Crise sanitaire : hommes et femmes ont-ils vécu le travail de la même façon ?
20 janvier 2023
En France, les femmes conciliant travail et vie de famille pendant les confinements ont vu leur santé mentale se dégrader, ont montré plusieurs études. Des chercheurs américains se sont eux intéressés aux conséquences de ces conditions exceptionnelles en Chine et en Corée du Sud, des sociétés où le partage des tâches n’a rien d’évident.
Les sociétés chinoises et sud-coréennes ont la réputation d’être restées traditionnelles et patriarcales, avec des rôles bien définis pour les hommes et les femmes. Dans ces pays néanmoins, les couples à double revenu ne sont pas rares. C’est à ces couples, avec ou sans enfant, que des chercheurs de l’Université de l’Ohio se sont intéressés pendant des périodes où, pandémie oblige, le travail a pris une forme hybride, entre travail à la maison et au bureau.
Leur travail, publié dans la revue Personnel Psychology, s’appuie sur deux études observationnelles, l’une menée en Chine, l’autre en Corée du Sud. Dans la première, 172 couples avec au moins un enfant ont été interrogés au tout début de la pandémie ; dans la seconde, une soixantaine de couples avec ou sans enfant a été interrogé entre juin et août 2021.
Culpabilité féminine
Dans les deux cas, le dispositif d’enquête était le même : chaque membre du couple devait remplir deux questionnaires chaque jour, pendant 14 jours de travail. Il y reportait son lieu de travail (à la maison ou à l’extérieur), la quantité de tâches professionnelles et domestiques effectuées, mais également ses sentiments à leur égard, comme la culpabilité ou le désengagement, ou si la situation engendrait des conflits dans le couple.
Résultats : « le travail à domicile (par rapport au bureau) augmente l’accomplissement des tâches domestiques des employés, tant pour les hommes que pour les femmes », indique l’étude. Les chercheurs ont également noté que la flexibilité des horaires de l’un permettait à l’autre de mener à bien davantage de tâches professionnelles, mais que le sentiment de culpabilité se retrouvait majoritairement chez les femmes lorsque celles-ci avaient privilégié leurs tâches professionnelles au ménage, à la cuisine et aux moments passés en famille.
« Attentes réalistes »
Pour la professeure de management et autrice principale de l’étude Jasmine Hu, ces résultats suggèrent que qu’« il existe encore des différences entre les sexes dans la façon dont ils gèrent leur travail et leurs responsabilités familiales ».
Parmi les leviers qui pourraient faire évoluer la situation, en Chine, en Corée du Sud et partout ailleurs, la spécialiste évoque des « attentes réalistes » des managers « quant à la quantité de travail que leurs employés travaillant à distance peuvent effectivement gérer ». Mais également davantage de flexibilité dans l’organisation de travail des employés masculins, afin qu’ils contribuent davantage aux tâches domestiques lorsque leur épouse travaille à distance.