Cytomégalovirus : vers un dépistage systématique contre ce virus dangereux pour les fœtus ?
04 juillet 2023
Dans les colonnes du Parisien, le patron de la maternité de l’Hôpital Necker Enfants-Malades réclame un dépistage systématique du cytomégalovirus, CMV, qui peut être à l’origine de séquelles neurologies ou encore auditives chez les nouveau-nés.
Le Pr. Yves Ville, chef du service d’obstétrique, d’imagerie et de médecine fœtale, à l’Hôpital Necker Enfants-Malades a alerté le lundi 3 juillet, dans les colonnes du Parisien sur le cytomégalovirus (CMV). Le médecin plaide pour une systématisation du dépistage de « ce virus que l’on ne veut pas voir ».
« Je milite pour une simple prise de sang le plus tôt possible, quasiment au moment de la découverte de la grossesse. Si la femme n’est pas immunisée, on insiste sur la prévention, on la conseille vraiment, sérieusement. Et on refait le test à la fin du premier trimestre », réclame l’obstétricien.
Toutefois, le Haut conseil de la santé publique recommande « ne pas dépister l’infection à CMV, ni chez la femme enceinte ni chez le nouveau-né ». Une position partagée par le Collège national de gynécologues et obstétriciens français. En cause, notamment, « l’absence d’évaluation des effets positifs ou négatifs d’un tel dépistage (…), les possibles difficultés d’interprétation des sérologies (…) et le possible effet délétère d’une sérologie positive sur la prévention par les mesures d’hygiène ».
Pour Yves Villes, ces positions ont été prises en référence « aux données anciennes mais les connaissances ont évolué. Aujourd’hui, on sait qui est à risque, on sait dépister, on sait pronostiquer in utero la gravité de l’infection, et on sait traiter précocement ».
Le cytomégalovirus (CMV), c’est quoi ?
Le cytomégalovirus est une maladie très fréquente due à un herpes virus. « Les analyses de sang montrent que 60 à 90 % des adultes ont été infectés par le CMV à un moment ou à un autre », précise le manuel MSD. Les collectivités qui accueillent des jeunes enfants, comme les crèches, sont de gros réservoirs de ce virus. Chez les femmes qui ne sont pas immunisées, « la future mère s’infecte généralement au contact de son aîné », explique le Pr Yves Ville.
Il est toutefois dangereux chez les femmes enceintes qui ne sont pas immunisées. Selon Ameli.fr, 40 % des femmes ne sont pas immunisées contre le CMV en début de grossesse. Si une femme enceinte est infectée, le risque de transmission au fœtus est alors de 30 % à 40 %.
Le risque de séquelles est alors élevé pour le fœtus, en cas d’infection de la mère lors du 1er trimestre. « Avec une prévalence comprise entre 0,3 et 1 %, l’infection à cytomégalovirus (CMV) est la cause la plus fréquente d’infection congénitale », note Marianne Leruez-Ville (Hôpital Necker Enfants-Malade, APHP, Laboratoire de Virologie, Centre National de Référence des herpès virus) citée par l’Académie de médecine. Lors d’une infection au 1er trimestre, plus d’un fœtus sur deux présenteront des séquelles, dont plus de 30 % de séquelles neurologiques.
A la naissance, les principaux symptômes, cités par Ameli.fr, sont :
- essentiellement, des séquelles auditives avec un surdité
- des anomalies oculaires (choriorétinite) ;
- un retard de croissance intra-utérin ;
- des séquelles neurologiques (retard psychomoteur, épilepsie…)
Le CMV peut aussi conduire à une fausse couche, un décès in utero ou à la naissance.
Dépistage et prévention
Actuellement, le dépistage n’est proposé qu’en cas d’anomalies chez le fœtus visibles à l’échographie comme un retard de croissance, une taille de la tête insuffisante, des anomalies du cerveau) ou, chez la mère, en cas d’apparition d’un syndrome grippal avec fièvre, fatigue et maux de tête, survenant sans cause évidente. En cas d’atteintes sévères du virus, une interruption thérapeutique de grossesse est proposée.
Côté prévention, chez une mère en contact avec un enfant de moins de trois ans, il est nécessaire de limiter les contacts avec eux : ne pas lécher la cuillère ou la tétine, ne pas finir leur assiette, bien se laver les mains après les avoir mouchés, après les avoir changés, limiter le contact avec les larmes ou la salive… Des conseils qui peuvent être difficiles à appliquer pour la maman d’un jeune enfant.
A noter : un essai clinique de phase 3 sur un vaccin à bas d’ARN message (Moderna) est mené dans plusieurs hôpitaux français.
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Source : Le Parisien 3 juillet 2023, l’Académie de médecine, Ameli.fr, Le Haut conseil de la Santé publique, le CNGOF, Manuel MSD
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Ecrit par : Ecrit par Dorothée Duchemin – Edité par : Vincent Roche