Image et santé : l’éthique en débat
02 décembre 2010
La seconde édition du colloque Médias et Santé, organisée le 25 novembre dernier par La Provence, l’Université de la Méditerranée Aix-Marseille II, a tenu toutes ses promesses. Quatre tables rondes se sont succédées sur un thème à la fois original et polémique, « la santé à l’écran ».
Imagerie interventionnelle, échographie, scanner, IRM… En moins de 30 ans l’imagerie médicale a connu un essor formidable. Au sens le plus plein du terme… A tel point que pour le Dr Bruno Salazar, spécialiste en chirurgie plastique pédiatrique à l’hôpital Saint-Joseph de Marseille, « elle a participé au changement de la relation patient-médecin. L’imagerie médicale est un outil fabuleux pour le diagnostic et le suivi des traitements ». Le problème, c’est qu’aujourd’hui certains patients ne comprennent pas pourquoi des examens leur sont refusés. « Il faut une hiérarchisation des urgences. Ce n’est pas facile à faire comprendre aux malades », a expliqué le Pr Jean-Noël Talbot, chef du service de médecine nucléaire de l’hôpital Tenon (Paris). Et responsable à ce titre, d’un plateau technique parmi les mieux équipés d’Europe… sinon du monde. Cette première table-ronde en quelque sorte, a lancé le débat.
Echographies « artistiques » : une réalité très fictive
Une seconde confrontation a permis de revenir sur les fameuses échographies dites ‘artistiques’. « Nous devons faire face à une demande impressionnante de la part des futurs parents », a souligné le Dr Guillaume Gorincour, du service d’imagerie pédiatrique prénatale du CHU la Timone (Marseille). « Cependant ces échographies en 3D, sont en réalité l’image la plus trafiquée, la plus fictive qui soit. Elles ne servent à rien pour un éventuel diagnostic ».
Les images chocs ? Oui mais… non
Les intervenants de la troisième table-ronde se sont pour leur part demandé si l’usage d’images chocs dans les campagnes de prévention était efficace. « Aux images chocs, je préfère les images qui font appel à l’affectif. C’est un très bon support pour parler de santé », a expliqué Dr Stéphane Pichon, président du Conseil régional (PACA) de l’ordre des Pharmaciens. Pour Guy Le Rochais, administrateur de l’Association France Alzheimer, « l’émotion aussi peut être choquante ». Anne Gardies, représentant l’Institut national de Prévention et d’Education pour la Santé (INPES), a souligné pour sa part que « l’essentiel est de s’adapter aux différents publics visés ». Elle aussi s’est prononcée contre « les images chocs », préférant largement recourir « à des slogans percutants ».
De futurs journalistes confrontés à l’éthique… en santé
Les médias en font-ils trop ? Vaste question pour la dernière table-ronde. Pour le Pr Jean-Albert Gastaut, onco-hématologue à l’Institut Paoli Calmettes (Marseille), « les images diffusées au grand public devraient toujours être accompagnées d’un commentaire et d’une explication. ». Estelle Lecointe, présidente de l’Association française des Patients du GIST – c’est-à-dire atteints par une tumeur gastro-intestinale rare – a pour sa part lancé un appel à l’éthique. « Les médias sont un soutien indispensable pour les patients. Pour autant, certains tombent dans la facilité, le cliché. Ils présentent des images dégradantes des malades ». Une critique féroce contrebalancée toutefois, par une reconnaissance envers des professionnels « guidés par l’éthique et la responsabilité ».
A l’évidence, cette présentation a vivement intéressé la centaine d’étudiants de l’école de communication et de journalisme de l’Université de la Méditerranée, qui ont assisté aux différentes tables-rondes. Ces futurs confrères ont eu droit en quelque sorte, à un cours sur l’éthique de leur future profession. Une bien belle image pour clore cette journée. Signalons d’ailleurs le travail remarquable de ces étudiants, qui ont réalisé un supplément spécial de La Provence à l’occasion de ce colloque.
Pour aller plus loin : lire l’intégralité du supplément de La Provence.
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Source : de notre envoyé spécial au 2ème colloque Médias et Santé, Université de la Méditerranée, Marseille, 25 novembre 2010