











Accueil » Santé Publique » L’OMS sous influence… privée
La Fondation Bill and Melinda Gates en est l’exemple le plus frappant. Elle finance aujourd’hui des programmes représentant 10% du budget total de l’OMS (soit 220 millions de dollars américains en 2010). Et le généreux milliardaire est aujourd’hui le deuxième contributeur de l’OMS derrière… les Etats-Unis ! « De nombreux observateurs, et des représentants des Etats-membres se disent très préoccupés par ce processus de privatisation », explique German Velasquez. Cet ancien directeur du secrétariat de l’OMS pour la santé publique, déplore la situation actuelle. Aujourd’hui conseiller principal pour la santé et le développement de l’ONG The South Centre, il émet des doutes quant au niveau d’indépendance de l’OMS.
« Il y a cinq ans, il y avait une norme à l’OMS qui stipulait que les contributions volontaires provenant des secteurs public et privé ne pouvaient dépasser 49% du budget total. Or aujourd’hui, ces contributions volontaires sont de l’ordre de 82% ». Ces chiffres parlent d’eux-mêmes, et traduisent une évolution contraire aux fondamentaux de l’Organisation. « Les contributions régulières des Etats-membres s’élèvent seulement à 18% du budget total. En clair cela signifie que les pays qui gouvernent l’OMS y ont perdu le pouvoir. Or l’Organisation par définition, est une organisation publique intergouvernementale. Elle a un caractère multilatéral, et doit être financée par les Etats. Cela pose un vrai problème d’indépendance. »
Ce que confirme Patrick Durisch, à nos confrères du quotidien genevois Le Temps. Responsable du programme santé auprès de l’ONG la Déclaration de Berne, il souligne que « les contributions volontaires sont liées à des programmes spécifiques. Il est dès lors très difficile pour l’OMS de fixer des priorités à long terme ». Mais aussi de se laver des accusations de collusion avec le secteur privé. La pandémie de grippe A (H1N1) avait suscité de nombreuses questions quant au choix de certains experts chargés de conseiller la Directrice générale de l’Organisation. Leur liste était tenue secrète et il s’est avéré après enquête, que certains étaient issus de l’industrie pharmaceutique.
Pour German Velasquez, il existe pourtant une solution. « Elle est très simple mais se révèle très compliquée à appliquer, car les pays développés y sont fermement opposés. Il s’agit d’augmenter les contributions régulières des Etats-membres ». Un vœu pieux ? En tout cas, ce serait du jamais vu depuis… des décennies.
Source : Le Temps, 18 mai 2011 – Interview de German Velasquez, 23 mai 2011
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