Méningites : vers une protection élargie et plus adaptée ?
21 mai 2024
Depuis plus d’un an désormais, le nombre de cas de méningites à méningocoques s’envole en France. L’Institut Pasteur a lancé une alerte sur cette situation dramatique qui touche de plus en plus de personnes (notamment les nourrissons et les adolescents).
Qu’est-ce qu’une méningite à méningocoques ?
« Une méningite, c’est une inflammation des méninges, qui sont les enveloppes du système nerveux central, comprenant le cerveau et la moelle épinière », explique le Dr Jean François Pujol, pédiatre à l’hôpital de Libourne, l’hôpital de Blaye, ainsi qu’à la Polyclinique Bordeaux Rive Droite à Lormont. « Lorsqu’il y a une infection dans le liquide entourant ce système, on parle de méningite. Laquelle peut être virale, souvent bénigne ou bactérienne, beaucoup plus grave et potentiellement mortelle. Les méningocoques sont parmi les bactéries responsables des méningites bactériennes. »
Ces méningites sont à prendre très au sérieux et pour cause. « Ce sont des infections fulminantes, pouvant entraîner la mort en quelques heures si elles ne sont pas traitées rapidement », indique le Dr Pujol. « Même en cas de survie, les séquelles peuvent être graves, notamment des troubles cognitifs, des handicaps physiques et des séquelles psychologiques. Il est crucial de reconnaître les signes précoces de la méningite et d’agir rapidement pour éviter les complications. »
Comment la reconnaître ?
Et pourtant comme le souligne notre spécialiste ce n’est pas si évident. « Les symptômes initiaux peuvent ressembler à une infection virale banale, avec de la fièvre, de la fatigue et des maux de tête. Et c’est justement l’évocation de cette infection virale banale qui peut faire perdre un temps précieux, car, une méningite peut évoluer rapidement et nécessite une prise en charge médicale urgente. »
Une évolution dans la répartition des différents sérogroupes en cause
La bonne nouvelle concerne le sérogroupe C qui a quasiment disparu en France. « C’est grâce à la vaccination contre ce sérogroupe qui a été rendue obligatoire depuis 2018 et cela démontre parfaitement l’efficacité de la vaccination. Mais depuis, les souches B et surtout W et Y circulent davantage. Et pour l’ensemble de ces sérogroupes, les nourrissons et les 15-25 ans figurent parmi les populations les plus vulnérables. Sans oublier les personnes de plus de 65 ans. »
En finir avec la perte de chance
Des solutions de prévention sont aujourd’hui disponibles. Une véritable évolution saluée par « MéninGO ! », une coalition d’acteurs de santé engagés dans la lutte contre les infections invasives à méningocoques, visant à en faire une priorité de santé publique. Face à la recrudescence alarmante de ces infections, la coalition a pour objectif d’informer le public et réduire les inégalités en accélérant la révision du calendrier de vaccination. “MéninGO!” plaide pour une meilleure couverture vaccinale adaptée à l’épidémiologie de la population, en s’inspirant des stratégies vaccinales des autres pays européens.
Elena Moya, la coordinatrice Europe de la Confederation of Meningitis Organizations et membre de “MéninGO!”, se réjouit de l’évolution du calendrier vaccinal français. « C’est une révolution. La Haute autorité de Santé recommande la vaccination obligatoire contre les sérogroupes ACWY des nourrissons de moins de 1 ans (à 6 et 12 mois) et la vaccination contre les sérogroupes ACWY des 11-24 ans. » La date d’entrée en vigueur de la vaccination obligatoire sera fixée par décret.
Ces recommandations seront effectives dès lors que le vaccin sera pris en charge par l’Assurance Maladie dans le cadre du droit commun. La France rejoint ainsi de nombreux pays européens. « L’Autriche, la Belgique, l’Italie, la Norvège, les Pays-Bas, vaccinent déjà leurs jeunes. C’est une étape importante pour assurer la protection de la population contre les méningites. Seules l’Allemagne et la Pologne ne protègent pas encore correctement leurs adolescents. » Enfin avec près de 16 millions de touristes attendus en France pour les Jeux Olympiques de Paris 2024, Elena Moya insiste « sur l’urgence de sensibiliser les jeunes adultes aux risques de transmission. »
La voix des patients
« Plusieurs centaines de personnes sont touchées chaque année en France par le méningocoque, notamment les adolescents », explique Jimmy Voisine de Méningites France association Audrey. « Ces victimes se rajoutent aux centaines d’autres des années précédentes. Notre ignorance a permis à la bactérie d’emporter notre fille Audrey, elle avait 12 ans ! Devant l’urgence de la situation et afin de lutter contre l’augmentation des méningites W et Y, l’association Audrey ne peut qu’approuver l’arrivée de nouvelles recommandations pour une protection étendue. »
Le drapeau de lutte contre les méningites
Créé par la communauté méningite et pour la communauté, il a été lancé le 28 août 2023, 1 an avant les Jeux Paralympiques de Paris 2024. Ce drapeau est le fruit d’une collaboration entre des para-athlètes touchés par la méningite : Ellie Challis, Théo Curin et Davide Morana, les membres de la Confederation of Meningitis Organizations (CoMO), la Meningitis Research Foundation (MRF : organisation caritative internationale de premier plan engagée dans la lutte contre la méningite), Sanofi et conçu par Laura Spring. Bien plus qu’un drapeau, c’est un symbole de détermination qui a pour but de rallier et de fédérer autour d’un même combat : accélérer la mise en œuvre de la Feuille de route mondiale pour vaincre les méningites à l’horizon 2030. En 3 mots ce symbole a pour objectif de : Protéger, Soutenir, Vaincre.
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Source : Santé publique France, Calendrier vaccinal 2024 – Interviews Dr Jean François Pujol et Elena Moya, mai 2024
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Ecrit par : Emmanuel Ducreuzet – Edité par : Vincent Roche