Médicament : opération oeuf de Pâques en trompe-l’oeil…

25 avril 2003

Utiliser la trêve pascale pour fourguer un train de mesures impopulaire, le truc est vieux comme tout. Mais le premier volet du Plan Mattéi, publié samedi au J.O., laisse aux Français la désagréable impression qu’ils sont pris pour des cloches…

Dire que la désormais fameuse liste de 617 médicaments « déremboursés » est une surprise, ce serait un abus de langage… Aux dernières « Auditions de la Santé » organisées par les laboratoires MSD-Chibret, le Club des Economistes de la Santé et l’Espace social européen, il n’était question que du déficit cumulé de l’assurance maladie. Estimé de source officielle aux environs de 16 milliards d’euros, les spécialistes réunis au Sénat parlaient plutôt de 20 milliards…

Professeur à l’Institut de la Gestion publique et du Développement économique au Ministère de l’économie et des finances, Rémi Pellet avait eu beau jeu de rappeler que selon la formule d’un ancien Directeur des Hôpitaux, « la France est le pays qui a inventé les médicaments efficaces à 30% » ! C’est ce même ministère qui vient sans rougir d’abaisser à 35% le remboursement de ces médicaments, dont beaucoup très largement utilisés. Car l’un des côtés sombres du dispositif mis en place cette fin de semaine et de façon quasi subreptice, c’est qu’il frappe des produits dont il est difficile d’assurer qu’ils sont sans efficacité. D’ailleurs ce n’est pas fini. Le pouvoir n’en fait pas mystère, annonçant ce mardi que les médicaments « à service médical rendu nul, voire nocif » ne seraient plus pris en charge dès le 1er juillet. Et pourquoi pas tout de suite, surtout s’ils sont nocifs ?

Les économies espérées ne seront pourtant qu’un emplâtre sur une jambe de bois. A peine 400 millions d’euros, pour un trou de 20 milliards ! Avec une croissance économique en panne, le politique touche aux limites de la contradiction. Engagement étant pris de ne pas augmenter la CSG ni les cotisations, la patate chaude est repassée aux mutuelles et assurances complémentaires. Lesquelles annoncent logiquement des hausses de cotisations. Le problème est que l’on n’a jamais tondu un oeuf. Pour réaliser de vraies économies à hauteur du problème posé, il faudra porter le fer à l’essentiel des dépenses, c’est-à-dire l’hôpital. La question n’est pas de savoir si ce sera fait un jour, mais de savoir quand cela sera fait…

  • Source : Journal Officiel 19 avril 2003, Troisièmes « Auditions de la Santé », Sénat, 2 avril 2003

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