Les inégalités sociales à l’origine de retards de langage
08 janvier 2019
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Les revenus ou le niveau d’études des parents ont-ils un impact sur le développement des tout-petits ? Une équipe française a étudié ce lien auprès de la cohorte Elfe*. Résultat, les inégalités sociales auraient des conséquences en matière d’acquisition du langage mais pas en termes de développement moteur.
Vivre dans un environnement aisé, avoir une mère ou un père CSP+ induirait-il des chances supplémentaires pour les enfants concernés ? Et ce dès le plus jeune âge, en leur donnant de l’avance dans leur développement psychomoteur ? Publiée dans la dernière livraison du Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH), une étude semble valider ces hypothèses. En tout cas en matière d’acquisition du langage à 2 ans.
Pour en faire la démonstration, les chercheurs ont réalisé des entretiens en face à face peu de temps après la naissance à l’hôpital, puis par téléphone environ deux mois après la naissance, ainsi qu’aux premier et deuxième anniversaires de l’enfant.
Dix mots d’écart
L’indicateur de développement du langage utilisé a permis de mesurer le volume et la variété du vocabulaire acquis par l’enfant. Les chercheurs ont ainsi déterminé le nombre de mots dits de manière spontanée parmi une liste de 100.
Pour ce qui est du développement moteur, les indicateurs ont notamment analysé la capacité de l’enfant à effectuer différentes activités, comme monter les escaliers, frapper dans un ballon, courir, pédaler avec un tricycle, manger seul…
Résultats, « alors qu’en moyenne aux alentours de 2 ans, les enfants connaissent 74 mots parmi les 100 proposés, ceux dont la mère a un niveau de diplôme inférieur au BEPC en connaissent 4 de moins », indiquent les auteurs du travail. A l’inverse, « ceux dont la mère a un diplôme de l’enseignement supérieur plus élevé que le niveau Bac+2 en connaissent 6 de plus ». La différence est un peu moins prononcée en ce qui concerne le niveau d’éducation du père. En revanche pour le développement moteur, le niveau d’éducation et le revenu semblent avoir peu d’influence.
Cette étude confirme « pour la France les résultats de la littérature internationale sur les inégalités socioéconomiques dès le plus jeune âge, plus ou moins marquées selon le domaine du développement », soulignent les auteurs. « Avec des écarts considérables d’acquisition du vocabulaire dès les 2 ans de l’enfant, soit avant même l’entrée à l’école maternelle dont l’âge est pourtant précoce en France. »
*La cohorte Elfe (Etude longitudinale française depuis l’enfance) est composée de 18 000 enfants nés en 2011