Méningite : en finir avec des décès potentiellement évitables
28 février 2023
Depuis deux ans, les autorités sanitaires ont enregistré une recrudescence du nombre de cas de méningites à méningocoque. Des infections extrêmement graves dans certains cas à l’origine de décès ou de séquelles très invalidantes. Pourtant aujourd’hui il est possible de les prévenir par la vaccination pour certaines d’entre elles. Explications.
Qu’est-ce qu’une méningite à méningocoque ?
La méningite à méningocoque résulte d’une infection des fines membranes qui enveloppent le cerveau et la moelle épinière. Sans traitement, elle peut être à l’origine d’une infection généralisée. Laquelle s’avère gravissime, avec une mortalité qui concerne 10% des cas. Par ailleurs jusqu’à 20% des personnes touchées souffrent ensuite de lourdes séquelles qu’elles soient physiques, telles que des amputations, sensorielles (troubles auditifs) ou neurologiques (épilepsie, difficultés d’apprentissage).
Selon le Dr Didier Pinquier, du service de pédiatrie néonatale et de réanimation pédiatrique du CHU de Rouen, « le méningocoque est un agent présent au niveau des voies aériennes supérieures responsable d’infections graves et notamment de méningite. Une affection qui se transmet entre individu, par la salive, l’éternuement et les postillons. » Cette maladie a particulièrement frappé la région Normandie au début des années 2000, avec plus de 80 cas.
Quels en sont les signes ?
« La particularité de ce type d’infection, c’est son côté imprévisible. Quant aux premiers signes comme le nez qui coule, les maux de tête ou encore la fièvre, ils sont d’une telle banalité qu’ils nous empêchent de penser à une méningite. Cette maladie est donc très difficile à diagnostiquer. Quant aux autres signes d’alerte comme l’apparition d’éruptions cutanées ressemblant à des tâches violettes, ils doivent être synonymes d’une prise en charge en urgence au risque de voir l’infection rapidement gagner du terrain. » Il existe plusieurs sérogroupes de méningite à méningocoque. « On en recense plus d’une dizaine », explique le Dr Pinquier. « En France nous observons la circulation essentiellement de 4 sérogroupes, le B, le C, le W et le Y. »
Une reprise épidémique inquiétante
La fin de l’année 2022 a été marquée par une hausse de l’incidence des méningites à méningocoques. « Avec 84 cas déclarés en décembre 2022, l’incidence se situe à un niveau élevé », explique Santé publique France. « Sur l’ensemble de l’année 2022, les infections étaient en grande majorité liées aux sérogroupes B (53 % des cas), Y (23 % des cas) et W (19 % des cas) tandis que le sérogroupe C était très minoritaire (3 % des cas). » A noter que la maladie touche le plus souvent des nourrissons et de jeunes adultes en bonne santé.
Pour notre spécialiste ce rebond épidémique était redouté. « On a eu un gros frein des infections invasives à méningocoque avec la mise en place des mesures barrière pour prévenir la transmission du Covid. Par ailleurs, le fait de ne pas avoir été exposé aux microbes et virus pendant le Covid a diminué notre immunité, nous rendant plus fragiles. »
Quelle prévention ?
La prévention des méningites repose en grande partie sur la vaccination qui est à l’heure actuelle la seule arme fiable. « Nous avons réussi grâce à l’obligation vaccinale de 2018 portant notamment sur le sérogroupe C à augmenter de manière considérable la couverture vaccinale. Résultat, le nombre de cas pour ce type de sérogroupe s’affiche à la baisse. Concernant le sérogroupe B, la vaccination figure depuis 2022 dans le calendrier vaccinal et nous devrions prochainement observer le même phénomène. Le problème c’est que nous voyons émerger un peu partout en Europe les sérogroupes W et Y. Certes il existe des vaccinations disponibles dites quadrivalentes contre les sérogroupes A, C, W et Y, mais elles ne sont pas encore recommandées par les autorités en France. »
« Nous souhaiterions vraiment faire évoluer cette politique vaccinale au regard de l’épidémiologie actuelle et nous aligner par exemple sur les Pays-Bas, la Belgique ou encore les Etats-Unis qui proposent notamment de cibler les vaccinations auprès des adolescents avec la vaccination quadrivalente. Il faudrait également réfléchir à proposer cette vaccination à nos nourrissons. »
La méningite, une maladie soudaine et brutale
Annie Hamel, milite depuis 2015 à l’Association Petit Ange ensemble contre la méningite. Son fils Aurélien, étudiant à Lille, est décédé d’une méningite à méningocoque C, sans aucun signe précurseur. « Cela a été extrêmement soudain et brutal pour notre famille. Nous ne savions même pas qu’il existait un vaccin car il n’y avait aucune information à ce sujet. Notre médecin non plus n’était pas informé. »
Depuis Annie s’est investie auprès des autorités pour l’obligation vaccinale de 2018, concernant la méningite de type C. Avec l’Association Petit Ange ensemble contre la méningite, elle se mobilise justement pour mieux informer les familles, mais aussi les soutenir dans la douleur. « Aujourd’hui nous demandons davantage de communication autour de la prévention vaccinale pour que le grand public soit mieux informé. C’est un des seuls moyens de prévenir cette maladie totalement imprévisible. Nous travaillons notamment pour une évolution du calendrier vaccinal afin d’offrir une protection qui permet de prévenir les sérogroupes de types A, C, W et Y. »
Pour davantage d’informations : https://www.associationpetitange.com/
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Source : SITUATION DES INFECTIONS INVASIVES À MENINGOCOQUE EN FRANCE AU 31 DÉCEMBRE 2022 – Santé publique France - WHO. Meningococcal meningitis. https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/meningitis - CDC. Meningococcal disease – Diagnosis, Treatment, and Complications. https://www.cdc.gov/meningococcal/about/diagnosis-treatment.html
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Ecrit par : Emmanuel Ducreuzet – Edité par : Vincent Roche