Antiépileptiques: des grossesses sous haute surveillance
08 août 2006
Une étude internationale de 4 antiépileptiques met en cause le valproate. Commercialisé en France sous le nom de Dépakine et de 16 génériques, il représenterait “le risque le plus élevé pour le foetus“. Et cela “dans plus de 20% des grossesses“.
Dans la dernière livraison de Neurology le Dr Kimford Meador, de l’Université de Gainesville en Floride, souligne la gravité de ces résultats. Car assure-t-il, “bien des médecins et des femmes enceintes ignorent ces risques“.
Cette conclusion s’est imposée après étude des cas de 333 mères -toutes traitées pour épilepsie- et de leurs enfants. Des grossesses menées aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, incluses dans l’étude internationale EURAP, qui évalue les risques des anti-épileptiques pour les futures mères et leurs enfants. Elle suit aujourd’hui plus de 8 500 femmes enceintes dans 39 pays. “Des 4 produits testés, le valproate a représenté le risque le plus élevé pour le foetus” souligne Meador. “Plus de 20% des grossesses se sont conclues par la mort foetale ou des malformations du crâne, des membres et du cerveau, ou encore des troubles cardiaques et pulmonaires. Le risque s’est avéré inférieur avec la phénytoïne, la carbamazépine et la lamotrigine.”
Pour l’Agence française de Sécurité sanitaire des Produits de Santé (AFSSaPS), ce travail “confirme des données connues, spécialement concernant le valproate. Des discussions importantes sont en cours aux niveaux national et européen, et le Résumé des caractéristiques du Produit (RCP) (du valproate, n.d.l.r.) a été modifié en 2006“. Une modification en toute discrétion, sans même une lettre aux prescripteurs. Le RCP modifié figure certes, dans le dictionnaire Vidal en ligne. Elle “doit être relayée par la visite médicale“. Mais combien de médecins se connectent tous les jours sur cette base de données ? Et combien auront la curiosité de consulter ce texte, dont la modification ne figure pas dans les 16 “actualités” signalées concernant ce produit ?
Bientôt des mesures en France et en Europe ?
Comme le souligne aussi l’AFSSaPS, le différentiel de risque défavorable au valproate n’est manifeste qu’en matière de malformations. Pas de mort foetale. L’agence reconnaît néanmoins qu’il serait nécessaire de consentir “un effort important de communication sur l’ensemble des risques liés à la maladie et (à ses) traitements, pour en informer les prescripteurs et les jeunes femmes“. Il paraît probable que des mesures dans ce sens soient prochainement annoncées, en France et en Europe.
Les auteurs pour leur part, soulignent que le valproate “continuera d’être une option thérapeutique importante“. Ils appellent cependant les médecins à discuter la sécurité thérapeutique avec leurs patientes en âge de procréer. Et ils conseillent “de ne plus utiliser le valproate comme traitement de première intention” chez ces patientes. En attendant, toutes les Américaines traitées par antiépileptique et qui sont enceintes sont appelées à se faire incoporer au Registre nord-américain des grossesses pour un suivi personnalisé. Quant à celles qui vivent hors des Etats-Unis, “elles peuvent demander à leur médecin de les faire enrôler dans le Registre EURAP“.