Le chant des galériens ou des sirènes ?
03 août 2006
Comme l’annonce un communiqué des professionnels concernés, “la saga des blocs opératoires continue“. Bien que les pouvoirs publics aient décidé de prendre en charge les 2/3 de leurs assurances professionnelles, la grève va reprendre.
Il s’agissait pourtant d’un acquis sanctionné pour le contribuable par une facture annuelle de 20 millions d’euros. Peine perdue : les praticiens libéraux (anesthésistes-réanimateurs de l’AAL, chirurgiens de l’UCDF et obstétriciens du SYNGOF) estiment les négociations closes sur un échec. A leurs yeux, “le Ministre de la Santé et le Directeur de l’Assurance Maladie n’ont pas réussi à proposer des solutions concrètes et écrites sur (…) l’augmentation des tarifs des actes chirurgicaux et d’anesthésie” notamment.
Selon le directeur général de la Caisse nationale d’Assurance Maladie Frédéric van Rockeghem, ce seul point – une augmentation de 25% de la rémunération des actes – coûterait 50 millions. Une somme évidemment considérable… pour toutes les parties. Les autorités jugent cette demande impossible à satisfaire en raison des efforts exigés de tous pour le rétablissement des comptes. Quant aux professionnels, ils y voient l’exact montant de leur manque à gagner.
Alors que les services d’urgence viennent de traverser une crise aiguë provoquée par la conjonction de cette grève avec la vague de chaleur, et en dehors de toute considération éthique, on peut se demander si les grévistes ont raison de jeter ainsi le bébé avec l’eau du bain. Le manque à gagner qui les fait hurler est certes significatif. Mais il s’applique à un revenu annuel net moyen – 119 782 euros pour les chirurgiens libéraux et… 128 762 euros pour les anesthésistes – sans commune mesure avec celui du ménage français moyen. Encore ces chiffres, cités par la Société française de Chirurgie de la main et provenant de la Direction générale des Impôts, concernent-ils les revenus de 2001.
Ces revenus n’ont rien de scandaleux. Ni par excès, ni par défaut. Ils correspondent souvent à des semaines de 70 heures, pour des professionnels qui ont fait 10 ans d’études ou plus et subissent des astreintes lourdes. Il est normal que leurs difficultés et leurs responsabilités trouvent compensation. Mais ils montrent à l’évidence que ces médecins même s’ils s’estiment sous-payés, ne sont pas les galériens du système.
Leurs dirigeants doivent joindre leurs confrères pour décider du futur et beaucoup sont en vacances. Nous saurons donc après le 15 août ce que nous réservent les prochains plans de ces “Révoltés de la Sécu”. Des révoltés de luxe, tout de même. N’ont-ils pas les moyens de s’offrir, pour soutenir leur “communication”, les services de trois agences spécialisées différentes ? Pas moins. Aux frais de l’Assurance Maladie, finalement…
Source : Société française de Chirurgie de la Main (GEM SFCM), août 2006 daprès les fichiers DGI-INSEE, Rapport Domergue sur « La Chirurgie française », 2003, Ministère de la Santé et des Solidarités, 2 août 2006 – Crédit photo : Steve Cukrov – Fotolia