Lanémie : une maladie
quil faut prévenir et traiter
01 avril 2001
Quand le taux sanguin dhémoglobine est bas, on parle danémie. Provoquée par un manque de fer dans 90% des cas - elle entraîne des troubles majeurs. Cest donc une véritable maladie, qui doit être prévenue chez les sujets à risque et traitée dès lors quelle est diagnostiquée.
Surtout lorsquelle est importante ou prolongée au point de provoquer une anémie, la carence en fer entraîne des désordres importants, tant chez lenfant que chez ladulte.
· Un enfant présentera des défauts dattention, une plus grande fatigabilité, ainsi quune diminution de la résistance physique ;
· Chez ladulte, les signes les plus évidents se traduiront par une baisse de la résistance à la fatigue et de la puissance de travail ;
Quant à la femme enceinte, elle constitue un cas particulier. Lanémie en cours de grossesse entraîne un risque accru de faible poids de naissance pour le nouveau-né.
Des signes peu spécifiques
Le problème, cest que les signes de lanémie sont peu spécifiques : difficile de compter sur eux pour poser un diagnostic ! Une pâleur de la peau et des conjonctives, une simple sensation de fatigue ou dessoufflement, une accélération du pouls voire des palpitations namènent pas toujours à consulter le médecin ! Tant sen faut. Or les méfaits de la carence en fer commencent à se faire sentir bien avant que lanémie au sens clinique du terme napparaisse
Parmi les signes qui doivent vous alerter, notons une augmentation inexpliquée de la fréquence des infections. Ou encore lapparition de fissures au coin des lèvres, et une dégradation des ongles et des cheveux, qui deviennent fragiles et cassants. Tout ceci est évocateur dune anémie ferriprive par privation de fer, n.d.l.r. et doit vous faire consulter le médecin. Sil fait procéder à une numération formule sanguine (NFS), celle-ci fera ressortir des globules rouges de petite taille, pâles, déformés et
en nombre anormalement faible.
Au moindre doute, pensez anémie ou carence en fer Pour cela pas de secret, le médecin va vous envoyer au laboratoire danalyse. Au terme dune simple prise de sang, il disposera de votre taux dhématocrite cest la part du volume sanguin occupée par les globules rouges - et de la concentration dhémoglobine dans votre sang. Le premier doit être compris entre 40% et 50% pour un homme, entre 38% et 47 % chez une femme. Quant à la seconde cest moins simple : chez le fumeur en effet, lorganisme synthétise une hémoglobine anormale la carboxyhémoglobine qui est incapable dassurer le transport de loxygène et biaise les résultats de lanalyse en les rendant faussement rassurants.
En outre, si des tests sanguins normaux éliminent léventualité dune anémie, ils nécartent pas pour autant la possibilité dune carence en fer. Car lanémie à proprement parler napparaît quune fois les stocks de fer de lorganisme épuisés. Il faudra donc toujours rechercher un déficit en fer, et le médecin fera procéder à un dosage de la ferritine sérique. Cest elle entre 20 µg et 200 µg chez la femme, entre 30 µg et 300 µg chez lhomme qui reflètera le mieux létat de vos stocks en fer.
Neuf femmes sur dix concernées
Ce nest pas si compliqué : une hémoglobine basse signifie que vous êtes anémié, tandis quun taux de ferritine inférieur à la normale indique lorigine de cette anémie : le manque de fer que les médecins appellent aussi carence martiale.
Or cest un trouble extrêmement fréquent. En marge de la grande enquête SUVIMAX menée depuis 1994 pour évaluer le statut de dizaines de milliers de Français en regard des sels minéraux et oligo-éléments, une étude baptisée EPIFER 1 a démontré que la carence martiale est très répandue. Même si elle nest pas toujours assez prononcée pour provoquer une anémie.
Un traitement simple mais nécessaire La carence en fer dabord. Les plus exposées sont les femmes enceintes ou en âge de procréer. En fait, 9 femmes en période dactivité génitale sur 10 ont des apports alimentaires inférieurs aux apports nutritionnels recommandés. Et 22,7% de ces femmes présentent une carence en fer. Si lhomme est nettement moins concerné - seulement 3 cas sur 100 - ces chiffres démontrent à lévidence que la correction et la prévention de ces carences en fer par des apports supplémentaires relève dune priorité.
Lanémie par carence en fer quant à elle, concerne 4,4% des femmes en âge de procréer . Les femmes enceintes y sont les plus exposées (9% à 37 %). La femme ménopausée et lhomme adulte y sont beaucoup moins sujets (1%).
Pourquoi la femme en activité génitale est-elle si affectée ? Parce quelle se trouve à la croisée de plusieurs facteurs de risques qui peuvent parfois se combiner : apport alimentaire insuffisant, besoins accrus, pertes sanguines excessives...
· Linsuffisance des apports alimentaires affecte au premier chef les personnes qui adoptent une alimentation végétarienne stricte, ou encore les sujets dénutris, souvent des personnes âgées. Ils peuvent être aussi consécutifs à des troubles digestifs qui empêchent labsorption des nutriments porteurs de fer, en cas de diarrhées prolongées ou dalternances diarrhées constipation.. ;
· Laccroissement des besoins est le fait de la femme enceinte ou allaitante et, dans une moindre mesure, de lenfant en cours de croissance ;
· Quant aux pertes excessives, elles peuvent être dues à des règles abondantes et favorisées par la présence dun stérilet. Létude EPIFER notamment, a montré limpact du mode de contraception sur le volume des règles : seulement 2% des femmes sous pilule sont anémiés et 13% ont une déplétion en fer tandis que sous stérilet la proportion danémies atteint 6% et celle des déficits en fer 28% !
Toute déplétion en fer, et a fortiori toute anémie ferriprive doit évidemment être corrigée. Car les répercussions de la maladie auront un impact aussi bien sur létat de forme que sur la qualité de vie : fatigue, frilosité, tachycardie ou essoufflement à leffort, souffles cardiaques, maux de têtes et bourdonnements doreille, perte de la libido, troubles de la mémoire et des processus décisionnels
Pour en venir à bout, pas question de sappuyer sur le seul régime alimentaire ! Même enrichi en nutriments riches en fer, il ne suffirait pas à la tâche. En effet, les apports nutritionnels recommandés pour un sujet en bonne santé vont de 14 mg/ jour pour un enfant 6 à 12 ans à
50 mg/jour pour une femme enceinte ou allaitante. Ils sont évidemment supérieurs pour un sujet carencé ou anémique et de telles quantités ne pourront être obtenues par la seule alimentation (tableau).
Les aliments les plus riches en fer sont les viandes, volailles et poissons qui en contiennent de 20 à 26 mg pour 100 g. Pourtant, 10% à 20 % seulement de cet apport seront réellement absorbés. Les légumes aussi contiennent du fer, mais en quantité moindre et seulement 1% à 10 % des quantités ingérées sont absorbées. En outre et à la différence de celui qui est apporté par les produits carnés, le fer des légumes voit son absorption largement influencée par les aliments auxquels il est associé : son assimilation est facilitée par la vitamine C, mais réduite par la prise conjointe de thé ou de café. Dans lensemble et compte tenu que plus de la moitié du fer nous est apportée par les aliments carnés, un régime exclusivement végétarien risque dentraîner une couverture insuffisante des besoins.
Il est donc nécessaire de prendre du fer sous forme de médicament. Le médecin prescrira en général des sels de fer en comprimés. Un à deux par jour mais
pendant 3 à 6 mois selon le degré danémie et de déplétion en fer. Des contrôles biologiques - hématocrite et ferritine - au bout de trois mois de traitement évalueront létat des stocks de fer et vérifieront que lanémie est sur la voie de la guérison.
Bien entendu, là encore mieux vaut prévenir que guérir. Pour cela et en plus dune alimentation bien équilibrée, la prise de sels de fer doit être recommandée chaque fois quune situation à risque est pressentie. Cest évidemment le cas de la femme enceinte : chez cette dernière, lanémie est fréquente et porteuse de risques graves pour la mère et le ftus. Un bilan biologique à la recherche dune carence ou dune anémie ferriprive est donc vivement conseillé avant la fin du troisième mois de grossesse.