Cryothérapie corps entier : déception et risques
19 septembre 2019
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La cryothérapie corps entier n’a pas fait la preuve de son efficacité. Cette médecine non conventionnelle qui consiste à soumettre le corps à une température allant de -110°C à -170°C expose en outre à de graves effets indésirables. Le point avec le Pr Bruno Falissard de l’Inserm, auteur d’un rapport sur le sujet.
Exposer pendant environ 3 minutes le corps à une température allant de -110°C à -170°C. . Le concept de cryothérapie corps entier est très en vogue depuis le début des années 2000. Initialement proposée pour traiter les douleurs d’origine rhumatismale, l’offre s’est rapidement étendue aux patients douloureux post-traumatiques dont les sportifs blessés. Or « aucune recommandation émanant de sociétés savantes n’a statué sur les indications », précise un rapport Inserm publié récemment.
D’où vient ce concept ? « Spontanément tout le monde a déjà expérimenté que le froid calme douleur et inflammation », souligne Bruno Falissard. De plus, « il existe une explication rationnelle biologique derrière tout ça. » Rien d’étonnant à ce que les êtres humains depuis l’Antiquité utilisent le froid contre la douleur. Rien de surprenant non plus à la création de cette pratique moderne. « C’était même une bonne idée au départ », admet le chercheur.
Une efficacité décevante. Le travail de revue de la littérature scientifique réalisé par les auteurs du rapport révèle que cette pratique n’a pas fait la preuve de son efficacité. « Même si les études manquent à ce sujet, ce qui est sûr c’est que si ça marchait vraiment très bien on le verrait », souligne le Pr Falissard.
Des effets indésirables. En outre cette pratique n’est pas sans risque. « Des effets secondaires bien réels ont été rapportés par plusieurs études de cas », souligne le rapport de l’Inserm. Ainsi, « des brulures locales au 1er ou 2ème degré, des céphalées ou des accentuations des douleurs présentes, un urticaire chronique au froid, une panniculite à froid, des intolérances digestives et plusieurs cas d’ictus amnésique ». Sans compter « un cas de dissection de l’aorte abdominale, extrêmement grave », ajoute le Pr Falissard.
Les dérives d’une pratique non encadrée. Autre problème soulevé par le rapport, les dérives concernant les indications de cette pratique. « Des collègues co-auteurs de ce rapport se sont fait passer pour des patients souffrant d’un cancer auprès de sociétés proposant de la cryothérapie corps entier », raconte Bruno Falissard. « Il se sont entendu dire qu’ils pouvaient pratiquer cette cryothérapie et que celle-ci aurait d’ailleurs un effet bénéfique puisqu’elle empêcherait la tumeur de croitre. » Or bien entendu, « la cryothérapie ne peut, en aucune façon, revendiquer de traiter efficacement des cancers ou d’autres pathologies somatiques sévères », rappelle le rapport.
Ces situations sont rendues possibles par l’absence d’encadrement de la dispensation de ces soins. « C’est quand même fou ! Quand on pense que pour louer un transpalette, on doit suivre une formation d’un jour à raison de 300 à 400 euros. Mais pour la cryothérapie, aucune formation n’est obligatoire », se scandalise le Pr Falissard.
A ne pas écarter dans tous les cas ? Pour autant, cette pratique devrait-elle être interdite ? « On ne peut pas l’écarter dans certains cas », nuance Bruno Falissard. « Nous avons eu notamment des témoignages de patientes souffrant de sclérose en plaques à qui ces séances faisaient beaucoup de bien. » Dans tous les cas, « il faudrait étudier davantage cette pratique et surtout, l’encadrer », conclut-il.
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Source : interview du Pr Bruno Falissard, UMR 1178 Santé mentale et Santé publique, Paris, 17 septembre 2019
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Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Emmanuel Ducreuzet