé à 130 000 et le nombre annuel des nouvelles contaminations se situerait entre 4 000 et 6 000, si bien que la population des séropositifs s'accroît. « La progression du VIH n’a été enrayée dans aucun pays » C’est tout de même surprenant, puisque nous entendons dire de toutes parts que le SIDA, précisément, on n’en meurt plus. Eh bien c’est faux ! D’ailleurs le Secrétaire Général de l’ONU, Kofi Anan, s’insurge contre cette forme de désinformation: « Certains voudraient nous faire croire que, grâce à la découverte de médicaments permettant de mieux lutter contre la maladie, le gros de la crise est passé. Les faits nous prouvent le contraire. On ne peut toujours pas guérir le SIDA et la progression du VIH n’a été enrayée dans aucun pays ». Aujourd’hui, les antirétroviraux à haute efficacité, et notamment les antiprotéases utilisées dans le cadre des trithérapies permettent de retarder l’apparition de la maladie et de prolonger la vie de milliers de séropositifs. Ces nouveaux médicaments donnent aussi aux femmes séropositives de meilleures chance de mettre au monde un bébé indemne de l’infection. Aussi enthousiasmants que soient ces progrès, les médicaments en question sont extrêmement onéreux et trop souvent inaccessibles aux populations des pays en développement. Des traitements à un prix abordable Le 11 mai dernier, les différentes agences qui parrainent l’ONUSIDA et les industriels producteurs de médicaments antirétroviraux ont rendu public un nouveau partenariat. Ce dernier concerne essentiellement les pays en développement. L’objectif est de diffuser plus largement les traitements, à un prix enfin abordable. Ces négociations sont un bon moyen de peser sur les prix. Mais elles ne résoudront pas, à elles seules, le problème. Car même avec des prix considérablement réduits, nombre de difficultés persisteront. Est-ce vraiment la solution ? Le Docteur Badara Samb, responsable de l’accessibilité aux médicaments à l’ONUSIDA rappelle que « si le gouvernement du Zimbabwe voulait traiter l’ensemble des séropositifs du territoire en utilisant une trithérapie au prix américain, il aurait à dépenser 265% de son PNB, contre 0,06 pour un pays comme la Suisse. En Ouganda, en Côte d’Ivoire, au Chili et au Vietnam, nous avons implanté un programme d’accès aux médicaments et mis en place des critères de sélection, des centres habilités à prescrire ces médicaments. Les critères sont les suivants : des médecins formés à la prescription et au suivi des malades et des infrastructures adaptées. » Depuis la signature de cette convention le 11 mai dernier, les choses ont déjà évolué. « Aujourd’hui nous sommes deux ans et demi après la grande inquiétude que se faisait l’ensemble de la communauté internationale, quant à avoir ces médicaments, présents dans les pays en développement. Tout le monde avait peur des résistances. Aujourd’hui ce n’est plus le cas. Grâce notamment aux actions de l’ONUSIDA, nous avons montré qu’il est possible d’avoir ces médicaments disponibles et de les administrer correctement. Les compagnies pharmaceutiques ont accepté de pratiquer des prix différentiels, en fonction des capacités économiques des pays en développement. » Dans le même esprit, la France avait participé en 1997 à la création du Fonds de Solidarité thérapeutique internationale, le FSTI. Celui-ci a permis à quatre pays – le Maroc, la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Vietnam – d’accéder à ces traitements. Le dispositif va prochainement s’étendre aux républiques d’Haïti et de Centrafrique. Le 10 janvier dernier, la France avait également proposé au Conseil de Sécurité des Nations Unies d’organiser une conférence internationale centrée sur l’accès des pays les plus touchés aux traitements contre le SIDA, prenant aussi en compte les conditions de prises en charge des malades. Mais, ce n’est pas tout ! Les Ministres de la Santé des 191 Etats-membres de l’OMS, réunis à Genève en Assemblée mondiale au mois de mai dernier, ont entériné une résolution qui définit les 4 grands axes de la lutte à mener. Ils se sont engagés : · A intensifier les efforts d’éducation du public ; · A favoriser le dépistage volontaire et confidentiel ; · A promouvoir l’accès aux médicaments dans des conditions économiques acceptables ; · Et enfin à garantir la sécurité transfusionnelle. La mortalité s’est effondrée mais la maladie continue d’avancer! L’OMS a également décidé de concentrer ses efforts sur trois grands aspects de l’épidémie : d’abord les soins, dont l’accès et le caractère compassionnel doivent encore être améliorés. Mais aussi la lutte contre la transmission mère-enfant et enfin, l’accès aux médicaments pour tous. En attendant, la maladie continue d’avancer à grands pas ! L’introduction en 1996 de nouveaux traitements a bouleversé le pronostic de l’infection. Ces fameuses trithérapies, basées sur des associations d’antiviraux comportant des antiprotéases, ont fait renaître l’espoir. Chez le séropositif il est dorénavant possible d’empêcher le passage au stade clinique du SIDA, à condition de bien suivre le traitement. Le SIDA lui-même n’est plus perçu comme une sentence de mort. Toujours grâce à ces traitements, la mortalité en France s’est littéralement effondrée. En 1996, année qui a suivi l’introduction des antiprotéases, elle a diminué de 9%. Puis de 34% en 1997 et encore de 33% en 1998. Ainsi, le nombre annuel de décès est passé de 17 355 en 1996 à 2 000 en 1999. Même en Europe, les contaminations ont toujours lieu ! Si le nombre de malades atteints du SIDA au stade clinique diminue, ce n’est pas en raison d’une baisse du nombre des personnes infectées. Mais parce que les médicaments permettent de retarder ou même de stopper l’évolution de l’infection. Cependant cette dernière existe toujours. Et bien entendu, les contaminations ont toujours lieu ! Il serait donc coupable de relâcher notre vigilance et nos efforts de prévention. C’est pourquoi l’OMS a demandé en 1999, que la déclaration de l’infection devienne obligatoire dès que la séropositivité est constatée, sans attendre le passage au stade clinique de la maladie. Cette pratique permettrait enfin de connaître le nombre de personnes infectées et donc de mesurer l’évolution réelle de la pandémie. Elle éviterait que l’efficacité des nouveaux traitements nous porte à croire que le danger diminue, alors qu’il progresse… Au sein de l’Union européenne, une procédure unique de déclaration doit être mise en place d’ici la fin de cette année. Ce changement devenait indispensable. La diminution du nombre de formes cliniques graves, celle de la mortalité peuvent en effet dissimuler l’augmentation des contaminations et favoriser le développement souterrain de l’épidémie. Pour sa part, la France a devancé l’appel. Dès juillet 1999 l’Institut de Veille Sanitaire (InVS) a lancé un système expérimental de déclaration. Il sera étendu à l’ensemble du territoire à la date prévue pour la mise en place de la procédure européenne et la déclaration reste anonyme.
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