Dépistage du VIH, rien n’est encore gagné
01 décembre 2023
Les progrès réalisés depuis de nombreuses années dans la lutte contre le VIH/Sida tendent à banaliser la maladie. La Journée mondiale de lutte organisée chaque année le 1er décembre, est là pour rappeler que rien n’est encore gagné. L’association AIDES pointe des dépistages peu ciblés et encore trop tardifs.
En cette journée mondiale de lutte contre le Sida, l’association AIDES – qui œuvre depuis 1984 dans la lutte contre le VIH/sida et les hépatites – salue la reprise encourageante du dépistage mais alerte aussi sur un ciblage insuffisant.
Elle reproche ainsi à l’État son manque d’ambition pour en finir avec l’épidémie d’ici 2030, alors même que l’on dispose de tous les outils nécessaires : la Prep (prophylaxie pré-exposition), le Tasp (Treatment as Prevention ; l’utilisation du traitement antirétroviral pour réduire considérablement la transmission du virus), les préservatifs internes et externes, le dépistage, le TPE (Traitement Post-Exposition ; administration de médicaments antirétroviraux dans les heures suivant l’exposition présumée au VIH) et les centres de santé communautaires.
A ce rythme là, nous n’y arriverons pas !
Entre 4 200 et 5 700 personnes ont découvert leur séropositivité en 2022 en France.
Entre 2012 et 2022, la diminution du nombre de découvertes de séropositivité est estimée entre 11 % et 21 %. Si cette donnée représente une bonne nouvelle, AIDES considère ce résultat comme décevant lorsqu’il est mis en perspective avec la diversité et l’efficacité des outils de prévention à disposition en France et en comparaison avec d’autres pays.
L’association prend l’exemple du Royaume-Uni. Dans ce pays, entre 2012 et 2018, le nombre de découvertes de nouvelles transmissions a chuté de 71,4 % chez les hommes ayant des relations sexuelles entre hommes (HSH). En France, la baisse n’a été que de 32 % entre 2012 et 2022.
6,5 millions de sérologies VIH en 2022
L’activité de dépistage du VIH, qui avait diminué entre 2019 et 2020 en lien avec l’épidémie de Covid-19, a réaugmenté pour atteindre un niveau en 2022 supérieur à celui de 2019 (+3%), constate Santé publique France. Mais ce n’est pas suffisant. En effet, les associations et les pouvoirs publics s’étaient fixé comme objectif que 95 % des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut sérologique dans le pays, prérequis à la fin de l’épidémie.
L’un des moyens pour y parvenir est de renforcer le dépistage parmi les publics les plus exposés au risque de transmission du VIH (HSH, usagers de drogues injectables, populations migrantes, etc.).
Dépister oui, mais précocement
S’il faut intensifier le dépistage, encore faut-il que l’on découvre l’infection à un stade précoce. Or, en 2022, 43 % des infections à VIH ont été découvertes à un stade tardif (seuls 28 % au stade avancé). Le fait que ce chiffre ne baisse pas avec les années est préoccupant, car cela nourrit l’épidémie du fait d’un risque de transmission du VIH aux partenaires avant la mise sous traitement antirétroviral. Cela constitue bien entendu aussi une perte de chance pour l’individu infecté. Ces découvertes tardives de l’infection se retrouvent surtout chez les hommes hétérosexuels nés à l’étranger et des femmes nées à l’étranger.
La fin de la transmission du VIH d’ici 2030, beaucoup y croient encore
AIDES considère que les données de Santé publique France restent insuffisantes pour avoir les moyens de ses ambitions. À cette fin, l’association plaide pour que le dispositif français de la Déclaration Obligatoire (DO) soit optimisé pour le VIH.
Une bonne nouvelle, le VIH devrait être intégré dans la liste des pathologies traitées par le système d’information LABOé-SI pour la surveillance épidémiologique de pathologies priorisées. Celui-ci est en cours de déploiement en France.
En ce 1er décembre 2023, le Pr Yazdan Yazdanpanah, directeur ANRS/Maladies infectieuses émergentes, et le Pr Patrick Yeni, président du Conseil national du sida et des hépatites virales, estiment dans un courrier commun que « la fin de la transmission du VIH d’ici 2030 est possible ».
Ils précisent néanmoins que « l’épidémie ne baisse pas suffisamment vite. Les propositions de dépistage doivent être plus précoces et répétées […] devant des signes de primo-infection ou d’altération immunitaire, mais aussi de manière systématique, en présence d’indicateurs d’exposition sexuelle, d’IST ou au moment des IVG (interruption volontaire de grossesse), quels que soient l’âge, l’origine géographique ou l’orientation sexuelle des personnes. L’offre de dépistage VIH test sans avance de frais et sans prescription doit aider à répéter le dépistage des personnes exposées. »