Le sport : une addiction comme les autres
15 octobre 2010
Dans notre société, le sport est de plus en plus mis en valeur. A bon droit, d’ailleurs. Mais du coup, l’évocation même d’une dépendance à son sujet peut donc étonner. Pourtant dans certaines conditions, la pratique sportive peut bel et bien relever… d’une addiction sans substance.
Bien que difficile à détecter, elle touche les sportifs de haut niveau mais également les amateurs. Réunis en congrès à Nantes la semaine dernière, plusieurs centaines d’addictologues francophones ont traité cette question. Ils ont aussi, évoqué les actions de prévention à entreprendre auprès des coachs et des parents de jeunes sportifs.
Une définition très précise de l’addiction au sport a été proposée par le Centre d’Etudes et de Recherches en Psychopathologie (CERPP) de Toulouse, et par les Universités de Toulouse et de Bordeaux. Elle repose sur « un besoin irrépressible et compulsif de pratiquer régulièrement et intensivement une ou plusieurs activités physiques et sportives en vue d’obtenir des gratifications immédiates et ce malgré des conséquences négatives à long terme sur la santé physique, psychologique et sociale ». Mais si elle est clairement identifiée, l’addiction au sport n’en reste pas moins difficile à diagnostiquer. Un ensemble de signes peut toutefois mettre les médecins (et l’entourage) sur la piste. Nausées, douleurs à répétition, troubles du sommeil à l’approche d’une compétition, asthme d’effort, fractures de fatigue ou perte de poids inexpliquée doivent alerter. L’entourage du sportif doit alors les prendre en compte.
Tombés dedans quand ils étaient petits
Ces addicts sont d’autant plus difficiles à détecter que l’objet de leur dépendance est porté aux nues. Pour le Dr Stéphane Pretagut, psychiatre dans le service d’addictologie du CHU de Nantes, l’addiction au sport est « la modélisation de ce qui se passe dans notre société ». En effet, « les fortes pressions exercées sur les sportifs et le fait qu’on les laisse tomber à la moindre blessure ressemblent à ce qui se produit dans notre société ». Il appelle à « crever la bulle sacralisée du sport », pour éviter les addictions et mieux soigner ces dépendances qui provoquent des dommages importants.
Même si « une majorité de sportifs professionnels va bien », rappelle-t-il, beaucoup d’autres souffrent de cette situation. « Le système qui tend à entretenir le surinvestissement, souvent encouragé par l’entourage, favorise le risque de dépendance », ajoute le Dr Pretagut.
Dès l’adolescence, les sportifs de haut niveau sont immergés dans leur discipline. « Ils ne savent que faire de leur temps libre, et ils ont du mal à aimer autre chose ». Comme ses collègues, Stéphane Prétagut estime ainsi « nécessaire de mettre en place des outils de prévention auprès des coaches et des parents, ainsi que des médecins et des éducateurs sportifs ».