L’activité physique adaptée, aussi bénéfique que méconnue
29 novembre 2023
L’activité physique adaptée est une thérapeutique non médicamenteuse validée pour les personnes vivant avec une maladie chronique. Depuis 2022, tous les médecins peuvent la prescrire. Or, elle reste méconnue et largement sous-utilisée, dénonçait l’association Santé Respiratoire France lors de son colloque annuel, le 17 novembre dernier au Sénat (Paris).
Cela fait plus d’une décennie que l’activité physique adaptée (APA) a été reconnue comme une thérapeutique non médicamenteuse par la Haute Autorité de Santé. « C’est une véritable thérapeutique validée dans de nombreuses maladies chroniques, facteurs de risque et situations de perte d’autonomie », explique le Dr Albert Scemama de la Haute Autorité de Santé (HAS).
Si tous les acteurs de la santé la plébiscitent, y compris la Caisse nationale d’Assurance-maladie, pour autant, l’APA n’est pas aussi utilisée qu’elle devrait l’être. Méconnue du grand public, des médecins qui peuvent la prescrire et même des principaux intéressés – les malades chroniques – la difficulté est aussi de trouver des lieux où la pratiquer et des professeurs APA pour la dispenser. Ainsi, comme l’indique le Dr Frédéric le Guillou, pneumologue et président de Santé Respiratoire France qui se veut la porte-parole des 18 millions d’insuffisants respiratoires chroniques français, « parmi les propositions que l’association va défendre auprès des pouvoirs publics figure celle d’inclure l’activité physique adaptée dans le parcours de soin pour les personnes atteintes d’une maladie respiratoire chronique, tous stades de gravité confondus ».
44 % des insuffisants respiratoires n’ont jamais entendu parler de l’APA
Dans une récente enquête, Santé Respiratoire France a cherché à connaître l’opinion des patients souffrant d’insuffisance respiratoire sur l’activité physique adaptée. Cette dernière reste méconnue de ceux pour laquelle elle est conçue : seuls 56 % savent de quoi il s’agit. 49 % des répondants déclarent bénéficier d’une APA encadrée par un professionnel de santé. L’un des principaux leviers pour la pratiquer est la prescription de l’APA par un médecin, ce qui serait incitatif pour 88 % des répondants. La prise en charge financière par l’Assurance-maladie faciliterait également la pratique de l’APA, pour 87 % d’entre eux.
Quelle est la finalité de l’APA ?
Les individus, en particulier ceux souffrant de maladies chroniques, « sont souvent restreints dans leurs activités quotidiennes en raison de symptômes tels que l’essoufflement, la douleur ou la fatigue, qui sont fréquents dans le cas de maladies respiratoires ou de traitements contre le cancer », explique Baptiste Chéhère, enseignant APA et maître de conférences à l’Université de Bretagne Occidentale. Ces symptômes suscitent du stress et sont souvent accentués par le mouvement ou certains efforts physiques, d’où parfois une peur du mouvement (kinésiophobie), à l’origine d’un déconditionnement progressif, appelé « spirale du déconditionnement ». L’APA a pour premier rôle d’éviter ou de renverser cette spirale de déconditionnement, d’améliorer ou de maintenir les capacités physiques et de permettre une amélioration des symptômes.
L’APA nécessite d’être ajustée en fonction « de la sévérité de la maladie respiratoire et des maladies associées, des capacités physiques de la personne, des possibilités locales et du domicile, de l’environnement socio-économique, et même des contraintes météorologiques, précise le Dr Jean-Marie Grosbois, pneumologue spécialisé en réadaptation respiratoire. Elle doit être négociée et adaptée en termes de fréquence, en intensité comme en durée. »
La fréquence se situe entre 3 à 5 fois par semaine. L’intensité doit correspondre au seuil d’essoufflement de la personne, et la durée être comprise entre 30 et 45 minutes, pouvant être fractionnée en périodes de 5 à 10 minutes pour mieux les intégrer dans la vie quotidienne.
Respir’Agora, pour trouver où pratiquer l’APA
Respir’Agora, est une plateforme unique en son genre qui s’adresse aux personnes insuffisantes respiratoires et aux aidants. Lancée en 2020, elle répertorie les associations locales, les structures de réadaptation respiratoire, les lieux d’éducation thérapeutique, et les endroits où pratiquer une activité physique, qu’elle soit adaptée ou non.
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Source : Enquête Smartketing (du 24 mars au 2 mai 2023, 568 patients ont répondu à une enquête en ligne (de 29 questions) auto-administrée/Modalisa) - Bouger pour mieux respirer ! Rencontres 2023 Santé respiratoire France (17 nov 2023, Palais du Luxembourg) - D’après les interviews de Baptiste Chéhère et des Drs Frédéric le Guillou, Jean-Marie Grosbois et Albert Scemama.
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Ecrit par : Hélène Joubert - Edité par : Emmanuel Ducreuzet