#FaitesDesParents, un appel au don de sperme
12 février 2024
La loi du 2 août 2021 relative à la bioéthique a élargi l’accès de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes seules. Depuis, la demande explose. Et les dons de spermatozoïdes ont du mal à suivre. Le Dr Marine Jeantet, directrice générale de l’Agence de la biomédecine en appelle à la solidarité.
Quelle est la réalité de l’augmentation de l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP) avec don de spermatozoïdes ?
Dr Marine Jeantet: Entre août 2021, date de la promulgation de la loi bioéthique, et le 30 juin 2023, un total de 29 970 requêtes pour une première consultation en vue d’une Assistance Médicale à la Procréation (AMP) avec don de spermatozoïdes a été enregistré. Cette demande a été multipliée par 8 en l’espace de deux années, principalement observée chez les femmes seules et les couples de femmes qui s’engagent dans cette démarche. D’où un besoin criant en dons de sperme.
Cette situation est principalement liée au fait que les demandes et procédures d’AMP concernent en majorité des femmes seules ou les couples de femmes ?
Oui, en effet. En France, la liste d’attente pour une AMP avec don de spermatozoïdes s’élève à près de 5 430 demandes au 30 juin 2023, selon nos derniers chiffres, dont 41,1 % sont issues de couples de femmes, 40,2 % de femmes seules et 18,4 % de couples femme/homme.
Concernant l’accès aux procédures d’AMP, il n’y a pas d’ordre de priorité entre les couples hétérosexuels, les couples de femmes et les femmes seules. Mais les couples hétérosexuels n’ont pas tous besoin de dons de gamètes, et certains peuvent se tourner vers le secteur privé. En revanche, les couples homosexuels et les femmes seules dépendent exclusivement des centres publics en raison des restrictions légales : les procédures d’AMP avec don de gamètes sont uniquement possibles dans le secteur public.
La campagne #FaitesDesParents de l’Agence de la biomédecine vise les jeunes donneurs et donneuses en gamètes. La situation est-elle si tendue ?
Les dons de spermatozoïdes et d’ovocytes ont augmenté, mais pas suffisamment pour répondre à la demande croissante. Actuellement, nous ne ressentons pas de pénurie en spermatozoïdes, mais un suivi des stocks montre des signes préoccupants.
D’autant que la pression va clairement s’accroître. Nous constatons, comme observé dans d’autres pays européens ayant instauré l’accès à l’AMP pour les femmes seules et les couples de femmes, une rapide pénurie de donneurs, en particulier en spermatozoïdes, qui devient le facteur limitant.
Que ce soit pour les ovocytes ou les spermatozoïdes, le besoin est criant. Nous recherchons des jeunes personnes motivées. Qu’elles soient rassurées, le don n’accorde aucun droit de parentalité. [Notez que les personnes issues d’un don de spermatozoïdes, d’ovocyte ou d’embryon peuvent, à leur majorité, accéder à certaines données du donneur (âge, situation familiale et professionnelle, caractéristiques physiques, état général, pays de naissance, motivations du don) ainsi qu’à son identité, ndlr].
C’est simplement offrir à des individus la possibilité d’être parents. C’est un geste de solidarité, une contribution précieuse qui permet à d’autres de réaliser leur projet familial.
Et en ce qui concerne les dons d’ovocytes ?
Un des grands objectifs est l’autosuffisance. Or, concernant le don d’ovocytes, leur utilisation se fait au fil de la demande, sans qu’il soit même possible de constituer un stock ! A cela s’ajoute une autre problématique du côté de la logistique liée au don d’ovocytes : nous constatons des embouteillages au niveau des services hospitaliers, car ce sont les mêmes qui s’occupent des dons d’ovocytes que ceux qui réalisent l’aide médicale à la procréation.
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Source : Interview du Dr Marine Jeantet, directrice générale de l’Agence de la biomédecine
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Ecrit par : Hélène Joubert - Édité par Emmanuel Ducreuzet