Maladie du foie gras : dépister les patients à risque

08 juin 2018

En marge de la première journée internationale dédiée à la NASH – la désormais fameuse maladie du foie gras – qui aura lieu le 12 juin, le CHU d’Angers (en pointe sur la question) a décidé de communiquer sur cette épidémie silencieuse. Et par la même de rétablir quelques vérités. Non, tous les patients présentant un foie gras ne développeront pas la NASH. Oui, il est possible de dépister les patients à risque sans en passer par une biopsie.

D’emblée il convient de faire une distinction d’importance. Alors que la maladie du foie gras est présentée ici et là comme une épidémie mondiale émergente, il est urgent de calmer les esprits et de rectifier une confusion.

En fait il existe un problème de dénomination. Surpoids, obésité et diabète obligent, 20% de la population souffre d’une NAFLD c’est-à-dire une maladie du foie gras non alcoolique. En clair, de la graisse va s’accumuler dans le foie. « Mais chez ces personnes, dans 80% des cas, il ne se passera rien », précise le Pr Jérôme Boursier, du service hépato-gastro-entérologie et oncologie digestive du CHU d’Angers. « En fait, il faut voir la maladie comme une pyramide. Les 20% restant développeront une fibrose. C’est là que débute la NASH. Et chez certains, de 5 à 10%, la dégradation ira jusqu’à  la cirrhose et parfois le cancer.»

Problème, la NASH reste très longtemps asymptomatique. C’est l’amer constat dressé par Guy Ravinet, 77 ans. Un peu par hasard, suite à un bilan hépatique dans le cadre d’une polyarthrite, le verdict est tombé : il souffre d’un « foie gras ». Il faut avouer que le patient cumulait les facteurs de risque : obésité, diabète, hypertension… « Le résultat de 40 années de restaurants quasi-quotidiens pour un ancien VRP », explique-t-il. La particularité de M. Ravinet fut d’avoir développé un cancer du foie sans être passé par la case « cirrhose ».  Pris en charge par le CHU d’Angers, il va bien aujourd’hui. Une chance que sa pathologie ait été repérée à temps.

Un test non invasif

Car ce n’est pas toujours le cas. Pour le Pr Boursier, il est important de repérer rapidement les patients à risque. Mais comment faire ? Une biopsie systématique des 20% de la population touchée par une NAFLD semble difficilement envisageable. C’est pourquoi, Jérôme Boursier rappelle qu’il existe un test simple et non invasif, le eLIFT pour « easy Liver Fibrosis Test ». « Une prise de sang prescrite par le médecin permettra d’identifier ceux qui développeront une NASH. Il s’agit en fait d’un algorithme. Des paramètres biologiques courants qui, mis bout à bout nous indiquent si une prise en charge par un hépato gastroentérologue est nécessaire. »

A la recherche d’un traitement

A l’heure actuelle, aucun traitement n’est disponible. A l’échelle mondiale, une étude de phase III en double aveugle teste actuellement 4 molécules dont l’objectif est de réduire l’inflammation. Le CHU d’Angers a d’ailleurs enrôlé certains patients. Les résultats n’étant pas attendu avant plusieurs années, le Dr Adrien Lannes gastro-entérologue et hépatologue à Angers rappelle que « le premier traitement, c’est la perte de poids. La NASH peut en effet être résolutive avec une perte de 10% de la masse corporelle ». En clair, si vous pesez 90kg, il vous faudra perdre 9kg.

« Malheureusement les patients ont du mal à intégrer les recommandations nutritionnelles », se désole le Pr Boursier. En effet entre les « 5 fruits et légumes par jour » et le fait de ne « pas manger trop gras, trop sucré, trop salé », difficile de faire plus abstrait.

L’hygiène de vie, primordiale

« Il est urgent d’aborder le sujet avec une double approche », lance le Dr Agnès Sallé, du Département d’endocrinologie-diabétologie et nutrition du CHU d’Angers. « Une approche quantitative de l’alimentation et une approche qualitative. »

Ainsi dispense-t-elle des conseils très pratiques dans cette optique de perte de poids. « Le visuel est primordial. Une assiette bombée donne l’impression de quantité. En utilisant des assiettes plus petites, vous réduirez les quantités avec toujours cette sensation d’un plat rempli. Evitez aussi la tentation de vous resservir en enlevant le plat principal de la table. Côté ‘qualité’, évitez de manger trop vite, prenez le temps de mastiquer. Ne mangez pas devant la télévision. Ainsi vous ferez attention à ce que vous ingurgitez… » Et bien entendu, pensez à pratiquer une activité physique régulière.

  • Source : CHU d’Angers, juin 2018

  • Ecrit par : Vincent Roche – Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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