Les plaquettes : entre sang et vaisseaux
25 juin 2014
Le don de plaquettes sanguines sauve des millions de vies chaque année dans le monde ©Phovoir
L’hématologie, ou la science du sang, est une discipline relativement récente. Le Pr Jacques Caen, hématologue et membre de l’Académie nationale de médecine y a consacré sa vie. Pour Destination Santé, il revient sur une histoire à la fois riche et passionnante.
« L’hématologie est une science jeune. C’est seulement depuis les années 1930 que les spécialistes savent examiner la moelle osseuse, la rate ou les ganglions par ponction. De ces différentes techniques est né le concept global de maladies du sang », explique le Pr Jacques Caen. Le sang est composé de globules rouges, de globules blancs, de plasma et de plaquettes. Passionné de médecine chinoise, le Pr Caen a travaillé de longues années afin de mieux comprendre les fonctions des plaquettes sanguines humaines et animales.
« Elles ont été découvertes en 1683 par le Britannique Thomas Boyle. » Ce dernier affirme en effet l’existence dans le sang de cellules qui aident à la coagulation. « Il a probablement découvert les plaquettes sans réellement les identifier », confie l’hématologue.
C’est en réalité près de 150 ans plus tard qu’Alfred Donné, à l’Hôtel-Dieu de Paris, identifie pour la première fois les plaquettes. Pour sa part, Jacques Caen, assisté d’Alan Murden, a étudié les bases moléculaires des maladies liées à celles-ci. Il est en quelque sorte à l’origine des anti-agrégants plaquettaires. « Des traitements qui empêchent la formation de caillots ou thrombus dans les vaisseaux. C’est grâce à une meilleure connaissance des thrombopathies fonctionnelles et à la découverte dans les années 1960-1970, des récepteurs de l’adhésion plaquettaire, que nous avons pu faire ce bond en avant ».
L’identification et la compréhension des mécanismes des plaquettes sanguines ont ouvert la voie à bien d’autres traitements. « Les hémorragies au cours des thrombopénies peuvent aujourd’hui être traitées par transfusion de plaquettes et aussi avec des médicaments issus des découvertes de la thrombopoietine faites en France par William Vainchenker et son équipe », poursuit-il. « Jean Dausset, de son côté, a découvert les groupes leucocytaires, qui lui ont valu le Prix Nobel de médecine en 1980. La leucémie à promyélocytes particulièrement hémorragique que nous avons décrite en 1957 est désormais guérie par les modulateurs ouvrant une voie prometteuse au traitement d’autres formes de leucémie aiguë. »
Des synergies avec la Chine
Les travaux de Jacques Caen et de ses équipes se sont orientés vers l’étude des relations entre vaisseaux et plaquettes sanguines. Et plus précisément sur l’endothélium vasculaire, la couche la plus interne des vaisseaux sanguins, celle en contact avec le sang. En 1989, sous son impulsion est créé l’Institut des Vaisseaux et du Sang. « J’ai dirigé pendant 11 ans, de 1989 à 2000, cet institut. Nous y avons accueilli beaucoup d’étrangers et surtout des Chinois », raconte le Pr Caen. Pendant cette période, il a consacré de nombreux travaux à la régulation des mégacaryocytes, les cellules précurseurs des plaquettes. Ce n’est pas tout, il a également été à l’origine de nombreuses études sur les relations entre ces dernières et le fibrinogène. « Nous avons démontré le rôle de cette protéine dans la fonction d’agrégation plaquettaire », indique-t-il.
Jacques Caen n’en a pas fini avec sa passion pour la médecine. « Les voies de recherche, c’est entre autres la médecine régénérative. Autrement dit les cellules primitives (cellules souches) du placenta et du cordon ombilical autour desquelles il y a un vif débat éthique en France. Je travaille avec des homologues chinois plus particulièrement sur les cellules du placenta et du cordon ombilical ».
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Source : : Interview du Pr Jacques Caen, mai 2014 – INSERM, site consulté le 19 juin 2014
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Ecrit par : Emmanuel Ducreuzet – Edité par : Dominique Salomon