Maladie d’Alzheimer : les principales pistes de traitement
20 septembre 2011
A l’échelle mondiale, 36 millions de personnes souffriraient de la maladie d’Alzheimer ou d’une affection apparentée. La France compterait environ 800 000 malades, les projections pour 2020 faisant état de 1,3 million à 2 millions de patients selon les sources. « D’ici 10 ans, chaque famille française sera touchée », annonce la Fondation pour la Recherche médicale (FRM) à la veille de la Journée mondiale de la maladie d’Alzheimer, ce 21 septembre. Autant de chiffres et de constats qui illustrent l’urgence de la mise au point d’un traitement, objet d’une intense compétition mondiale. Etat des lieux des principales pistes.
Contre la maladie d’Alzheimer, une union… européenne. Pour répondre à l’immense défi ainsi posé ainsi qu’aux enjeux de société qu’il emporte, la recherche européenne s’est structurée. Objectif : mutualiser les forces pour éviter les efforts redondants d’un pays à un autre, comme l’ambitionne la très active initiative, lancée au niveau européen pour assurer la programmation conjointe des recherches sur les maladies neurodégénératives. Lancée en avril 2010, elle mobilise d’ores et déjà des centaines de chercheurs sur l’ensemble du Vieux continent.
« Notre objectif est d’optimiser l’investissement de recherche dans les maladies neurodégénératives à travers toute l’Europe, et de mettre au point une stratégie à l’échelle du continent », nous explique le Pr Philippe Amouyel, (Institut Pasteur de Lille), qui est à la tête de cette structure. En 15 mois d’existence, plusieurs axes de travail ont déjà été dégagés. Le plus important est centré sur « l’optimisation des biomarqueurs » de la maladie d’Alzheimer.
Il n’existe actuellement aucun médicament curatif contre cette affection neurodégénérative. En France, quatre molécules sont indiquées dans sa prise en charge mais elles n’agissent « que » sur les symptômes et le rythme d’évolution de la maladie. Il s’agit du donépézil, de la galantamine, de la rivastigmine et de la mémantine.
Etude Hippocampe. La première de ces molécules – le donézépil (Aricept®) donc- fait d’ailleurs l’objet d’une étude française. Baptisée Hippocampe et coordonnée par le Pr Bruno Dubois (Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris), elle porte sur 174 patients randomisé, en double aveugle, contre placebo. Elle doit évaluer l’efficacité de ce médicament chez des patients présentant des troubles cognitifs légers.
Hippocampe n’a pas encore été publiée dans une revue scientifique. Ses premiers résultats ont toutefois fait l’objet d’une présentation poster lors d’un congrès (ICAD 2011) qui s’est tenu à Paris en juillet dernier. Ils montreraient (sur IRM) un ralentissement de l’évolution de la taille de l’hippocampe – considérée comme un marqueur d’évolution de la maladie – chez les patients traités. Faute de traduction clinique à ce stade, ces résultats sont encore préliminaires. Ils n’en suscitent pas moins beaucoup d’espoirs.
Immunothérapie : des résultats en… 2013. Actuellement dans le monde, une centaine de molécules sont testées, toutes phases confondues de 1 à 3. « Les plus avancées sont dans le domaine de l’immunothérapie », nous confirme le Pr Amouyel. « Après de nombreux espoirs déçus, nous attendons avec impatience les résultats de 6 ou 7 essais d’ici 2013 ».
Chef du service de neurologie au CHU de Lyon, le Dr Bernard Croisile se montre assez pessimiste sur ce sujet. « Je ne suis pas certain que la piste de l’immunothérapie tiennent longtemps » nous explique-t-il. « Nous avons des essais très modestes ».
La piste des anti-sécrétases… D’autres pistes conduisent aux sécrétases, des enzymes qui ont tendance à produire en excès le peptide amyloïde toxique. Lequel entre autres, caractérise la maladie d’Alzheimer. L’idée est en quelque sorte de couper la cascade d’événements qui conduit à la formation d’amyloïde en excès. « C’est un enjeu important », reprend le Pr Amouyel avant de citer une étude qui était très attendue. Centrée sur les gamma-secrétases, elle vient de donner des résultats très décevants. « Mais d’autres travaux vont être lancés prochainement avec les beta-sécrétases ».
… et celle des protéines Tau. Dans le cas de la maladie d’Alzheimer, les protéines Tau s’agrègent anormalement et seraient à l’origine de la dégénérescence neuronale. « C’est une piste de recherche très active », ajoute le Dr Bernard Croisile (CHU de Lyon). « Les premiers essais cliniques vont bientôt démarrer ». Ce qui signifie qu’il faudra encore patienter de longues années avant d’éventuels résultats…
ILLUSTRATION : L’hippocampe est l’une des régions du cerveau les plus précocement atteintes par la maladie d’Alzheimer. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) permet de visualiser et de délimiter cette structure in vivo. Source INSERM
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Source : Interview du Dr Bernard Croisile, 20 septembre 2011 – Interview du Pr Philippe Amouyel, 20 septembre 2011 – Le Parisien, 20 septembre 2011 - Fondation pour la Recherche médicale, 20 septembre 2011 – INSERM, 15 avril 2010 – INSERM, 11 janvier 2011