Ebola : les chauves-souris, probables réservoirs du virus
23 janvier 2019
©IRD – Alain TENDERO – PostEbogui 2018 Prélèvements biologiques et mesures sur une chauve-souris Epomophorus franqueti capturée à l’aide d’un filet aux environs du village de Konkouré, à 300 km de Conakry (Guinée)
Certains animaux sauvages favoriseraient-ils la propagation du virus Ebola ? Si oui, de quelle manière ? C’est à ces questions que des chercheurs de l’institut de Recherche et Développement (IRD) ont souhaité répondre en menant un travail d’analyse auprès de 8 000 spécimens. Chauves-souris et primates sont en effet soupçonnés d’être réservoirs et/ou vecteurs de la maladie.
« Depuis la première épidémie à virus Ebola, en République démocratique du Congo (RDC), en 1976, l’Afrique a connu 28 épisodes de la maladie », rappelle l’IRD. Très récemment, entre mai 2017 et juillet 2018, la RDC a même connu trois émergences. Afin de disposer de données confirmées en matière de transmission du virus, des chercheurs ont étudié le rôle de certaines espèces d’animaux sauvages soupçonnées d’en être le vecteur.
Les chauves-souris en particulier sont suspectées depuis 2005 d’être des réservoirs potentiels du virus. En d’autres termes, elles « hébergeraient le virus sans être malades, et pourraient le transmettre aux êtres humains ou à d’autres animaux », précisent les auteurs. Les primates – parmi lesquels des grands singes – développent eux la maladie. Et ils peuvent aussi la transmettre.
Près de 8 000 animaux testés
Entre 2015 et 2017, Martine Peeters et Ahidjo Ayouba, virologues à l’IRD, ont prélevé le sang de 4 022 chauves-souris, réparties en 21 sites, à travers trois pays, Cameroun, Guinée et RDC. Puis ils ont testé ces échantillons avec différents antigènes de plusieurs espèces du virus Ebola. « S’il y avait réactivité, cela indiquait la présence d’anticorps, et donc que l’animal avait été en contact avec le virus ou un virus de la même famille », analysent les chercheurs.
La même technique a été appliquée à 4 649 primates non humains appartenant à 36 espèces, dont 2 327 échantillons de grands singes (gorilles, chimpanzés et bonobos) provenant du Cameroun, de RDC ou de Côte d’Ivoire.
Huit espèces de chauves-souris concernées
Résultats, « huit espèces de chauve-souris ont révélé la présence d’anticorps réactifs », indiquent les scientifiques. « Certaines, largement répandues sur le continent ont même montré des preuves de contacts avec deux espèces du virus Ebola, Zaïre et Soudan », précisent les chercheurs. Ces éléments confortent l’idée que le rôle des chauves-souris est bien celui de réservoir du virus.
En revanche, ils n’ont trouvé de signe de contact que chez un seul singe, de la famille des Cercopithèques. « Et aucun anticorps réactif chez les grands singes », souligne Martine Peeters. « Cela conforte l’hypothèse que ces derniers sont seulement des hôtes intermédiaires du virus, et non les réservoirs. »