Tabac : un tueur redoutable
07 mars 2008
Seulement 5% de la population mondiale est protégée par une législation nationale relative à l’interdiction de fumer. Dans quatre pays sur dix, la cigarette est même encore admise dans les hôpitaux et les écoles ! Dans un nouveau rapport, l’Organisation mondiale de la Santé, l’OMS fait le point sur la lutte anti-tabac dans le monde. Au total, 179 pays sont passés au crible.
Prévalence du tabagisme, législation, taxation et même importation et exportation de produits du tabac, l’OMS présente une première analyse exhaustive de la lutte anti-tabac dans le monde. Un travail qui montre que la quasi-totalité des pays doit en faire davantage en la matière.
Dans l’ensemble, les recettes fiscales du tabac sont 500 fois supérieures aux sommes dépensées par les pouvoirs publics pour lutter contre le tabagisme. Voilà pourquoi l’OMS recommande aux pays concernés d’augmenter considérablement les taxes sur le tabac, et par voie de conséquence le prix de vente des produits en question : cigarettes, cigares, pipe, chicha, chique, bidi…
Pour l’Organisation, cette approche est de loin la plus efficace. Non seulement pour diminuer la consommation, mais aussi pour disposer d’une source de financement durable pour soutenir les stratégies anti-tabac.
En particulier celle que préconise l’OMS, sous le nom MPOWER : « surveiller la consommation de tabac et les politiques de prévention, protéger la population contre la fumée de tabac, offrir une aide à ceux qui souhaitent arrêter de fumer, mettre en garde contre les méfaits du tabagisme, interdire la publicité en faveur du tabac.
Ces mesures donnent aux pays des orientations pour respecter leurs engagements vis-à-vis de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte anti-tabac, souligne l’OMS. Celle-ci tente ainsi de réagir à la stratégie mondiale des industries du tabac, qui ciblent les jeunes et les adultes dans les pays en développement. Et notamment les jeunes femmes. Ce qui représente l’un des signes les plus inquiétants de l’évolution de l’épidémie.
Rappelons qu’à l’échelle mondiale, le tabagisme tue 4 millions 900 000 personnes par an. D’ici 2030, ce chiffre devrait atteindre… 8 millions. Soit une augmentation de 63%.
Chaque jour, de nouvelles études démontrent les méfaits du tabagisme. Aujourd’hui son rôle dans le développement de neuf cancers, dans la survenue d’accidents cardiovasculaires et dans les maladies oculaires est largement connu. Mais saviez-vous par exemple que la cigarette des parents fait aussi… ronfler Bébé ?
D’après une étude britannique, 10% des enfants de moins de 4 ans ronfleraient chaque nuit. En fait, 40% seulement de nos enfants seraient épargnés. Au-delà de l’aspect héréditaire du ronflement, c’est le tabagisme passif qui expliquerait ces chiffres élevés.
Le travail a porté sur 7 000 petits Anglais. Si l’un des parents est fumeur, le risque de ronflement pour le petit avoisine les 60%. Et il double si les deux parents fument. L’enjeu est de taille, car un ronflement précoce expose davantage à des risques de complications respiratoires : toux chronique, sifflements, infections ORL à répétition… D’où la nécessité pour les parents de bien tendre l’oreille lorsque Bébé dort.
Autre nouveauté, les fumeurs seraient plus paresseux que les non-fumeurs. Déjà taxés de mal manger, ils seraient en effet particulièrement réfractaires à… l’exercice physique. C’est la conclusion d’un travail on ne peut plus sérieux, mené par une équipe japonaise.
Pendant 4 ans, des chercheurs de l’Université des sciences médicales de Nagoya, se sont intéressés au statut tabagique et à la pratique sportive de 750 Japonais en bonne santé. La conclusion est sans appel. Les fumeurs font systématiquement moins d’exercice physique que les non-fumeurs.
Certes à l’arrêt du tabac, les anciens accrocs à la nicotine augmentent leur niveau d’activité. Mais dès qu’ils replongent, ils retombent aussi dans leurs mauvaises habitudes. A croire que la cigarette annihile toute volonté de bouger. Trois à quatre ans après avoir repris le tabac, leur niveau d’activité physique rejoint celui d’un fumeur régulier qui n’a jamais renoncé à la cigarette.
C’est d’autant plus inquiétant que l’exercice physique prévient notamment le surpoids, l’hypertension artérielle et l’hypercholestérolémie. C’est dire par conséquent, si les fumeurs multiplient leurs facteurs de risque…
En plus de ses innombrables effets délétères sur la santé, le tabagisme perturbe le sommeil, et ses victimes dorment moins, et moins bien, que les non-fumeurs. En cause, le syndrome de manque en nicotine provoqué par leur abstinence nocturne.
Les troubles de l’endormissement et du sommeil profond sont ainsi quatre fois plus fréquents chez les fumeurs. Une équipe américaine a comparé le sommeil de 40 fumeurs et de 40 non-fumeurs, tous en bonne santé et dont aucun ne prenait de somnifères.
La plupart des travaux menés dans ce domaine reposaient jusqu’à présent sur le recueil de données subjectives : « j’ai bien ou mal dormi »… Ce travail au contraire, est basé sur l’analyse des tracés polysomnographiques des patients. Leurs rythmes cardiaques et respiratoires ont été recueillis en continu durant la nuit, pour analyser les différentes phases de sommeil.
A partir de ces critères scientifiques et rigoureusement objectifs, l’auteur a déterminé que les troubles les plus fréquemment observés chez les fumeurs surviennent au début de la nuit. La nicotine inhalée en fin de journée exerce d’abord son effet excitant, ce qui explique pourquoi les fumeurs ont tant de mal à s’endormir .
Plus tard dans la nuit, c’est au contraire le manque de nicotine qui pose un problème aux fumeurs. Les phases de sommeil profond notamment, sont raccourcies par rapport à celles des non-fumeurs. Ces résultats sont autant d’arguments supplémentaires pour abandonner le tabac… et surtout pour ne jamais tomber dans le piège de la première cigarette.