Courrier du coeur : bonnes et moins bonnes nouvelles de Chicago

17 novembre 2010

Cette année encore, la réunion scientifique de l’American Heart Association à Chicago, aura fourni une large moisson de nouveautés.

Sessions plénières, ateliers de travail ou poster sessions – en fait des galeries où les auteurs résument leur travail sur une « affiche » offerte à la consultation et à la discussion – se seront enchaînés pendant 4 jours. Elle a vu émerger quelques travaux spectaculaires et d’autres – beaucoup d’autres – qui n’ont pas toujours eu les honneurs d’une très large visibilité. Ce qui ne signifie pas qu’ils soient d’importance mineure… En effet, les échanges des professionnels sur ces travaux, seront bien souvent à l’origine de changements dans les techniques opératoires ou les choix thérapeutiques. Ils auront des implications très pratiques, et parfois déterminantes, pour le quotidien des malades. Nous en avons retenu ici quelques exemples. Ils sont bien évidemment, très loin d’être exhaustifs.

Du bon…
Une pompe cardiaque expérimentale d’un nouveau modèle, mis au point par l’équipe du Dr Keith D. Aaronson (université du Michigan, Ann Arbor) donnera demain de meilleures chances aux insuffisants cardiaques en attente de greffe. Surtout, ils attendront celle-ci dans de meilleures conditions. En raison de leur volume, les pompes actuelles sont placées dans la cavité abdominale, à l’intérieur d’une « poche » aménagée chirurgicalement.

Le nouveau modèle – HeartWare® HVAD – est installé pour partie dans le ventricule gauche du cœur malade, le reste étant positionné dans le péricarde. Utilisé sur 140 malades, le nouveau matériel a donné des résultats comparables à ceux des dispositifs conventionnels. Une survie de 92% pendant les 6 mois d’attente avant de disposer d’un greffon, au lieu de 90% dans le groupe contrôle constitué de 499 patients comparables sélectionnés au niveau national. Et 91% des patients qui ont reçu cette nouvelle pompe étaient toujours en vie 360 jours l’implantation, au lieu de 86% dans l’autre groupe. Les suites opératoires – hémorragiques ou infectieuses – ont aussi été moins lourdes avec le nouveau matériel, ce qui laisse espérer un meilleur contrôle du coût total. Ce nouveau matériel d’origine américaine, n’est pas encore homologué dans son pays mais bénéficie déjà d’une homologation CE. Une fois n’est pas coutume. Il pourrait être admis au remboursement en France, dans le courant 2011.

– Dans le cadre d’une coordination internationale, une recherche menée par l’équipe du Dr Faiez Zannad (INSERM , CIC 9501 et U 961 – CHU de Nancy) a testé avec succès un nouveau traitement de l’insuffisance cardiaque peu symptomatique. Son nom prête à interprétation, mais elle affecte 500 000 patients en France et justifierait 1,5 million de journées d’hospitalisation ! En utilisant un inhibiteur du récepteur de l’aldostérone – une hormone sécrétée par les reins et qui régule les échanges d’eau et de sel dans l’organisme – les auteurs ont réduit de 37% le risque de mortalité cardio-vasculaire, de décès ou d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque. Ce médicament, l’eplerenone, a été évalué dans le cadre d’une étude internationale de phase III. Cette étude –EMPHASIS-HF- a été publiée dans le New England Journal of medicine le jour même de sa présentation à Chicago. Elle a concerné 2 737 patients de 272 centres, dans 29 pays. Signalons que l’utilisation de ce médicament dans cette indication n’est pas autorisée actuellement en France. Mais ce n’est peut-être que provisoire…

… et du moins bon ;
– Longtemps considérée comme un marqueur du risque cardio-vasculaire, la Protéine C-réactive (PCR) finalement, ne serait pas à la hauteur de sa réputation… Un travail anglo-irlandais présenté par le Dr Peter S Sever (Imperial College de Londres), a analysé 4 853 participants à la comparaison d’une statine – l’atorvastatine – et d’un placebo dans le cadre de l’étude ASCOT. Ces derniers ont été suivis 5,5 ans. Il en est ressorti que la mesure du taux de PCR, en plus des facteurs de risque cardio-vasculaire reconnus comme le LDL-cholestérol ou hypertension artérielle, ne constituait pas une valeur ajoutée.

D’autres auteurs ont recommandé le dépistage systématique de la PCR, sans tenir compte des autres facteurs de risque. Sever et ses collaborateurs estiment que ce serait « une démarche très, très onéreuse et très probablement vouée à l’inefficacité. Par ailleurs, l’étude ASCOT « ne suggère pas que la mesure de la CPR ait une valeur prédictive de risque vasculaire (ni que) la diminution de CPR induite par les statines réduise elle-même, le nombre de troubles cardio-vasculaires ».

  • Source : de notre envoyé spécial aux Sessions scientifiques 2010 de l’American Heart Association (AHA) Chicago, 14-17 novembre 2010 – Etude EMPHASIS-HF : New England Journal of Medicine 2010 ( DOI : 10.1056/NEJMoa1009492) – interview du Dr Keith D. Aaronson, 16 novembre 2010

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