Le médicament victime des politiques ?

07 mars 2004

Le médicament, ses inventeurs, ses fabricants, ses prescripteurs et… ses consommateurs ont-ils tous tort contre les politiques? C’est à croire car les petites phrases ou les gros bras -de fer- à ses dépends ne manquent pas en ce moment. Et pas qu’en France…

Il s’en faut même de beaucoup ! L’administration Bush par exemple paraît agir de façon si brouillonne que certains lui demandent d’arrêter de tirer sur le pianiste ! Ce n’est pas que les politiques veuillent gêner le développement de ce secteur industriel. Il semblerait même plutôt que ce soit le contraire. Mais ils en feraient presque… un peu trop !

Premier marché pharmaceutique mondial avec 184 milliards de dollars dépensés en 2003 et… 519 milliards prévus en 2013, les USA font figure de pays de cocagne pour le médicament. L’administration semble même considérer ces performances comme un facteur de croissance et de richesse.

Pas comme le Français Yves Bur, député du Bas-Rhin et animateur du groupe ‘médicament’ à l’Assemblée nationale. Il estime dans une pure logique comptable, que les 15,4 milliards d’euros dépensés en France sont excessifs. Sans proposer d’autre argumentation scientifique ou médicale. Lors du dernier Medec, il a également livré sa vision du médicament demain. Il le voit avec un rôle « toujours central dans les stratégies thérapeutiques, mais pas contre les grands fléaux. Surtout dans la lutte contre les maladies chroniques. » C’est oublier sans doute, les apports de la recherche industrielle dans la lutte contre le VIH – tous les traitements actuels en sont issus – ou le SRAS. Puisque là encore, les rares progrès thérapeutiques sortent aussi de laboratoires privés…

USA-Maroc: le bras de fer?
Outre-Atlantique et compte tenu que la contrefaçon atteint des proportions exponentielles – de source industrielle 90% du Viagra vendu en ligne serait contrefait ! – une task-force spéciale de la FDA vient de recommander l’utilisation des NTIC dans la chasse aux contrefacteurs. Tout est bon, y compris l’inclusion de puces à radiofréquences dans les étiquettes, les boites ou les médicaments eux-mêmes. L’industrie est invitée à mettre en place ces dispositifs à l’échéance 2007. Une défense efficace ? C’est à souhaiter. Car elle ne manquera pas de peser un peu plus sur les prix des médicaments… vendus aux pays en développement.

Dans le même temps la négociation d’un accord de libre-échange entre les USA et le Maroc provoque une émotion considérable. Car il imposerait s’il était adopté, des clauses en contradiction avec les accords sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), connus en anglais sous l’acronyme TRIPS.

Basée à Washington, l’ONG Human Rights Watch dénonce ce projet et particulièrement une clause portant la durée de protection conférée par les brevets de 20 à… près de 30 ans. Dans une lettre au Représentant américain au Commerce Robert B. Zoellick, elle exhorte les Etats-Unis à « ne pas utiliser ces négociations comme une occasion pour limiter la capacité du Maroc à utiliser les règles existantes du commerce mondial pour étendre l’accès aux médicaments contre le VIH/SIDA. » Elle n’est pas seule dans son combat. Une douzaine de parlementaires européens ont lancé une pétition dans le même sens. Au milieu de tous ces règlements de comptes, certains professionnels du médicament paraissent se sentir mal à l’aise…
Sources : BMJ, vol 328 p. 727, Medec 2004 Paris 16-19 mars 2004

  • Source : WHO/UNICEF, 23 March 2004

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