Grossesse et Covid-19 : quid du risque de transmission de la mère à l’enfant ?
30 décembre 2020
Que dit la science sur le risque de transmission du SARS-CoV-2 de la mère au fœtus ? Zoom sur les données publiées à ce sujet depuis le printemps 2020.
La Covid-19 se transmet-elle in utero ? En Chine, en février, une transmission materno-fœtale a été suspectée chez un nourrisson positif à la Covid-19, et ce 36 heures après l’accouchement. Mais la contamination a très bien pu se faire après la naissance.
Dans leur étude publiée en octobre 2020, des scientifiques français* révélaient que sur 175 nourrissons positifs à la Covid-19 après la naissance, 70% des cas étaient liés à une transmission environnementale dans les premiers jours de vie et 30% à une transmission mère-enfant, intra-utérine ou pendant l’accouchement. En juillet, un travail publié dans Nature Communications relayait le cas d’une transmission de la mère à son enfant via le placenta. Le bébé présentait des symptômes neurologiques de la Covid-19.
Mais « à l’heure actuelle, la communauté scientifique reste prudente, estimant que si la transmission de la mère à l’enfant est possible pendant la grossesse, elle est très rare », affirme l’Inserm. Un point étayé ce 22 décembre par des chercheurs américains de Boston**. Selon l’équipe du Pr Andrea G. Edlow, « le risque de transmission de la Covid-19 de la mère au fœtus pendant le 3e trimestre de la grossesse est peu probable ».
Pas de trace du SARS-CoV-2 dans le placenta
Pour le prouver, les scientifiques ont suivi 127 femmes enceintes prises en charge à l’hôpital de Boston au printemps 2020. Parmi elles, 64 cas de Covid-19 ont été diagnostiqués. Aucun nouveau-né n’a été testé positif : aucune trace du virus n’a été retrouvé dans le sang du petit ou dans le placenta. Un point confirmé chez les femmes présentant ou non des facteurs de risque de la Covid-19 comme l’obésité, l’hypertension ou le diabète.
Cette observation prouve « que le SARS-CoV-2 ne semble pas traverser la barrière placentaire. Davantage d’études doivent être menées pour confirmer ce point », déclare le Pr Diana W. Bianchi, principale auteure de l’étude.
Par ailleurs, chez les femmes contaminées et présentant une réponse immunitaire, très peu d’anticorps ciblant le SARS-CoV-2 ont été relevés dans le placenta. « Ce qui laisse penser que les anticorps développés contre le virus ne traversent pas facilement la barrière placentaire, contrairement aux anticorps ciblant la grippe retrouvés en forte concentration à ce niveau après vaccination contre cette maladie. » Cette donnée est très importante. « Nous devons déterminer les raisons pour lesquelles les anticorps ne traversent pas la barrière placentaire. Et voir si cela induit une vulnérabilité chez le petit », décrit le Pr W. Bianchi. « C’est important car on sait que les fœtus dont la maman est porteuse du SARS-CoV-2 sont exposés à un risque de naissance prématurée. »
A noter : des études sont attendues sur le risque de transmission materno-fœtale pendant les premiers et seconds trimestres de la grossesse.
*AP-HP / Université Paris-Saclay, Dr Daniele De Luca, chef du service de pédiatrie et réanimation néonatales et consultant pour l’OMS sur la transmission néonatale de l’infection à SARS-CoV2, Pr Alexandra Benachi, chef du service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital Antoine-Béclère
**Eunice Kennedy Shriver – Massachusetts General Hospital and Harvard Medical School
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Source : « Transplacental transmission of SARS-CoV-2 infection », Alexandre J. Vivanti, Nature Communication, 14 juillet 2020 – « Synthesis and systematic review of reported neonatal SARS-CoV-2 infections », Nature Communication, Roberto Raschetti, Alexandre J. Vivanti, le 15 octobre 2020
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Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Emmanuel Ducreuzet