Des internes ivres de fatigue ?

03 décembre 2001

L’habileté des chirurgiens serait considérablement affectée à l’issue des gardes de nuits. A tel point que le fait d’effectuer une laparoscopie peut alors s’avérer bien périlleux…
A l’Université d’Aarhus au Danemark, le Dr Teodor Grantcharov a testé la dextérité de 14 chirurgiens – 11 hommes, 3 femmes – appelés à pratiquer une laparoscopie au terme d’une garde de nuit classique. Laquelle s’était prolongée de 15 heures 30 l’après-midi à 9 heures 30 le lendemain matin. Bien moins qu’en France où les gardes durent 24 heures… Agés de 24 à 45 ans, tous ces médecins avaient une expérience ” similaire et limitée ” en la matière.

Tous les chirurgiens ont été testés sur un simulateur. Heureusement… Ils ont dû répéter six tâches différentes au cours de la nuit, au terme de laquelle Grantcharov a évalué une dixième prestation… A 9h30 le matin, après une nuit où la durée moyenne de sommeil avait été de 90 minutes…

L’auteur a relevé des imperfections dans le geste chirurgical, au niveau notamment de sa précision mais aussi de sa durée, qui s’est trouvée allongée. Il souligne ainsi que ” des déficits psychomoteurs significatifs apparaissent après une garde de nuit de 17 heures “.

Une conclusion qui confirme un précédent travail réalisé à l’hôpital St. Mary de Londres en 1997. L’auteur avait alors montré que le simple fait de passer une nuit blanche avait les mêmes effets qu’une alcoolémie de 0,1 gramme par litre de sang ! De là à dire que les chirurgiens opèrent ” ivres de fatigue “, il y a un pas sur lequel nos gouvernants, en pleine grève des internes, devraient bien méditer…

  • Source : British Medical Journal, 24 novembre 2001