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Les maladies coronariennes* sont la principale cause de morbidité (l’impact des maladies sur la santé, y compris la qualité de vie), et de mortalité dans le monde. Pour prévenir leur survenue, ou leur progression, les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé, de l’American Heart Association et de la Société européenne de cardiologie préconisent de manière unanime au moins 150 minutes d’activité physique d’intensité modérée à élevée par semaine pour tous les adultes. Or, ces recommandations sont uniformes, malgré des données montrant un écart entre les sexes dans la capacité à pratiquer une activité physique. De plus, le lien entre cet écart et le risque de maladies coronariennes reste mal compris. Comme dans bien d’autres domaines liés à la santé, hommes et femmes ne sont pas logés à la même enseigne et c’est pour le démontrer qu’une équipe anglaise a planché sur le sujet.
Le Dr Jiajin Chen et ses collègues (Institute of Cardiovascular Diseases, Xiamen, China) ont analysé les données de la UK Biobank (grande base de données médicales en Grande Bretagne)), recueillies grâce à des traceurs d’activité portés au poignet, auprès de plus de 85 000 participants, afin d’étudier les différences entre sexes dans l’association entre activité physique et maladies coronariennes. Au total, 48,46 % des participants sans maladie coronarienne atteignaient le minimum recommandé d’activité physique d’intensité modérée à élevée, contre seulement 30,51 % des patients atteints de maladie coronarienne. Par ailleurs, les femmes présentaient une durée et une intensité d’activité physique inférieures à celles des hommes et respectaient moins les recommandations.
« Dans cette vaste étude prospective utilisant des données d’activité physique mesurées par accéléromètres portés au poignet auprès de plus de 85 000 participants, décrivent les auteurs de l’étude, nous avons observé des différences importantes entre les sexes quant aux bénéfices cliniques de l’activité physique sur l’incidence et la mortalité des maladies coronariennes. »
Parmi les 80 243 participants (45 986 femmes et 34 257 hommes ; 53- 69 ans) sans antécédent de maladie coronarienne, les femmes respectant l’objectif de 150 minutes d’activité par semaine présentaient un risque réduit de 22 % de développer une maladie coronarienne, contre 17 % chez les hommes. Une analyse plus poussée a montré que les femmes obtenaient une réduction de 30 % du risque en pratiquant 250 minutes par semaine, tandis que les hommes devaient atteindre 530 minutes pour obtenir un effet comparable.
Ce qui est encore plus intéressant est qu’au sein de cette même cohorte, si l’on regarde de plus près les 5 169 participants (1 553 femmes et 3 616 hommes) déjà atteints de maladie coronarienne, le respect des recommandations en matière d’activité physique était associé à une réduction du risque de mortalité toutes causes confondues trois fois plus importante chez les femmes que chez les hommes.
Les auteurs estiment que « les recommandations actuelles négligent les différences entre sexes et que des stratégies adaptées pourraient améliorer la prévention des maladies coronariennes ». Déjà soulevé par de précédentes observations, le constat est sur la table. D’autres études, incluant des populations plus diversifiées que la seule population britannique vont être nécessaires, d’une part pour confirmer ces observations et, d’autre part, pour orienter des recommandations vraiment personnalisées entre hommes et femmes. Mais également pour comprendre le phénomène : répartition différente du tissu adipeux, protection conférée par les œstrogènes, meilleure oxydation des graisses… rien n’est réellement compris aujourd’hui.
A noter : malgré l’approche uniforme adoptée par les recommandations d’activité physique pour les deux sexes, un écart important est bien documenté, les hommes présentant généralement une capacité physique supérieure à celle des femmes. À l’échelle mondiale, la prévalence d’une activité physique insuffisante est supérieure chez les femmes par rapport aux hommes (33,8 % contre 28,7 %).
En France, en 2021, 72,9 % des hommes et 59,3 % des femmes âgés de 18 à 85 ans atteignaient les recommandations d’activité physique.
* Les maladies coronariennes regroupent les affections résultant d’un rétrécissement ou d’un blocage des artères coronaires, responsables de l’irrigation du muscle cardiaque. La cause principale est l’athérosclérose, https://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2024/12/2024_12_1.html?utm_source=chatgpt.comc’est-à-dire l’accumulation de dépôts de lipides et de plaques dans les parois artérielles, pouvant entraîner angine de poitrine (angor), infarctus du myocarde ou insuffisance cardiaque.

Source : Chen, J., Wang, Y., Zhong, Z. et al. Sex differences in the association of wearable accelerometer-derived physical activity with coronary heart disease incidence and mortality. Nat Cardiovasc Res (2025) ; Virani, S. S. et al. 2023 AHA/ACC/ACCP/ASPC/NLA/PCNA guideline for the management of patients with chronic coronary disease: a report of the American Heart Association/American College of Cardiology Joint Committee on Clinical Practice Guidelines. Circulation 148, e9–e119 (2023) ; Strain, T. et al. Lancet Glob. Health 12, e1232–e1243 (2024) ; Prévalences nationales et régionales de l’activité physique et de la sédentarité des adultes en France : résultats du Baromètre de Santé publique France 2021 N° 12 - 11 juin 2024

Ecrit par : Hélène Joubert - Édité par Emmanuel Ducreuzet