Attentats du 13 novembre : un an après, les difficultés du deuil
10 novembre 2016
Frederic Legrand – COMEO/shutterstock.com
Tout juste un an après. Ce dimanche se dérouleront les commémorations des attentats qui ont fait 129 morts et 354 blessés à Paris le 13 novembre 2015. Malgré les mois écoulés, le travail de deuil est difficile pour les proches de victimes disparues. Les circonstances tragiques du décès ont un impact terrible sur ce processus qui suit la perte d’un être cher. Les explications de Catherine Héry, psychologue au CHU de Nantes.
Le deuil se déroule en trois grandes étapes : le choc de l’annonce, la phase de dépression et enfin, dans le meilleur des cas, l’acceptation.
Dans les circonstances particulièrement tragiques des attentats du 13 novembre, la première phase est survenue de manière particulièrement brutale. « L’annonce s’est manifestée comme une effraction pour les proches qui ont été débordés par la détresse », explique Catherine Héry. « Le psychisme a du mal à s’adapter à ce qui se passe et on ne trouve plus protection en soi et en dehors de soi. » Le choc est « surdimensionné » en raison des circonstances particulières de la disparition et de l’insécurité liée à la possibilité d’autres agressions.
Résultat, « la première phase du deuil est beaucoup plus fixée car les proches n’arrivent pas à trouver des éléments pour s’exprimer », poursuit-elle. Cette première phase peut durer plusieurs mois durant lesquels « la pensée est pétrifiée ».
La dépression, plus longue et plus profonde
« En général, suite à un décès, les proches parviennent à passer à la deuxième phase du deuil à l’occasion des obsèques », explique Catherine Héry. Ils peuvent alors parler des événements. « Ils réussissent enfin à évoquer quelque chose d’eux-mêmes et de l’autre, disparu. » C’est alors que se manifestent la tristesse, les pleurs, mais aussi parfois « l’envie de mourir avec l’autres ».
Dans le cas de décès aussi violents que ceux liés aux attentats terroristes de Paris, « la dépression réactionnelle normale peut devenir majeure et pathologique », indique la psychologue. Le risque d’un blocage du deuil, allant parfois jusqu’à la paranoïa, dépend de la fragilité psychique ou psychiatrique des individus. D’où l’importance de l’accompagnement psychologique.
Un an après, il est probable que les personnes endeuillées n’aient pas encore réussi à atteindre la dernière phase, celle de l’acceptation. « Ces commémorations représenteront l’opportunité pour elles de reparler, d’échanger et d’entendre un soutien », souligne Catherine Héry. Car « depuis un an, elles ont vécu sous ce choc, cette brutalité, cette incompréhension ». Et pour elles, « c’est comme si c’était hier ».
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Source : Interview de Catherine Héry, psychologue au CHU de Nantes, 8 novembre 2016
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Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Emmanuel Ducreuzet