Cancer du sein : éviter le surdiagnostic
23 novembre 2011
Faut-il remettre en cause le dépistage systématique des cancers du sein au motif qu’il y aurait, chez 5 femmes pour 10 000, un surdiagnostic entraînant des examens lourds… voire un traitement inutile ? Eh bien non, sont convenus les participants aux 33èmes journées de la Société française de Sénologie et de Pathologie mammaire à Marseille.
« Le surdiagnostic correspond à la détection à la suite d’un dépistage, d’un cancer qui ne se serait jamais manifesté cliniquement pendant la vie de la patiente », résume le Dr Brigitte Séradour, radiologue et co-organisatrice de ces journées. A mesure que les techniques s’affinent, qu’il devient possible de détecter des tumeurs de plus en plus petites, ce risque de surdiagnostic prend de l’ampleur. Comment le gérer ?
« Il n’est pas du tout question de remettre en cause le programme de dépistage organisé du cancer du sein pour autant », souligne-t-elle. « Mais il faut oser dire qu’il existe des inconvénients, et tout faire pour y trouver des solutions ».
Les progrès en matière d’imagerie médicale, mais également la mise en place du dépistage organisé, permettent de détecter très précocement de toutes petites tumeurs, dites non-invasives. C’est a priori une bonne chose. En effet, plus un cancer est pris en charge tôt, plus les chances de guérison sont importantes. D’où une baisse de la mortalité liée au cancer du sein, en partie imputable à ce programme de dépistage. Toutefois, cette logique ne s’applique pas toujours.
« Sur 10 000 femmes dépistées, 50 en bénéficieront directement car cela leur permettra d’être traitées contre leur maladie ; 25 auraient été diagnostiquées sans le recours au dépistage, 7 en mourront malgré tout, 13 survivront plus de 15 ans et enfin 5 n’auraient jamais déclaré de cancer si elles n’avaient participé au dépistage organisé », détaille Jacques Fracheboud. Radiologue à l’Université Erasme de Rotterdam (Pays-Bas), il était l’un des coorganisateurs de ce congrès. Or explique-t-il, ces 5 patientes « surdiagnostiquées » vont subir des examens lourds et peut-être même un traitement… pour rien. C’est ce que les experts appellent un surtraitement.
Cette démonstration n’est toutefois qu’un exemple. En réalité, la mesure précise de ce phénomène en France comme dans d’autres pays, n’existe pas. Les diverses études lancées pour estimer le taux réel de surdiagnostics ont donné des résultats très hétérogènes, allant de 1% à… 39% ! « S’il faut rester prudent, nous estimons plutôt ce chiffre entre 5% et 10% », risque Brigitte Séradour. « Il est nécessaire de mener des études pour être capable de repérer de façon certaine quelle lésion tumorale de petite taille va évoluer en cancer. Pour savoir quelle patiente traiter, et quelle autre laisser tranquille », conclut-elle. Bref, pendant les travaux le dépistage continue… et c’est tant mieux.