Cholestérol : un médicament pointé du doigt

30 juin 2004

Alors que l’AFSSaPS vient de modifier ses conditions d’administration en raison “d’une augmentation de la fréquence de cas d’atteintes musculaires graves” la rosuvastatine (Crestor) est de nouveau attaquée sur le terrain de sa sécurité d’emploi.

Dans la dernière livraison du Lancet le responsable de l’association américaine de consommateurs Public Citizen réclame son retrait pur et simple du marché. L’affaire n’est pas neuve. Depuis le mois de mars cette organisation, fondée par l’avocat Ralph Nader, diffuse auprès de la FDA une pétition dans ce sens.

Elle motive sa demande par les accidents liés au produit. Selon Public Citizen, 2 cas d’insuffisance rénale et 7 de rhabdomyolyse ont été observés dès juillet 2003 aux Etats-Unis. Ces points sont d’ailleurs développés dans une déposition de son responsable Sydney Wolfe devant la FDA. Le fabricant de la rosuvastatine, la compagnie anglo-suédoise AstraZeneca, s’étonne de l’acharnement de l’association américaine. Un acharnement lié de toute évidence au prochain lancement du produit sur le marché libre outre-Atlantique, mais dont il est embarrassant pour elle, qu’il soit relayé par une revue de référence comme The Lancet.

Ces effets indésirables sont relativisés par le producteur. Selon le Dr Asri Benkritly, Directeur Thérapeutique Cardiologie et Métabolisme chez AstraZeneca France, “ils sont liés au mécanisme d’action même de ce type de médicaments“. Dans une livraison récente toutefois La Revue Prescrire relayait l’information selon laquelle ce médicament “est la seule statine qui a entraîné des rhabdomyolyses potentiellement mortelles dans des essais cliniques avant la commercialisation.” Pour faire bonne mesure, soulignons comme nous l’a indiqué le Pr Alain Castaigne (CHU Henri Mondor de Créteil) que c’est aussi la seule qui en France, ait fait l’objet d’une évaluation à doses toxiques. Evaluation déposée avec le dossier d’autorisation de mise sur le marché (AMM). Une transparence qui honore le fabricant.

L’AFSSaPS n’a pas encore mis en ligne le dossier “Vous et votre traitement” annoncé pour les patients. Il est toutefois possible d’accéder aux résumés modifiés de ses deux formes, 10 mg et 20 mg. Pour conclure, il est probable que cet épisode ne sera pas sans suites. Cardiologue, le Pr Castaigne estime qu’il aura “pour conséquence très probable une réévaluation des fortes doses de statines (…) qu’il ne faudrait (sans doute) pas utiliser sauf entre les mains de prescripteurs très particuliers“. Des prescripteurs experts traitant les troubles du cholestérol les plus lourds. Une refonte sans doute nécessaire en effet, alors que vont prochainement être disponibles les premières statines génériques…

  • Source : The Lancet, 24 juin 2004, La Revue Prescrire, tome 24 n°249, avril 2004, pp. 245-9, AFSSaPS, 10 juin 2004, Public Citizen, mars et juin 2004, La Tribune, 28 juin 2004

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