











A coup sûr la 8ème Conférence internationale sur le SIDA et les Infections sexuellement transmissibles (ICASA), qui vient de se tenir à Dakar, est un succès… de communication. Le président sénégalais Abdoulaye Wade son hôte officiel, semble d’ailleurs en avoir conçu quelque irritation.
C’était il est vrai, la seconde conférence du genre à se tenir au Sénégal en 15 ans. « Il faut plus de concentration et d’actions pratiques, surtout plus de prévention », relevaient nos confrères du « Quotidien » à Dakar, au lendemain de l’intervention présidentielle. Il est vrai par ailleurs que le président Wade a souligné, un brin provocateur, que « même si les antirétroviraux sont gratuits, il faut aujourd’hui parler de l’essentiel ».
« L’essentiel » donc, aurait apparemment changé de caractère. Il est vrai comme le souligne l’ONUSIDA, que l’accès aux traitements a beaucoup progressé en quelques années. Trois millions de séropositifs sont aujourd’hui traités dans les pays à faibles revenus et en Namibie, la proportion des séropositifs traités est passée de 1% à… 88% en seulement 6 ans. Mais le médicament à lui seul, ne peut pas tout obtenir…
…et Roselyne Bachelot appelle « à combattre le manque d’information, la honte et la peur…»
Pour les personnes infectées et particulièrement en Afrique, le combat le plus difficile aujourd’hui pourrait être celui pour une vie décente. Plus encore que dans les sociétés les plus riches, le statut des minorités sexuelles laisse à désirer. Leur reconnaissance, leur information et leur prise en charge sont très inégales. La stigmatisation sociale est terrible, le statut des séropositifs et des malades pénalisé au sens juridique du terme. « Au départ conçue pour (les) protéger, une loi adoptée en septembre 2004 (au Tchad, d’où son nom de loi-type de N’Djamena, n.d.l.r.), a inauguré une série de lois pénales en Afrique occidentale et centrale criminalisant les personnes séropositives », soulignent les responsables de l’association Sidaction.
Cette loi en effet, élargit considérablement le concept de transmission intentionnelle. « Ainsi au Bénin, l’exposition au VIH est à elle seule criminalisée, même en l’absence de transmission ; au Burkina Faso, la transmission du VIH par une personne qui connaît son statut est qualifiée de tentative d’homicide ; dans certains pays, la transmission de la mère à l’enfant pourrait même donner lieu à des poursuites pénales…. » Cette évolution est si préoccupante que l’ONUSIDA et la Fédération internationale des associations de Planning familial (IPPF) ont élaboré de concert un « Index de stigmatisation et de discrimination envers les personnes vivant avec le VIH »… Celui-ci est en cours de développement, mais un site accessible en anglais expose bien l’ampleur du problème.
Or a souligné la ministre française en charge de la Santé, Roselyne Bachelot-Narquin, « la stigmatisation et la discrimination sont de fausses réponses qui créent de vrais problèmes. » Dans ce contexte, elle appelle « à combattre en même temps le manque d’information, la honte et la peur… », qui sont autant de freins à l’action. Elle a demandé aussi, la mise en œuvre « de nouvelles stratégies et de nouveaux outils tels que les tests de dépistage rapide, (car) méconnaître sa séropositivité, c’est courir le risque d’un diagnostic tardif rendant plus difficile le traitement. Et c’est exposer parfois ses partenaires sexuels à la maladie. » Sur ce point d’ailleurs, les problématiques se rejoignent, qu’il s’agisse des pays du Nord et du Sud. Ce qui a fait dire à la ministre que « le combat contre le VIH n’est pas une question de nationalité, de couleur de peau ou d’origine géographique. Ce combat est celui de l’humanité toute entière. »
« Plus de concentration et de prévention » comme le demandait Abdoulaye Wade ? La conférence de Dakar une fois de plus, a permis de situer la pleine dimension du problème. Elle a aussi été – nous y reviendrons – l’occasion de rappeler où doivent porter les actions prioritaires, et aussi les engagements des uns et des autres. Pour que le VIH, là-bas en Afrique, ne soit pas oublié des gens du Nord…
Source : de notre envoyée spéciale à la 8ème Conférence internationale sur le SIDA et les Infections sexuellement transmissibles (ICASA), Dakar, 3-7 décembre 2008