Les narcoleptiques sont-ils plus créatifs ?
12 août 2019
Antonio Guillem/shutterstock.com
Les narcoleptiques seraient dotés d’une créativité plus développée que la moyenne. Réalisée par une équipe Inserm, c’est une découverte plutôt réjouissante pour ces malades dont le quotidien est difficile à vivre.
La narcolepsie est un trouble du sommeil qui touche environ 0,02% de la population. Les patients s’endorment brutalement dans n’importe quel contexte. Autre particularité, ces endormissements débutent souvent par la phase de sommeil paradoxal. Un phénomène qui ne peut se produire chez les non-malades. En effet, il faut dormir au moins une heure avant d’accéder à ce sommeil particulier.
« En rencontrant régulièrement des patients narcoleptiques au sein de mon service, j’ai remarqué qu’ils semblaient plus souvent évoluer dans des activités créatives que la moyenne ; pas uniquement dans leur vie professionnelle mais aussi dans leurs loisirs ou leur façon de penser », explique le Pr Isabelle Arnulf, cheffe du service des pathologies du Sommeil à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière-AP-HP. C’est ainsi que l’étude sur la créativité des patients narcoleptiques a été lancée.
Tester les capacités créatives
Conduite par Célia Lacaux, chercheuse à Sorbonne Université, et Delphine Oudiette chercheuse à l’Inserm*, cette étude a permis de tester** les capacités créatives de 185 personnes narcoleptiques et de 126 individus contrôles.
Pour ce faire, les scientifiques ont utilisé plusieurs méthodes. Parmi elles, une mesure « subjective » basée sur des questionnaires. Et une mesure « objective » de la performance créative grâce à un test appelé EPoC (Evaluation du Potentiel Créatif). Son but, « évaluer les deux grandes dimensions de la créativité : la pensée divergente qui demande, à partir d’un stimulus, de générer le plus de réponses possibles ; et la pensée convergente, qui requiert d’intégrer plusieurs objets dans une seule et même production, cohérente et originale ». Concrètement ils avaient à leur disposition une feuille blanche et un crayon pour répondre aux consignes des chercheurs.
Résultat, « les individus narcoleptiques ont globalement obtenu des scores plus élevés que les sujets contrôles, aussi bien aux mesures objectives que subjectives », observent les auteurs. Comment l’expliquer ? « Cette créativité accrue pourrait s’expliquer par l’accès privilégié au sommeil paradoxal et aux rêves qui donne l’occasion ‘d’incuber’ leurs idées lors de siestes brèves pendant la journée », suggèrent les auteurs. Ce constat est en tout cas une « note positive » apportée à cette « maladie difficile à vivre », estime Célia Lacaux. Laquelle suggère de « vraiment encourager les personnes narcoleptiques à exploiter leur potentiel ».
* au sein du service des pathologies du sommeil de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière AP-HP, dirigé par le Pr Isabelle Arnulf à l’ICM
**en collaboration avec une équipe de l’université de Bologne en Italie