Médicament : l’année de tous les bouleversements…

27 décembre 2004

Voilà une année lourde de revers pour le médicament. Pour les industriels, nul n’en doute. Mais aussi pour les prescripteurs, les malades et… ses détracteurs. Les mois qui viennent de s’écouler augurent mal de l’avenir. Ils appellent le changement.

Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt, les secousses qui ont affecté le monde du médicament en 2004 ne se limitent pas à quelques affaires isolées. Elles ne sont pour la plupart, que des muleta agitées sous le mufle des média.

Les vrais fissures sont ailleurs. Dans l’esprit du malade notamment. Car les efforts de transparence s’ils ont été réels, ont été trop rares. Le mal est fait, la défiance installée.

Cela ne date pas d’hier, mais de l’époque où le médicament a été banalisé. Quand les fonds de pension sont arrivés, ils se sont saisis du médicament. Il ne s’est plus agi de prolonger la vie des retraités qui leur avaient confié leurs économies, mais d’augmenter leur richesse matérielle. Ce fut l’époque des grandes fusions-acquisitions. Beaucoup de laboratoires dotés d’une tradition de recherche se sont fondus dans des méga structures anonymes. Le diktat de niveaux de croissance à 2 chiffres s’est installé, imposant un dogme nouveau : celui du blockbuster qui obligatoirement, devait sortir des paillasses à intervalles de 2 ans…

Les vraies responsabilités occultées
Les crises ont affecté d’abord des patients. Pourtant, les média les ont ramenées à la dimension de séismes boursiers ou de véritables délits commis au nom de la déesse Economie ! Les débats scientifiques ont été escamotés, l’analyse statistique malmenée au nom du sensationnalisme boursier. Les responsabilités réelles ont été occultées. Pas celles des agences réglementaires qui dans tous les pays tiennent cette industrie sous tutelle, que celles des politiciens qui les ont mises en place, essentiellement semble-t-il pour se prémunir contre un remake d’une affaire du sang contaminé… Les débats au sein de l’Assemblée parlementaire française sont éclairants. Le problème n’était pas la sécurité du malade, mais l’argent.

Nul n’en sort grandi. Le malade ne sait plus quelles questions se poser. La défiance rejaillit principalement sur les méga-entreprises qui tirent les ficelles, chacun pressentant l’urgence d’un retour à des interlocuteurs de dimension humaine… et donc responsables au vrai sens du terme. Capables de répondre de leurs actes. Il y a urgence car sous couvert de tout voir, tout savoir et tout interpréter, on en arrive à publier tout et n’importe quoi sur certaines questions de santé. La tendance n’est pas absolument nouvelle mais elle s’accélère. Et pas seulement dans les tabloïds d’Outre-Manche. On apprend ainsi tout à trac que les préférences sexuelles ou le signe du zodiaque pourraient intervenir dans des pathologies de la reproduction ou certaines affections, comme la sclérose en plaques. A quand des articles pour réhabiliter le formidable attrait de la poudre de perlimpinpin… ?

  • Source : The Lancet, 3 juillet 2004, Institut de Recherche pour le Développement, 2004 - Photo UNAIDS/Sven Torfin

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