Irak : le « J’accuse ! » du Lancet

25 avril 2003

« Avant 1991, le système de soins irakien figurait parmi les meilleurs. Les forces d’occupation doivent désormais remplir leurs obligations (…) pour que les humanitaires, emmenés par l’ONU, commencent de réparer les dommages des 12 dernières années. »

Zola n’est pas mort ! Publié ce matin à Londres, le Lancet rappelle que le droit d’ingérence exercé par la coalition, s’accompagne aussi d’une large théorie de devoirs incontournables ! Sous sa bannière propre – l’éditorial est signé impersonnellement par le Lancet – le célèbre journal scientifique rappelle au monde, et en premier lieu aux coalisés, l’ensemble complexe des lois et textes humanitaires qui régissent la guerre et ses conséquences.

« La déclaration de la Haye et ses conventions de 1899 à 1973, celles de Genève détaillent les engagements de toute puissance d’occupation. L’article 43 des règlements adoptés en 1907 à la Haye, stipule que la puissance occupante doit prendre toutes les mesures à sa disposition pour assurer l’ordre public. L’article 55-63 de la quatrième convention de Genève prévoit que la puissance occupante doit s’occuper de l’hygiène et de la santé publique de la population civile. »

Sans polémique, le journal souligne que tous ces articles n’ont pas été respectés. « Dans un pays à l’infrastructure sanitaire fragilisée par une décennie de sanctions, la guerre a accentué la désintégration des services. Les pillages et les violences qui ont suivi ont été encore plus préjudiciables. Ce chaos semble avoir été complètement imprévu par les forces de la coalition, alors que les agences spécialisées l’avaient anticipé. (…) Pourquoi les forces de la coalition ont-elles été incapables ou peu disposées à protéger la population civile, son infrastructure ou ses racines ? Les conséquences de cette inaction sont criantes : les Irakiens manquent d’eau, d’électricité, de médecins, de personnel qualifié dans les hôpitaux… »

L’ explosion des diarrhées infantiles, l’absence de tout ramassage des ordures ménagères… Une longue liste des conséquences de cette inaction suit, que le journal assimile « à une forme de bio terrorisme qui rend les populations plus sensibles aux infections. » La charge est lourde, et le journal interpelle tous les professionnels de santé. Car à ses yeux, quiconque prétendrait que « ces aspects de la santé publique ne sont pas du ressort des médecins (pêcherait) par ignorance des responsabilités et des capacités uniques dont disposent ces professionnels pour faire avancer le débat. »

  • Source : The Lancet, vol 361, p.1399, 25 avril 2003

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