Dépendance à l’alcool : quel rôle pour le médecin généraliste?
28 septembre 2016
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Près de 5 millions de Français souffrent d’un problème lié à leur consommation d’alcool. Pour les dépister, les aider et les accompagner, le médecin généraliste se trouve en première ligne. Et son rôle est capital. Les explications du Dr Xavier Micouleau, médecin généraliste près de Pau.
Accompagner les patients. « Je suis convaincu du rôle central du médecin de famille dans le dépistage, la sensibilisation et la prise en charge des troubles liés à la consommation excessive d’alcool », indique le Dr Micouleau. « Or l’enseignement dispensé dans les facultés est trop axé sur les stratégies mises en place dans les hôpitaux. Dans la vraie vie, c’est à nous médecins traitants de tendre la main à nos patients, de leur faire prendre conscience d’éventuelles addictions. »
Les mettre en confiance…
Mais aujourd’hui encore, le problème lié à une consommation excessive d’alcool reste tabou. « Si nous n’abordons pas ce sujet, les patients se murent dans le silence. C’est pourquoi dès que je perçois un comportement proche de l’addiction, j’interroge mes patients, les proches sur la consommation et les conséquences sur leur vie professionnelle et familiale. L’objectif, c’est de les mettre en confiance. Car nous disposons d’outils pour les dépister, les accompagner et les prendre en charge de manière efficace. »
Des repères fiables existent pour reconnaître une dépendance alcoolique. « Je me sers d’un livret qui me permet de dépister rapidement une dépendance à l’alcool », précise le Dr Micouleau. « Pour un homme, la consommation devient problématique lorsqu’elle dépasse 21 verres standards par semaine, ou 4 par occasion de boire. Chez la femme, le seuil se situe à 14 verres par semaine ou 3 par occasion de boire ».
… pour les libérer de leur addiction.
En fonction de leur niveau d’addiction, le Dr Micouleau va orienter certains patients vers un centre d’addictologie et proposer aux autres un suivi personnalisé au cabinet médical, basé sur la motivation et la confiance. Il assure ainsi un accompagnement médicamenteux associé à une prise en charge psychologique. « Il existe des médicaments, dont un récent – le nalmefene – qui ont bouleversé positivement la vie d’une vingtaine de mes patients. En réalité, ils ont la possibilité de diminuer de 70% la consommation spontanée d’alcool. Concrètement, j’ai un patient qui au cours d’une soirée buvait sans limite, soit 7 à 8 verres. Or grâce à l’aide médicamenteuse, il consommait un ou deux verres, puis ressentait un apaisement. Ceci lui a permis de ne plus subir le phénomène de craving. Autrement dit l’envie irrépressible de boire. »
« L’objectif, ce n’est pas l’abstinence totale, mais la maîtrise de manière autonome et efficace. Plusieurs de mes patients ont réussi à se libérer de l’emprise de l’alcool grâce à cette prise en charge. Le maître-mot, c’est de les informer, de démystifier le problème, de les motiver, en leur expliquant qu’il est possible de sortir de cette dépendance. »
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Source : Interview du Dr Xavier Micouleau, 21 septembre 2016
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Ecrit par : Emmanuel Ducreuzet – Edité par : Dominique Salomon