Sport : ménagez vos articulations

01 juillet 2002
L’arthrose, c’est une usure des cartilages articulaires. Laquelle peut survenir très tôt, dès 35 à 40 ans ! De multiples raisons expliquent ce phénomène. Une malformation de la hanche, une différence de longueur au niveau des jambes peuvent provoquer une usure anormale des cartilages de la hanche ou du genou. La composante génétique est discutée. Les experts paraissent au moins d’accord sur un point : une arthrose précoce, des doigts ou du rachis notamment, peut se retrouver sur plusieurs générations d’une même famille. La qualité du cartilage diffère d’un individu à un autre, et le risque tient tout autant à cette qualité qu’aux traumatismes auxquels le cartilage va se trouver exposé. Qu’ils soient liés à une activité professionnelle ou de loisir… Le Dr Jacques Rodineau, de Paris, fait autorité en matière de traumatologie sportive. Au 21ème séminaire de traumatologie du sport il y a quelques semaines à Héraklion, en Crète, il a évoqué le retentissement bien réel de l’activité sportive sur le développement d’une arthrose… Ménisque : une opération qui va « un peu vite »… Pour lui, « le sport n’est pas créateur d’arthrose. En revanche les lésions engendrées par le sport, elles, vont favoriser le développement de l’arthrose.. Quelqu’un qui a une entorse de cheville à répétition va finir par avoir une véritable distension de ses ligaments. Sa cheville ne tiendra plus et le cartilage va s’user. Et il peut se trouver dix ans, quinze ans après avec une arthrose. On peut avoir subi une entorse de cheville à 15 ans ou à 18 ans, et avoir une arthrose de la cheville à 35 ans ou 40 ans ». Les traumatismes antérieurs n’expliquent pas tout. En particulier pour l’arthrose la plus fréquente : celle du genou. Et d’après Jacques Rodineau certains chirurgiens pratiquent un peu trop facilement l’ablation de ménisque, dont le rôle est notamment de stabiliser l’articulation. « Un ménisque, il faut tout faire pour le sauver. Si on l’opère, on va générer de l’arthrose dans les quelques années qui suivent. On le constate souvent chez l’individu de 45-50 ans, qui a une simple lésion dégénérative de son ménisque, laquelle n’est même pas la cause de ses douleurs. » A l’image des lésions, certains gestes sportifs se révèlent aussi comme les pires ennemis des articulations. Ils provoquent ce que les spécialistes appellent des microtraumatismes. Répétés des centaines ou des milliers de fois durant plusieurs années, ils peuvent générer une arthrose. Au tennis, chaque impact de la balle contre la raquette provoque une vibration qui part du poignet jusqu’au coude. Répété, ce geste simple et anodin va user votre cartilage. D’autres exemples ? La frappe dans le ballon pour un footballeur, les tacles bien sûr, les accélérations avec changements soudains d’appui, les smashes et les contres au volley-ball… Le sportif occasionnel aussi peut être à risque d’arthrose. A cause de ces fameux microtraumatismes mais aussi de mauvais choix de matériel. Comme le souligne le Dr Arnaud Monnier, médecin du sport à Chartres, « de bonnes chaussures sont indispensables pour amortir la cheville, puis le genou. L’amortissement est primordial pour éviter les microtraumatismes du cartilage de chaque articulation. » Echauffez-vous avant de démarrer un match de football ou une partie de tennis. Et faites quelques étirements qui préserveront vos articulations. Si vous allez courir, privilégiez les premiers temps, un terrain plus souple que le macadam ! Enfin, dosez l’effort de façon très progressive. Le poids, ennemi des articulations ! Si la maladie est installée, vous devez impérativement continuer à faire du sport ou de l’exercice. Même si le dérouillage du matin est douloureux… D’après Jacques Rodineau, « l’exercice physique est absolument indispensable. Les arthrosiques doivent faire des exercices pour avoir une meilleure mobilité de leur articulation, et pour faire travailler leurs muscles. Ils seront ainsi plus puissants, plus souples. L’articulation sera mieux tenue. Mais avant de vous remettre au sport, rendez visite à votre médecin… « Le danger du sport, reprend en effet Jacques Rodineau, c’est qu’on a envie d’en refaire alors que son articulation n’est pas capable de le supporter. Il y a un problème sur lequel j’insiste beaucoup auprès des malades, c’est le poids. Il ne faut pas que les gens qui ont une obésité, ou qui ont pris 20 kilos, se remettent à refaire du sport brutalement. Ils doivent d’abord maigrir. Ils feront du sport après. S’ils font du sport avec leur excès pondéral, ils vont développer une arthrose de la hanche, du genou, de la cheville… » Des médicaments plus sûrs, moins agressifs La course à pied, la natation, le cyclisme et la gymnastique d’entretien sont les sports plus bénéfiques. Jacques Rodineau préconise ainsi quelques exercices très simples, à mettre en œuvre au quotidien. « Par exemple, mettez une serviette pliée sous le genou et tendez la jambe. Ecrasez cette serviette et maintenez cette posture pendant une vingtaine de secondes. Et puis relâchez-vous quelques secondes avant de recommencer pour écraser au mieux la serviette, et tendre à nouveau le genou! » Ces exercices sont le centre d’une stratégie « de prise en charge globale » de l’arthrose. Elle comporte des médicaments bien sûr, mais aussi des mesures liées à l’hygiène de vie, à l’information et l’éducation du patient. Médecin généraliste, rhumatologue et kinésithérapeute travaillent alors de concert auprès de leur malade. La récente apparition d’une nouvelle famille de médicaments, les anti-cox 2 ou coxibs, a permis d’améliorer la qualité de vie des patients. Par l’efficacité mais surtout la meilleure sécurité des traitements. Car pour maintenir la mobilité articulaire, pour permettre aux sportifs de pratiquer malgré l’arthrose et ainsi préserver l’avenir de leurs articulations, il est souvent indispensable de traiter l’inflammation. Or comme l’explique le Dr Cécile Borget, rhumatologue et ancien chef de clinique assistante des Hôpitaux de Paris, à la Pitié-Salpêtrière, « les anti-inflammatoires attaquent la muqueuse gastrique. Ils provoquent ainsi des ulcères ou aggravent des ulcères existants. Lesquels sont à l’origine de l’essentiel de la mortalité et de la morbidité sous anti-inflammatoires ! Les coxibs eux, présentent l’avantage à efficacité égale, de préserver l’estomac des sujets traités. » Mortalité ? Mais oui. Chaque année aux Etats-Unis, 16 500 malades décèdent des suites d’une complication gastrique liée à un anti-inflammatoire. En France, il y aurait chaque année entre 1 500 et 2 000 victimes… Quelques gestes simples d’échauffement peuvent retarder, voire prévenir l’apparition d’une arthrose. Au moins sur les articulations portantes de la hanche, du genou et de la cheville. Alors avant un jogging ou une partie de foot, n’oubliez pas que vos articulations, si elles ont été à un moment ou un autre maltraitées, ont une mémoire infaillible…
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