Handicap : personnaliser les aides techniques
09 mai 2023
Une manette à l’effigie d’un personnage de manga pour diriger un fauteuil roulant ou encore un guide-doigts pour souris d’ordinateur. Quel est le point commun de ces divers dispositifs ? Ils ont tous été mis au point à Cowork’HIT, un centre d’innovation dans le domaine du handicap, logé sur le site de Kerpape, établissement de rééducation près de Lorient. Un travail « sur mesure » destiné à améliorer l’accès dans le domaine du handicap.
C’est pour une adolescente de 12 ans que Lola Lauby, ingénieure projet à Cowork’HIT, a développé une manette de commande pour fauteuil roulant. Adaptée à son handicap ainsi qu’à sa morphologie, la manette est décorée d’un petit Pikachu en 3D. Totalement personnalisée, elle a été conçue en association avec la jeune fille, fan de Pokémon. « Notre travail consiste à mettre au point ces aides en co-conception avec l’utilisateur et son ergothérapeute », explique-t-elle. « Ces dispositifs, sur mesure et mieux ciblés, sont des produits uniques destinés à cette seule personne. »
Depuis le début de l’aventure, Lola Lauby a ainsi répondu à de nombreuses demandes pour des personnes souffrant d’une sclérose en plaques, porteuses d’une tétraplégie ou encore d’un handicap lié à une myopathie. Au total, l’équipe a développé environ 300 aides techniques personnalisées. « Pour certaines en quinze minutes. Pour d’autres, il faut de nombreuses séances avec les usagers et les soignants avant de trouver la bonne solution. Cela dépend de la difficulté du dispositif », explique-t-elle. Il faut parfois s’adapter à la fatigabilité de l’usager, à la sensibilité de ses membres ou encore à une absence de communication.
Démédicaliser le dispositif
Mais quelle différence avec les aides techniques disponibles dans le commerce ou développées par les ergothérapeutes ? Outre la personnalisation au niveau morphologique, ces dispositifs sont aussi uniques car ils répondent à un besoin particulier. Ainsi le Pikachu du fauteuil roulant d’adolescente n’est pas la seule demande spécifique à laquelle Lola Lauby a dû répondre. Pêle-mêle, elle a créé un porte crayon adapté, un lance-palet breton, un dispositif permettant à une personne triple amputée de tondre sa pelouse au rotofile… « Avec les imprimantes 3D, ces demandes sur mesure ne coûtent pas plus cher à fabriquer et permettent de démédicaliser ces objets », précise-t-elle. « Le dispositif devient alors davantage un accessoire personnalisé, presque un bijou. »
Grâce à cette souplesse, il est plus facile pour l’utilisateur de s’approprier l’aide technique. Autre exemple, « à la demande d’un monsieur souffrant de sclérose en plaques, ayant perdu la sensibilité des mains, j’ai créé un guide-doigts pour sa souris d’ordinateur », raconte Lola Lauby. Objectif, s’assurer que sa main restait bien en place sur l’appareil. Petit détail : le guide-doigts droit est rouge et le gauche est bleu en référence au film Matrix où la pilule rouge représente la « vérité de la réalité » et la bleue, « la réalité simulée de la Matrice ». Un clin d’œil loin d’être accessoire pour le cinéphile.
Et ce n’est pas un luxe au regard des données nationales : « Un tiers des aides techniques ne sont plus utilisées au bout d’un an », indique Anne-Claude Lefebvre, directrice de Cowork’HIT. Pourquoi ? « Car les besoins de l’usager ne sont pas totalement couverts, l’apprentissage autour de l’aide technique n’est pas suffisant, le dispositif ne plaît pas ou n’est pas adapté. » Avec le développement de l’impression 3D, il est désormais possible de reproduire facilement, depuis un fichier numérisé, un même objet. Et de le personnaliser au maximum, jusque dans les détails.
Soutenir l’innovation dans le handicap
Outre la création des aides personnalisées, le centre d’innovation Cowork’HIT offre aussi « un accompagnement sur mesure aux start-up porteuses d’innovation pour que leur projet puisse être commercialisé », explique Anne-Claude Lefebvre, directrice de Cowork’HIT. « Et nous répondons également aux sollicitations d’établissements de santé, de professionnels de santé, d’associations et autres fédérations sportives pour la mise au point de dispositifs adaptés. » C’est ainsi que le centre a mis au point un kit d’aide au positionnement permettant de s’adapter à un siège d’aviron. Ainsi les sportifs porteurs de handicap peuvent désormais pratiquer ce sport.
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Source : reportage à Coworkhit, Centre Kerpape, à Ploemeur, près de Lorient, 17 mars 2023 – Handicap.fr
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Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Vincent Roche