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Entre 2012 et 2021, les Centres antipoison ont recensé 23 906 intoxications liées à des plantes.
Les plantes ornementales de parcs et jardins (arums ornementaux, laurier rose, narcisse, cotoneaster) représentaient 40 % des cas d’intoxication, devant les plantes sauvages (arums sauvages, euphorbes, berces, sureaux ; 31 %), les plantes alimentaires (plants de poivrons et piments, courges, figuiers ; 13 %) et les plantes d’intérieur (alocasia, ficus, spathiphyllum ; 12 %).
Près de la moitié des personnes intoxiquées étaient des enfants de moins de six ans, le plus souvent après ingestion de la plante. Les formes graves restaient rares : 2,5 % des cas présentaient des symptômes prononcés ou prolongés, et 0,1 % ont même engagé le pronostic vital, dont un décès.
Toutes catégories confondues, les arums étaient responsables de 22 % des intoxications recensées, ce qui en fait les plantes les plus souvent impliquées. Suivent les euphorbes, les plants de poivrons et piments, le laurier rose, les narcisses et les jonquilles.
Deux espèces d’arums (Arum italicum et Arum maculatum) sont particulièrement répandues dans la flore sauvage. L’exposition typique concerne un jeune enfant attiré par les baies colorées, orange à rouge, qu’il porte à la bouche. L’adulte, lui, confond plutôt les feuilles de la plante avec celles de plantes comestibles comme l’oseille, l’épinard ou la blette sauvage.
La toxicité des arums provient de cristaux microscopiques d’oxalates de calcium, en forme d’aiguille, invisibles à l’œil nu et présents dans toutes les parties de la plante. Lorsqu’elle est mâchée ou endommagée, ces cristaux sont libérés et pénètrent la peau ou les muqueuses. Ils provoquent une gêne et une irritation locale, parfois douloureuse, plus rarement un œdème oropharyngé ou une atteinte de la cornée en cas de projection oculaire. Toutefois, les intoxications sont en grande majorité bénignes.
Deuxième cause d’intoxication après les arums, les euphorbes sont impliquées dans des formes plus sévères : 4,2 % des cas présentent une gravité moyenne à forte. Très répandues dans la flore sauvage française, certaines espèces sont aussi vendues pour l’ornement des jardins. Elles sécrètent un latex corrosif qui, au contact de la peau, provoque rapidement rougeurs, douleurs, démangeaisons, parfois cloques. En cas de projection oculaire, l’irritation initiale peut évoluer vers une conjonctivite ou une lésion de la cornée, avec douleurs intenses et baisse de la vision.
Certaines intoxications végétales peuvent engager le pronostic vital ou même entraîner la mort. Parmi les 42 cas classés comme graves dans l’étude, le datura et le colchique étaient les plus souvent en cause (15 % chacun), suivis de la digitale (12 %), du vérâtre blanc (9 %), de l’aconit (5 %) et de l’œnanthe safranée (5 %).
Dans presque tous les cas graves, les personnes avaient ingéré de grandes quantités de plantes.
Elles avaient souvent confondu la plante toxique avec une plante alimentaire : le datura confondu avec la tétragone cornue, le colchique avec l’ail des ours, la digitale avec la consoude, le vérâtre blanc avec la gentiane ou le ginseng, l’œnanthe safranée avec la carotte sauvage, la belladone avec des raisins sauvages, ou l’aconit avec du « couscouil ».
Dans d’autres situations, le caractère toxique de la plante était méconnu (taro, pin, bois-joli, réglisse, change-écorce, anis étoilé, amande amère), voire la personne l’avait ingérée à des fins thérapeutiques ou d’amaigrissement (vérâtre blanc, Tinospora crispa, muscade, bancoulier, genêt).
Les données récoltées par les Centres antipoison ont montré que les coloquintes (courges ornementales), devaient être ajoutées à l’arrêté du 4 septembre 2020.
Une recherche bibliographique a identifié cinq autres plantes commercialisées en France susceptibles de provoquer des intoxications graves : pavot somnifère, scille maritime, jéquirity, jusquiame noire et corroyère à feuilles de myrte.
S’y ajoutent trois espèces végétales identifiées dans un autre avis de l’Anses relatif aux plantes ornementales toxiques à La Réunion et à Mayotte : baobab nain, pignon d’Inde et agave d’Amérique.
En cas de troubles sévères ou de signes de détresse vitale (difficultés respiratoires, perte de conscience…), contactez immédiatement le 15 ou le 112 (le 114 pour les personnes malentendantes).
Dans tous les autres cas, même sans symptôme, appelez un Centre antipoison au 01 45 42 59 59 (disponible 24h/24, 7j/7) en cas d’ingestion d’une plante suspecte ou reconnue toxique.
Quatre conseils à suivre pour limiter le risque d’intoxication : ne pas consommer une plante en cas de doute sur son identification, qu’elle provienne de la nature ou du potager ; photographier la cueillette pour faciliter l’identification en cas d’intoxication ; cesser immédiatement de consommer la plante si son goût paraît inhabituel ou désagréable ; ne pas cueillir de grandes brassées pour éviter de mélanger plusieurs espèces et risquer d’ingérer des plantes toxiques avec des comestibles.
Source : Anses. (2025). Expositions et intoxications accidentelles par des plantes : étude des cas enregistrés par les Centres antipoison de 2012 à 2021. Rapport d’étude de toxicovigilance. Saisine n° 2022-SA-0042. Anses. Maisons-Alfort. 184 p ; Vigil’Anses #26 • Juillet 2025
Ecrit par : Hélène Joubert ; Édité par Emmanuel Ducreuzet