HPST : en route pour le Sénat
18 mars 2009
Après un mois de débats intenses et passionnés, l’Assemblée nationale adopte en première lecture, par 292 voix contre 199, le projet de loi Hôpital, Patients, Santé, Territoires (HPST).
Le texte est désormais en route vers le Sénat. Il ne devrait pas y être examiné avant le mois de mai. Que reste-t-il aujourd’hui, de ce projet de loi conçu notamment pour lutter contre les déserts médicaux, améliorer la permanence des soins, désengorger l’hôpital… ?
Réorganiser l’hôpital. Le cœur du projet, celui sur lequel s’est concentré l’essentiel des débats, est bien évidemment la réforme de l’hôpital. « Nous ne fermerons pas d’hôpitaux » a promis Roselyne Bachelot-Narquin. La ministre de la Santé évoque en revanche, des « conversions de services » et des « transferts de compétences » au sein de « communautés hospitalières de territoires ». Car insiste la ministre, « chaque établissement ne peut pas tout faire ».
Des directeurs new-look vont également arriver à la tête des établissements publics. Leur mission : rétablir l’équilibre budgétaire mais aussi, se projeter vers l’avenir et programmer les investissements futurs. A l’image en quelque sorte, de ce qu’il se passe au sein de toute entreprise privée ou publique. Les établissements devront également mettre à disposition du public « les résultats des indicateurs de qualité et de sécurité des soins ». Ainsi devrait émerger progressivement, une véritable culture du résultat.
Une politique de santé locale, pilotée par les Agences régionales de Santé (ARS). Exit les DRASS, DDASS, URCAM, Groupements régionaux de Santé publique (GRSP), Missions régionales de Santé (MRS) et autres CRAM… Les ARS feront office de guichet unique. Leur rôle : décliner les objectifs du projet de loi au niveau régional : faciliter l’accès aux soins en luttant contre les déserts médicaux, décloisonner les soins de ville et ceux qui sont dispensés à l’hôpital…
Qu’on ne s’y trompe pas, il s’agit d’un vaste chantier. Toutes les (bonnes) volontés devront être mobilisées, les initiatives locales trouvant à s’exprimer. D’ailleurs, la Fédération nationale des Etablissements d’Hospitalisation à Domicile (FNEHAD) ne s’y est pas trompée. Elle se félicite aujourd’hui, « de l’avancée que constitue ce texte pour l’organisation des soins (…) et se réjouit qu’ait été pleinement reconnue la place de l’hospitalisation à domicile dans le nouveau paysage sanitaire et hospitalier ». Une attitude qui n’est guère surprenante, l’hospitalisation à domicile (HAD) étant trop souvent regardée par la technostructure hospitalière comme un bouche-trou (au mieux) voire un concurrent…
L’objectif était également on s’en souvient, d’améliorer la permanence des soins et de répondre à, un certain nombre de situations de carence. Tours de garde, services des urgences, formation, recherche et accueil des personnes en situation de précarité… « Ces missions seront désormais mieux identifiées et feront l’objet d’un encadrement renforcé », avait promis Roselyne Bachelot-Narquin. Si le pari paraît en voie d’être gagné, ce n’est pas toujours sans douleurs ou grincements de dents…
Des médecins bientôt mieux répartis ? Comment assurer à tous des soins de qualité tout en respectant le principe de la liberté d’installation des libéraux ? Mieux répartir les médecins, voilà une des missions des ARS. Pour cela, elles élaboreront des « schémas régionaux de soins ».
De nombreuses mesures donc, visent également à assurer la continuité des soins. Et cela « quelles que soient les circonstances ». C’est ainsi que les médecins libéraux devront transmettre leurs dates de congés à l’Ordre départemental. La mesure irrite. « Les médecins libéraux, dont le temps de travail dépasse largement le temps de travail moyen des Français, n’accepteront pas de se voir imposer leur temps de repos par une structure fonctionnarisée dont les salariés fonctionnent aux 35 heures » affirment les représentants de l’Union nationale des Omnipraticiens français (UNOF). Ambiance…
Des soins pour tous. Les députés se sont montrés favorables à la mise en place d’un testing, grâce auquel il deviendra possible de confondre tout professionnel de santé qui refuserait ses soins à tel ou tel patient, « en raison de ses mœurs, de sa situation de famille (ou) de son handicap… ». Ou pour une raison liée au fait qu’il soit titulaire de la Couverture Maladie universelle (CMU). Dans les faits, les plaintes seront étudiées par une commission de conciliation instaurée à l’échelon départemental.
A noter également, que les « assurés ou ayant-droits » âgés de 16 à 25 ans pourront bénéficier chaque année d’une consultation à visée préventive, réalisée auprès d’un médecin généraliste. A cette occasion, ils seront dispensés de toute avance de frais.
Alcool, tabagisme, les jeunes ciblés. Le texte gouvernemental enfin, interdit la vente d’alcool et de tabac aux moins de 18 ans. Il sonne également la fin des fameux open-bars. En revanche, les dégustations « dans le cadre de fêtes et de foires traditionnelles déclarées » et autres « stages œnologiques » sont toujours autorisés. Il aura fallu pour cela néanmoins, une intense mobilisation du lobby viticole. Par ailleurs, la vente d’alcool dans les stations-services n’est pas totalement interdite. Elle est maintenue entre 8h00 et 18h00. C’est donc un resserrement sensible du créneau – entre 6h00 et 22h00 – actuellement autorisé.
La ministre a toutefois dû céder sur un autre point : la publicité en faveur de l’alcool sur Internet. Les députés l’ont autorisée, sauf sur des « sites destinés à la jeunesse ». Encore faudra-t-il trouver la définition d’un « site destiné à la jeunesse »…
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Source : ministère de la Santé, février-mars 2009 ; Fédération française d’Addictologie, 19 février 2009 ; UNOF, 5 mars 2009 ; Académie nationale de Médecine, 9 mars 2009 ; Assemblée nationale, 18 mars 2009 ; FNEHAD, 18 mars 2009